DRESDE ET
VITTORIA. -
JUJLt,ET
18,15,
France püt regrettcr véritablement, car, ainsi
que nous l'avons déja <lit, ·et qu'on nous permet–
tra de le i·edil'e ·encore, lorsqu'on lui laissait,
outre les Alpes et le Rhin, la Hollandc, le Pié–
mont, la Toseane, Rome, a titre de départements
fran<;ais, la Westphalie, la Lomuardie, Naples,
a
litre de principautés de famille' on luí coneé–
dait plus que la Fraoce ne devait désil'er, et
qu'elle ne pouvait posséder. Ici se p1·ésentent
quelq ues réflexions que nous avo ns déja ind iquées,
mais .qu'il faut reproduire plus complétement
au moment décisif, pour apprécicr sainement
les déterminations de Napoléon. Si l'on examine
!'une aprcs l'aulre ses prétentions territoriales,
oo reconnaiLra cambien il était peu raisonoable
d'y teuir. La Hollande elle-meme, qui était la
moins déraisonnable de toutes, ne pouvait etre
qu'avec beaucoup de peine rattachée matériel–
lement et moralement a l'Empire. Quand oo en
avait détaché ce que Napoléon avait pris au roi
Louis en
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l O, pour Je punir de ses résistan–
ces, c'est-3-dire ce qui est situé
a
la gauche du
Wahal, lequel est le Rhin véritable et constitue
la plus puissantc des barrieres, on avait acquis
tout ce qui était désirable sous le r apport des
frontieres, reslant toujours la grave difficulté
morale de morceler un pays aussi homogene
que Ja Hollande, et dont toutes les partics sont
faites pour vivrc ensemble! Quant a Ja portian
au dela du Wahal, qui s'élend jusqu'au Texel,
et comprend Gorcum, Nimcgue, Utrecht, Rot–
terdam, la Hayc,
Amsterda~,
le Texel, c'est-a–
dire la grande Hollaode,
il
était impossible de
la rattacher
a
la .géographie militaire de la
Franee, et Napoléon, dans ses plus habiles com–
binaisons pour la défensc du territoire, n'avait
jamais pu trouver une maniere de couvrir le
Zuiderzéc, et d'établir une frontiere solide de
'Vesel
a
Groninguc. N'ayaot pour protéger cette
partie de la Hollande que Ja faible Jignc de l'Ys–
scl, il n'avait vu d'autrc ressourcc que les inon–
dations, et les avaít ordonnPes; or, un pays
qu'on ne peut garder qu'en le noyant, il n'est
pas seulement inhumain , il est impolilique <le
songer
a
le posséder. En ayant dans l'Océan la
Rochelle, Ill'est, Cherbourg, Anvers et Flessin–
gue, Napoléon avait contre l'Angletcrre tout ce
qu'il pouyait désirer, et ces tcrrains, moitié
iles, moitié continént, qui s'étendent de Nimegue
a Groningue, de Be'rg-op-Zoom au Texel, entre
terre et mer, portant une race indépcndantc,
fiere, sage, riche, pleine de souvenirs asscz
glorieux pour ne pas vouloir les confondrc avec
ceux d'une autre nation, méritaient d'etre.laissés
indépendants entre toutes les puissances ·de
I'Europe, pour continuer a etre la voie
la
plus
large et la plus libre du cornmerce maritime
!
Quant au Piémont lui-meme, était-il bien prudent
de chercher
a
posséder un territoire au dela des
Alpes, c'est-a-dire au dela de nos frontieres
naturelles' devant nous aliéner
a
jamais
les
ltaliens, comme la posscssion de la Lombardie n'a
cessé de les aliéncr a l'Autricbe, nous valant des
baines au lieu d'influence, et destiné, au premier
regne faiblc,
a
nous écbapper inévitablement?
Toutefois, daos un systeme de grandeur
a
la
fac;on de Charlemagne, grandeur qui n'est daos
les ternps modcrncs qu'un pur anacbrooisme,
car lorsq ue Charlcmagne régnait ·sur le continent
de l'Elbe
a
l'Ebre, il embrassait dans ses vastes
États des pays
a
moitié sauvages, n'ayant encore
aucune existence historique; dans un tel sys–
tcme, on peut concevoir l'addition de la Hol–
Jande, qui est une sorte d'appendice maritime
de notre lerritoire, comme le Riémont en est
une sorte d'appendice continental, utile
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qui
veut descendre souveot des Alpes; mais rneme
dans ce systeme déja faux, que faire de la
Toscane et de Rome? Que faire de l'Illyrie, de
Hambourg, de Lubeck? Ce n'était plus qu'un
entrainemeot de conquetes insensées, sans plan
et sans limites, pouvant durcr la vie d'un con–
quérant tel qu'Attila ou Alexandre, mais devant
a
sa mort donner licu a un partage <le territoires
entre ses licutenants ou ses voisins
!
Avcc un tel
systeme qui, ne reposant sur aucun príncipe
politique, ne pouvait avoir aucune limite tcr–
ritoriale, dans lequel on pouvait tout faire entrer
sauf a ne ricn gardcr'
il
n~étai
t
pas possible de
dire que l'empire de Napoléon fllt véritablement
moins grand parce que Hambourg ou Lubeck
n'y seraient pas compris. Napoléon était tout
autañt Charlemagnc sans ces villes qu'avec elles,
car celui qui, outre Bruxelles, Anvers, Flessin–
gue, Cologne, :Maycnce, Strasbourg, avait encore
Utrccht, Amsterdam, le Texel, Turin, Flol'ence,
Rome, sans compter Cassel, i\filan, Naples, était
aussi grand, plus grand meme que Charlemagne,
de cette grandcur fabuleuse qui avait au neu–
vicme siccle sa raison d'etrc, qui ne l'avait plus
au dix-neuviemc, et qui apres son Charlemagne
aurait cu inévitablement son Louis le Débon–
naire. On ne comprend pas que le principal de
cette grandeur chimérique étant accordé a Napo–
léou, il la comprornit pour Hambourg, pour
Lubeck, ou pour un vain tit1·c comme celu·i' de
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