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LJVRE QUARANTE-NEUVIEi\IE,
dait
a
l\f.
de Bassano l'autorisation de passer
oulre, M. de Bassano devait lui permcltre de faire
quelques concessions relaLivement
a
l'échange
des pouvoirs et
a
la forme des négociations, mais
en lui défendant expressément d'abordcr le fond
des choses. 11 serait aisé de gagner ainsí jusqu'au
5 ou 4 aout, jour probable du retour de Napo–
léon
a
Dresde, et alors
iI
tracerait lui-memc la
conduitc qu'on devrait tenir ultérieurcment.
Apres avoir arreté d'aprcs ces donnécs les
instructions de M. de Caulaincourt, Napoléon
fit
ses dispositions pour partir le
2'"
juillet au
soir. 11 expédia en meme temps quclques ordrcs
relatifs
a
l'armée. Les deux mois perdus pou-t·
les négociations ne l'avaient pas été, comrne on
le pense bien, pour
les
préparatifs militail'es.
L'infanterie bien campée, bien nourrie, bien
exercée, avait singulierernent gagné sous tous
les rapports, et particulierement sous celui de
la force numérique. La cavalcrie avait complétc–
ment ehangé d'aspect ; elle était nombreuse et
assez bien rnontée. Les jeunes ehcvaux, presquc
tous blessés
a
l'eotrée en campagne, étaient en
meilleur état. Nos cavalicrs, si prompts
a
se
former, savaient déja se servir de lcurs mon–
tures et les soigner. Napoléon avait , outre la
cavalerie légere attachée
a
ehaque armée, quatre
beaux corps de eavalerie de réserve sous les
généraux Latour-1\faubourg, Sébastiani, de Pa–
doue, de Valmy. La garde, formée
a
cinq divi–
sions d'infanterie, compreoait en outre douze
mille cavaliers avee dcux een ts bouches
a
feu
bien servies. Quinze ccnts gardes d'honneur sous
le général Dejean étaient ar·rivés
it
Dresde. Celte
brave jeunesse, qui n'était pas d'abord partie
dans de tres-bonnes dispositions, parvcnue
maintenant en ligne, n'aspirait qu'a s'illustrer
sous les yeux de la grande armée. Le corps du
général Vandamme, que Napoléon avait vu a
Magdehourg, composé d'hommes jeunes, mais
de vieux cadres revenus de l\Ioscou, était fort
bcau. Les quatre divisions organisées
a
l\Iayence,
et destinées
a
venil' par Wurzbourg, Hof,
Frcyberg, Dresde, s'établir
a
Krenigstein , s'ache–
rninaient vers ce point, et présentaient un aspect
satisfaisant, quoique remplies de jeunes soldats
comme tout le reste de I'armée. Les approvision–
nements, commandés de toutes parts, arrivaient
par l'Elbe
a
Dresde, ou plus de cinquante mille
quintaux de gl'ains et farincs étaient actuellement
réunis. Grace
a
I'activité :au maréchal Davoust,
les défenses de Hambourg étaient pour ainsi
dire sorties de dessous tcrre. Elles portaient
déja deux cenls bouches
a
feu en batterie, et
~dlaient
bientót en recevoir trois ccnts. 'Iout
s'achevait done suivant les vues de Napoléon, et
le progres de ses desseins ne le disposait guere
tl
la paix, ce qui autorisait i'\L de Bassano
a
répéler partout que les forces de l'Empereur
étaient immenses et son génie toujours plus
grand, que l'E urope en devait trembler, et que
ce n'était pas au plu s fort
a
fairc des sacrifices
au plus faihle.
Napoléon cherchant
a
répandrc un peu d'ani–
mation dans ses camps, ou ses jeuncs troupes,
sauf les beures consacrées aux manreuvres,
avaient été oisivcs pendant deux mois, imagina
pour les occuper un genre d'cxercice
a·
la fois
attrayant et utile. 11 avait ordonné de les faire
tirer
a
la cible, et pour les intéresser davantage
a
cet cxcrcice si important,
il
voulut qu'on leur
distribuat des prix proporlioonés
a
leur ad1·esse.
Les meilleurs tireurs de chaque compagnie, au
nombre de six, devaient recevoir un prix de
quatre francs, puis se réunir
a
tous ccux du
meme bataillon, se mesurer ensemble, et con–
courir pour un nouveau prix triple du précé–
dent. Ceux des bataillons devaicnt se réunir par
régiments, ceux des régiments par divisions,
ceux des divisions par corps d'armée, et cou–
courir de nouveau pour des prix succcssivement
plus élevés , de telle fac;on que les meilleurs
tireurs d'un corps d'armée pouvaient remporter
des prix qui allaient jusqu'a cent francs. Tous
ces prix rcprésentaient une dépense <l'une cen–
taioe de mille frnn cs , ce qui était peu de chose,
et avait, outre l'avantage inappréciable d'amélio–
rer le
tir,
celui d'occuper, d'amuser les
hommcs~
de lcur fournir l'occasion et le moyen de régalcr
leurs camarades. Napoléon
fit
aussi payer la
solde aux officiers pour qu'ils pussent jouir des
quelques jours de repos qui leur restaient, et
qui, pour le plus grand nombre, étaient, hélas !
les derniers de leur vie
!
La fete de Napoléon
approchait, puisqu'elle se célébrait le
11:)
aoti.t. 11
voul ut que la célébration en fltt fixée nu
10,
afin que les hostilités étant reprises le '17, les
réjouissances ne fussent pas trop voisines des
nouvellcs sccnes de carnage qu'il prévoyait. Ce
jour d u
1
O il devait y avoir dans tous les camps
des r epas
a
ses frais et en son honneur. Les
officiers devaient diner chcz les maréchaux, les
soldats entre eux sur des tables servies .en plein
air. Le vin devait etre prodigué, et bu soit
a
la
santé de Napoléon, soit au triomphe des armes
de la France. Ainsi Napoléon cherchait en quel-