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LIVRE QUARANTE-NEUVIEME.
Anglais ayant toujours tenté de déborder nolrc
droite, allaicnt continuer probablemcnt la meme
maooouvre. lis devaicnt , vcnant de I\furguia,
cssayer de déüouchcr
n
lravers les passages du
mont Arrato dans la plainc de Vittoria, ce qui
lesconduiraitaux bords de la Zadorra, qui longe,
avons-nous dit,le pie<l du mont Arrato. Bien que
eette ri viere füt peu considérable, on pouvait en
rendre le passage difficile en rompant tous ses
ponts, et en couvrant ses gués d'artillerie, ce
qui était aisé, puisque nous trainions aprcs nous
une masse énorme de canons. Or,
íl
était indis–
pensable de rcndre ce passage non-seulement
difficile, mais presque ímpossible, car, cll' tra–
versant la Zadorra, l'ennemi pouvait tomber
SUL'
les derriercs ou au moins sur Je ílane de notre
armée, rangée dans le bassin de Vittoria, et fai–
sant face au défilé par lequel on y pénetre en
venant de Miranda. Ce défilé,
a
Lravers lcquel la
Zadorra s'échappc, ainsi que nous l'avons déja
dit, et qui s'appelle le défilé de la Puebla, était
le second obstacle
a
opposer
a
l'ennerni, et il
fallait bien étudier le tenain pour chercher les
meilleurs·moyens de le d.éfendre. II y avait pour
cela une posítion dont l'événernent prouva les
avantages, et qui aurait fouroi le moyen d'inter–
dire aux Anglais tout acccs dans la plaine. En se
po1·tant en effet un peu en arricre, daos l'inté–
rieur meme du bassin de Vittoria, on rencon–
trait une éminence, celle de Zuazo, qui permet·
tait de milrailler l'ennemi débouehant du défilé,
ou descendant des hauleurs de la Sierra de
Andia, puis de l'y refouler en le chargcant a la
ba'ionnelte apres l'avoir mitraillé. Cette position,
assez rapprochée de Vitloria et des passages du
mont Arralo par lesquels les Anglais
mcna~ai ent
de déhoucher sur nos derrieres , permettait
d'avoir toutes choses sous l'ooil et sous la main,
et de pourvoil' rapidement aux diverses occur–
rences. Il élait done possible, en coupant les
ponts de la Zadorra, en occupant avee soin la
hauteur de Zuazo , de défendre le bassin de Vit–
loria avec ce qu'on arnit de troupes , et d'y atten–
dre en surcté le général Clausel. Enfin,
u
toutes
ces précautions on aurait
du
joindre celle d'en–
voyer au général Clausel non pas des paysans
mal payés, mais un régiment de -cavalerie pour
lui renouveler l'indication précise du rendez–
vous. Or, comme nous l'avons déja dit, on avait
plus de cavalerie qu'il n'en fallait sur le terrain
ou l'on était appelé
a
eombattre.
De ces diverses précautjoos ,
íl
n'en
ful
pris
aueune. Le
19
au soir on ne fit point partir le
convoi, et on n'envoya au général Clnusel que
des paysans sur lesquels on ne devait pas
compter, et qui d'ailleurs, s'ils avaient été fideles,
auraient été exposés
a
etre arretés. Le jour sui–
vant 20, au lieu de montcr
a
cheval pour recon–
naitre le terrain, Jour<lan et Joseph ne so1•lirent
point de Vittoria. Le maréchal Jourdan élait
atteint <l'une ficvre violente, résultat de l'age,
des fatigues et du chagrín. Joseph, qui n'avait
d'autres yeux que ceux du maréchal, rcmit au
lendemain 21 la reconnaissance des lieux. lI se
flattait, et le maréchal Jourdan aussi , que les
Anglais, avee leur circonspection - ordinaire ,
chercheraicnt
a
perce1·
a
travers les montagnes
pour nous déborder, mais ne se hateraient pas
<le nous altaquer de front. La seule chose que la
maladie du maréchal Jourdan n'empechat pas,
e'était de se délivrer du convoi, dont on était
embarrassé au point de ne savoir ou se mettre,
et on décida qu'il partirait da ns la journée du 20.
Afin de ne garder avec soi que l'artillerie de
campagnc, on ordonna aux armées de Por·tu·gal
et d'Andalousie de fournir lous les attelages qui
ne leur seraient pas indispensables pour trainer
le gros canon au dela des Pyrénées. De plus,
bien qu'on sut que la division Foy était sur le
revers de la
chaine~ ,
entre Salinas et Tolosa ,
comme les bandes se glissaient
a
travers les
moiodres espaces, on donna a ce convoi la divi–
sioo i\iaucune pour l'escorter. Par suite de cette
disposition, l'armée de Portugal se trouvait de
nouveau réduite a deux divisions, et l'arméc
entiere
a
55 ou 54 mille·hommes.
Ainsi toutes les mesm'es ordonnées le 20 con–
sisterent
a
faire partir pour Tolosa le convoi quí–
aurait du partir le
19,
a
ranger le général Gazan
avec l'armée d'Andalousie en face du défilé de la
Puebla, le comte d'Erlon avec l'armée du Centre
derriere le général G:azan, et puis
a
droite en
arriere, le long de la Zaclorra, le général Reille
avec les deux divisions restantes de l'armée de
Portugal, afio de tenir tete au corps tournant
des Anglais qui venait par la route de l\forguia.
Aux négligences commises oo :ijouta celle de ne
pas couper un seul des ponts dela Zadorra. Entre
nos divers corps d'infanterie on
pla~a
notre belle
cavalerie, qui malheo.reusement, dans le terrain
que nous occupions, ne pouvait pas rendre de
grands services, car le bassin de Vittoria est
semé de caaaux nombreux qui arretent par–
tout l'élan des troupes
a
cheval. Nous comp–
tions environ 9
a
1
o
mille cbevaux' ce qui
r éduisait notre infanterie
a
45 ou 44 mille com-