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DRESDE ET VITTORIA . -

.1u1LLET

1815.

12t5

ligne, rejeté en huit jours sur le Rhin , et il eút

été étrangement inconséquent d'abandonn er dans

les combats ce qu'on s'obstinait

a

défendre témé–

rairement dans les négociations. ll n'y avait pas

de milieu, ou il fallait renoncer tout de suite

a

l'Allemagne, et accepter les conditions de

1'1.

de

Metternich, ou, si on la disputait diplomatique–

ment,

il

fallait aussi la disputer militaircment,

et on ne le pouvait que sur l'Elbe. Or, placé

a

Dresde, ayant

a

sa droite Krenigsberg,

a

sa gau–

che Torgau, Wittenberg, l\Iagdebourg, Ham–

bourg, pouvant, comme

il

le fit bientót

a

Dresdc,

aecabler ceux qui essaycraient de le tourner,

Napoléon avait encorc d'immenses chances pour

lui. Restait,

il

est vrai, le danger de se battre si

loin d u Rhin contre l'Europe enticrc, et, si un

de ses lieutenants était faible ou malad roit sur la

vaste ligne de Kmnigstein

a

Hambourg, de se

trouver en l'air au milieu de l'Allcmagne sou–

levée; mais alors

il

fallait avoir le bon scns de

reconnaitre, et le courage de dirc que Ja fauLe ,

de Napoléon était politique , et lui conseiller

d'abandonner l'Allemagne, ce qui était Ja certi–

tude d'une paix immédiate et glorieuse. Faute

de poser ainsi la question, on se donnait tort

contre Napoléon; car

a

vouloir gardcr l'Allema–

gne,

il

est bien vrai qu'on ne pouvait la défen–

dre que sur l'Elbe. Aussi, dans leurs nomhreux

entretiens, Je prince Berthier , les maréchaux

Soult, Ney, Mortier, n'osant pas souteoir r éso–

IUment qu'il fallait rentrer sur le Rhin, s'expo–

saient

a

etre réfutés victorieusement en propo–

sant des lignes intermédiaires entre l'Elbe et le

Rhin, étaient battus par la logique pressante de

Napoléon, et se taisaient, en conservant cepen–

dant le scntiment d'un grand péril, car c'était un

grand péril en effet que de se battre avec l'Eu–

rope, non sur le Rhin• pour la défense légitime

de notresol, mais sur l'Elbc pour la pensée usur–

patrice de la domination universelle. Les choses

se passaient autrement lorsqu'il s'agissait de la

question, toute politiquc, de la paix et de la

guerre.

U

Napoléon sentait bien qu'il avait tort,

car

il

n'avait pas une bonne raison

a

faire valoir.

II ne disait pas la vérité, parlait vaguement de

sacrifices, qui , d'abord moUérés en apparence,

deviendraient bicntót, s'il cédait, immodérés et

inadmissibles, et laissait entcndre, sans l'expri–

mcr cependant, que l'Au trichc osait lui rede–

n;iander jusqu'a l'ltalie. Alors il s'échauffait, par–

lait de l'honneur de l'Empire, et s'écriait qu'il

valait micux périr que de supporter de sembla–

bles conditions, surtoutde la part de l'Aulriche,

qui , apres Jui avoir donné une archiduchesse en

rnariage , apres avoir accepté son alliance en

1812, profitait du premier revers pour se tour–

ner contre lui, comme si une pareille conduitc,

en supposant qu'ellc füt tcllc que la dépeignait

Napoléon, eut été bien Cl'Írníncllc de la part

d'une puissance qui, longtemps battue et dé–

pouilléc d'une grande partie de ses États, saisis–

sait l'occasion d'en r ecouvrer ce qu'cile pouvait,

surtout contre un conquérant sans modération

et sans mesure

! -

Ses contradictcurs ignorant

le secret des n égociations, supposant toujours

qu'il s'agissait de sacrifices bien plus considéra–

bles que ceux qu'on nous demandait véritable–

ment , accordant qn'il était désagréable de céder,

surtout

a

des gens qui nous dressaient en quelque

sorte un guct-apens, se rejetaient sur le he–

soin urgent de la paix, et avaient Ut des avan–

tagcs incontestables. Napoléon avait rencontré

pour apótre constant de la paix

l\f.

de Caulain–

court, qui le suppliait sans rel:iche de ne pas

s'obstiner contre l'orage, et de passer par-des–

sus un déplaisir momentané pour sauvcr la

France, l'armée, Jui et son fils. Dans cette coura–

geuse et civique tach e, 1\1. de Caulaincourt

ét~it

infatigable, et rccommenc;ait sans cesse avec une

admirable persévérance.

l\'l.

de Caulaincourt

avait trouvé un singulier auxiliaíre dans le due

d'Otrante, M. Fouché, qui , bien que chcrchant

a

reconquérir la faveur impérialc perdue, n'hési–

tait pas, inspiré par son bon sens et peut-etre aussi

par le danger que la chute de l'Empire devait

fa ire courir

a

tous les hommcs de la révolution ,

n'hésitait pas

a

soutenir hardiment qu'il fallait

conclure la paix. Il ne s'agissait point, selon

1\1.

Fouché, de savoir laquelle ; c'était le secret

des plénipotcntiaircs que Napoléon avait cbargés

de cetlc tach e; mais apres Lutzen et Bautzen, en

s'en rapportant

a

une sorte de notoriété publi–

que, en songeant

a

Ja crainte que la France

n'avait pas cessé d'inspirer, on ne pouvait pas

douter, disait-il, que les conditions ne fussent

encore tres-belles; et si, comme tout le faisait

présumer , on concédait

tl

la France au dela dn

Rhio et des Alpes, on lui concédait plus qu'il ne

lui fallait, plusqu'ellene désfrait. On devait done,

sauf les détails, signer Ja paix qui nous était

o!fcrte; car l'Europeétait exaspérée, et la France

épuisée commenc;ait

a

partager l'exaspération de

l'Europe contre un systemc qui ne laissait pas

plus de bicn-Ctrc au vainqueur qu'au vaincu. -

Dans l'une de ces eonversaLions ,

a

laquclle

avaient été présents M. Daru,

1\1.

de Caulaincourt,