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114

LIVRE QUARANTE-NEUVJEI\JE.

coté de Vittoria, re<;ut en plein le choc de la

cavalerie anglaise. l\Iais avcc les dragons de

Digeon, de Tilly, de Mermet,

il

la contint, et

pm·vint

a

protéger la retraite de son corps d'ar–

mée jusqu'it Betono. En cet endroit se trouvait

un bois; on s'y enfoni;a, ce qui permit de par–

courir en súreté une partic du chemin qui

menait

a

la route de Pampelune en tournant

dcrriere Vittoria. l\lais au sortir du bois on

aperi;ut un gros corps de cavalerie qui nous

nttendait. Le général Reille le

fit

charger par le

5e

de hussnrds et le 1

!>

0

de dragons, puis

marcha en bate vers le village d'Arbulo. La

cavalerie ennemie nous y poursuivit

a

outrancc.

Le général Reille, avec les

2e

léger et

56e

de lignc

de la hrigade Fririon, se forma en avant de ce

village, pour donncr au reste de son corps

d'armée le temps de défiler. Assailli par les

nombreux escadrons des Anglais,

il

les rcc;ut en

carré et couvrit le terrain de leurs morts. Toutes

ses troupes ayant défilé, il traversa lui-rneme

le village, et gagna ainsi sain et sauf la route

de Salvatierra, oú se précipitaient confusément

les divcrs corps de notre armée et toute la

queue du vaste convoi que nous avions conduit

avec tant de peine de Madrid

tl

Vittoria.

Nous avions eu dans celte fatale journée envi–

ron 5 mille

mort~

ou blcssés, et les Anglais

a

peu pres autant. :Mais en soldats de corvée, en

fuyards, en valets d'arméc, on nous avait pris

1,l':iOO

ou 1 ,800 hommes. Nous laissions en outre

a

l'ennemi 200 bouches

a

feu, non pas perdues en

ligne, rnais abandonnécs faute d'une route con–

venable pour les faire passer, plus 400 caissons

et un nombre infini de voiturcs de bagagcs.

Joseph n'avait pas meme sauvé sn proprc

voi~

ture qui contenait tous ses papicrs.

On se demandera naturellement ou était en

ce moment le général Clausel avec les 1

ñ

millc

hommes qu'il aurait pu amencr, ce que faisait

sur le revcrs des rnonts le général Foy qui ,

renforcé de plusieurs pelitcs garnisons et du

général .Maucune, avait , lui aussi ,

HS

mille hom–

mes dont la préscncc aurait été si utile daos Ja

faLale plaine de Viltoria. Ces 30 mille hommes,

joints aux ?52 ou

l':i4

mille de Joseph, formant

t'énorme masse de plus de 80 mille combaltants,

auraient pu accablcr les Anglais et les rcjeter

en Portugal; et alors quclle dilTérencc, non–

seulement pour les affaires de la Péninsule, mais

de l'Europc entiere, car les Anglais, qui cxer–

ctaieot en Allemagne une si grande influeuce sur

les résolutioos des coalisés, s'ils avaient conc;u

quelques craintes pour leur armée de la P'énin–

sule, auraient ccrtainement facilité les négocia–

tions, jusqu'a rencontrer peut-etre sur la limite

des concessions possibles l'orgueil meme de

Napoléon ! 1\'lais cette fois, comme tant d'autres,

ce n'était ni le nombre, ni la vaillance, ni le

dévouement qui avaient manqué aux soldats de

l'armée d'Espagne, c'était la direction. Le géné–

ral Foy, qui n'était séparé de Joscph que par la

montagne de Salinas, n'avait re1tu aucun des

avis qu'on lui avait ndressés, et n'avait connu

In présencc de l'arrnée

a

Vittoria que par l'ap–

parition de la division i\foucune

a

la suite du

convoi qu'elle escortait. Si ce mouvcment de la

division 1\faucune cut été ordonné deux jours

plus tót, on aurait pu mcttre Je convoi en sureté,

et ramcncr un renfort de dix

a

douze mille

hommes

a

Vittoria. Quant au général Clauscl ,

des qu'il avnit su la marche des Anglais et la

r clraite de notre arméc, il avait réuni ses divi–

sions en toute h:ite, était arrivé le 20

h

Logroño,

y avait cherché de tous cótés des nouvclles de

Joscph, n'avait trouvé que des habitants ou

fu git.ifs ou silencieux, et personne qui pút ou

voulút lui donner un renseignement. Seulement

il avait rencontré des agents anglais faisant

préparer des vivres, et d'aprcs plusicurs vestigcs

recueillis sur la route,

il

avait été conduit

a

penser que l'armée franc;aise s'était portée de

Miranda sur Vittoria. Le

21,

il s'était décidé a

s'avancer par Penacurada jusque sur Je revers

de la Sierra de Andia, pour voir s'il pourrait,

a

travers cette sierra, tcndre la main a Joseph.

l\1Iais se doutant avcc raison qu'il avait entre

Joseph et lui I'armée anglaise, sans savoir ni

mi,·

ni en quel nombre,

il

s'était approché avec pré–

caution, n'avait été joint par aucun des paysans

qu'on lui avait dépechés, et vers la chute

du jour avait fini pal' apprendre qu'on s'était

battu toutc la journée, hélas, saos résultat

heurcux

!

Le

22

au matin, voulant connaitre la

vérité entiere , et

:1

tout prix tacher de rejoindre

l'armée franc;aise pour lui porter secours , il

avait eu la hardiesse de gravir la Sierra de Andia

et de jcter un regard sur la plafne de Vittoria.

Des sornrnets de cette sierra il avait vu notre

immense désastre, et séparé de Joseph par les

Anglais victorieux,

il

n'avait du songer qu'a son

propre salut. Sans se troublcr,

il

avait regagné

les bords de l'Ebre, l'avait descendu jusqu'a

Logroñ o, et ayant toujours entre Joseph et lui

les Anglais qui nous poursuivaient en Navarre,

il

avait pris la résolution , l'une

de~

plus sages et