DRESDE ET VITTORIA. -
JtJILLE'r
1815.
12!)
que sorte
a
égayer la guerre, et
a
meler les jeux
a
la mort
!
Le 24 juillet il partit pour Mayeoce,
laissant derriere luí toutes choses invariablemcnt
prévues et arretées.
Le
26,
les commissaires de Neumarkt répon–
dirent enfin d'une maniere satisfaisante, relati–
vcment au jour préeis des futures hostilités, et
il
fut reconnu , apres eo avoir conféré avec
l'ernpcreur Alexandre, surtout apres de vives
obscrvations de
M.
de Metternich, que le général
en chef Barclay de Tolly avait mal compris les
paroles de son maitre, et que si l'armistice pou–
vait etre dénoncé le
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aotit, il n'expirerait
cependant que le
16,
ce qui remcttait au
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la
reprise des hostilités. Ce malentendu, comme
on l'a vu, venait du peu de clarlé que l'empe–
reur Alexandre avait mis a faire connaitre une
concession dont il était embarrassé devant les
partisans impatients de la guerre, et du peu
de penehant de ces derniers a intorpréter les
stipulations douteuses dans le seos de
Ja
paix.
L'empereur Alexandre se trouvait alors a Tra·
chenberg, petite ville de Silésie, ou il s'était
rendu de Reichenbach avec le roi de Prusse et
la plupart des généraux de Ja coalition, pour
confércr avec le prince de Suedc sur Je plan des
opérations futures. CctLe réunion, fort désirée
des deux souverains qui voulaient encha1ner
d
éfini ti vement l'ancicn maréchal Bernadotte a
lcur cause, et terminer ses longues hésitations,
était loin de plaire aux offieiers russes et alle–
mands, notamment
a
ces derniers. On parlait
de confércr au prince royai un commandemcnt
important; on lui préparait sur sa ro ute des
honneurs extraordinaires, afin de le touchcr par
l'endroit, si sensible cbez lui, de la vanité. Ces
emprcssements pour un hommc qui n'avait aux
yeux des Allemands et des Russes d'autre mérite
que d'étre général franc;ais, et qui était loin de
compter parmi les premiers, excitaient au plus
haut <legré la jalousie nationale des états-majors
alliés. Leurs monarques, disaient.-ils, voulaient
done déclarer qu'un général franc;ais' meme
médiocre, valait mieux que tous les généraux de
la coalition, et que c'était un titre d'honneur de
porter les armes contre son pays. La perspective
d'etre placés sous ses ordres leur était souve–
rainement désagréable.
Malheureusemcnt on s'entretenait aussi d'un
autre général franc;ais, celui-la grand homme de
gucrre, doué de véritables vertus civiques et
guerrieres, et non pas, comme Bernadolte, gra–
tifié d'une couronne royale pour prix de médio-
coNsULAT.
5.
eres serviccs, mais de l'exil pour prix de services
immenses, et qui, vaincu par l'ennui, le désreu–
vrement, l'irritation que lui inspirait un rival
]leureux, l'horreur que lui avait fait éprouver
la campagne de l\foscou, s'était laissé persuader
de quitter l'Amérique pour l'Europe. Ce général
était l'illustre Moreau .
Il
était vcnu
a
Stockholm,
altiré dans cette capitale par Beroaclotte, qui
semblait pressé de se procurer des imitateurs.
' Entouré la des plus funestes conscils, agité,
combattu, malheureux, se demandant s'il faisait
bien ou mal,
il
marchait sans s'en apercevoir
a
un abime, dominé par des sentiments eonfus qu'il
croyaithonneLes, parce que, sousl'indignation sin–
cere qu'il éprouvait, il ne voyait pas la part que la
haine et l'oisiveté avaient a sa conduite. On se
préoccupait beaucoup de cette arrivée, et on
di sait le général i\Ioreau destiné
a
devenir le
conseiller de l'empereur Alexandre. C'était une
nouvelle cause de déplaisir pour les rnilitaires
russes et allemands qui, avec un redoublement
de jalousie, demandaient si leurs souverains
croyaient done que pour vaincre les généraux
franc;ais
il
n'y avait de suffisants que les géné–
raux franc;ais eux-memes?
Quoi qu'il en soit, l'ancien maréchal Berna–
dotte était venu
a
Trachenberg, voyageant, non
pas comme les souvcrains de Russie et de Prusse,
avec une extreme simplicilé, mais avec un faste
éblouissant, comme un monarque parcourant
ses États daus une occasion solennellc. Ayant
passé en revue quelques-unes de ses troupes,
qui déja profitaient de l'armistice pour se rendre
en Prusse,
il
avait paru pres de Stettin, oú se
trouvait une garnison franc;aisc. Sa tete iuflam–
mable commenc;ait a se persuader que Napoléon,
odicux
h
l'Europe , a chargc
a
la France, ne
pourrait bientot plus régner ; que les .lfourbons,
longtemps oubliés, ne pourraient pas etre remis
sous les yeux de la génération présente; que des
lors ce serait
h
lui
a
remplacer Napoléon sur le
treme de France. L'insen'sé, dans son orgueil,
ne voyait pas qu'apres la gloirc, la tradition
antique aurait seule de l'empire sur les esprits,
et que la médiocrité souilléc du sang fran<;ais
n'était pas appelée
a
succéder au génie malheu–
reux. Tandis qu'il se montrait
a
cheval sous les
murs de Stettin,
a
la vue de la garnison fran–
c;aíse, des coups de feu partirent saos qu'on
put savoir qui les avait tirés. Des officiers de
Bernadotte vinrent se plaindre au brave général
Dufresse, commandant de la place , de cette
violation de l'armistice. -
Ce
n'est rien, r épon-
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