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94

LIVRE QUARANTE-NEUVIE.l'IIE.

~ais

dont vous défendez ici le saog, n'ont pas tant

a

se plaindre de moi. J'ai perdu, cela est vrai,

deux cent mille hommes en Russie;

il

y avait

daos le nombre cent millc soldats

fran~ais

des

meilleurs; ceux-la je les regrctte... oui, je les

regretre vivement... Quant aux autres, c'étaient

des Italiens, des Polonais, et principalement tics

Allcmands... - A ces paroles, Napoléon ajouta

un geste qui signifiait que celte derniere pcrte le

touchait peu. - Soit, reprit l\I. de l\fetternich,

rnais vous convicndrcz, Sire, que ce n'est pas

une raison

a

donner

a

UD

Allcmand. - Vous

parliez pour les Fran<;ais, je vous ai rép9ndu

pour eux, répliqua Napoléon. - Puis,

a

celte

occasion, il employa plus d'une heure

a

raconler

a

M. de Metternich qu'en Russie

il

avait été sur–

pris et vaincu par le mauvais temps; qu'il pou–

vait tout prévoir, tout surmonter, excepté la na–

ture; qu'il savait se batt1·e avec les hommes,

mais non avec les éléments. N'ayant pas revu

M. de Metternich depuis la catastrophe de 18i2,

if

s'éludia

a

refaire

a

ses yeux le prestigc de son in–

vincibilité, beaueoup trop détruit daos !'esprit de

certains hommes, et mit un grand soin

a

prou–

ver que sur le champ de bataille on ne l'avait

jamais vaincu, ce q ui éLait vrai; que s'il avait

perdu des canons, c'était par le froid qui, en

tuant les chevaux, avait détruit le moyen de

traincr l'artillerie. Pendant qu'il parlait, mar–

chant avec une extreme animation,

il

avait ren–

contré et repoussé du pied daos un coio de l'ap–

partement son chapeau resté

a

terre. Au milieu

des allées et venues de ce long entretien, il re–

vint

a

l'idée fondamentale de son discours, c'est

que l'Autriche,

a

laquelle

il

avait fait remise tant

de fois des peines qu'elle avait encourues,

a

la–

quelle

il

avait demandé une archiduchesse pour

l'épouser, faute, disait-il, bien grande de sa part,

osait encore, au mépris de tant de bons procédés,

lui déclarer la guerre. - Faute, reprit

l\L

de

Metternich, pour Napoléon conquérant, mais

non pas faute pour Napoléon politique et fon da–

teur d'empire, - Faute ou non, reprit Napo–

léon, vous voulez done me déclarer la guerrc!

Soit, quels sont vos moyeos? Deux cent mille

hommes en Boheme, dites-vous, et vous préten–

dez me faire croire

a

des fablcs pareilles ! C'est

tout au plus si vous en avez cent, et je soutiens

que ces cent se réduiront probablementa quatre-

1

Celle célebre entrevue e L de toutes cellcs ou apoléon a

figuré personncllemenl, la plus difficile

a

reproduire, faule de

documenls suffisants. Pour les autres entretiens de 'apoléon

rapportés précédemment daos cette bi toire, il existait des do-

e:

vingt mille en Iigoe.

~

La-dessus

il

conduisit

M. de Metternich daos son cabinet de travail, lui

montra ses notes et ses carles, lui dit que

l\f.

de

Narbonne avait couvert

l'

Autriche de ses cspions,

et qu'on tenterait en vain de l'effrayer par des

chimercs ; que les Autrichiens n'avaient pas

meme cent millc hommes en Bobcmc. - En ef–

fet, la prétention des Autricbiens était d'cn avoir

trois cent cinquante mille sous les armes, dont

cent mille sur la route d'Italie, cioquante mille

en Baviere, deux cent mille en Bohémc. C'étaient

la les propos d'hommes qui n'avaient pas l'babi–

tude de ce genre de calculs, et qui ne savaient pas

que si l'Autriche avait trois cent cinquante mille

hommes sur ses controles, elle en aurait tout au

plus deux cent mille au feu, dont cinquante peut–

etre sur'la route d'Italie, trente sur cellc de Ba–

viere et cent ou cent vingt en Boheme. Napoléon,

par l'expérieoce qu'il avait des mécomptcs qu'on

essuie a la guerre sous le rapport des nombres,

traita légerement les assertions de M. de :Metter–

nich, que celui-ci, étranger a l'administration

militaire, n'était pas capable de justifier suffisam–

meot. Laissant la ce sujet sur lequel

il

n'était pas

facile de s'entendrc, Napoléon dita M. de Met–

tcrnich : Du reste, ne vous melez pas de cette

querelle, dans laquelle vous courez trop de dan–

gers pour trop peu d'avantagcs, tenez-vous a part.

Vous voulez l'Illyric, eh bien, je vous la cede;

mais soyez neutre, et je me battrai

a

coté de vous

et saos vous. La paix que, vous voulez procurer

a

l'Europe, je la lui donnerai st'trement, et équitable–

ment pour tous. Mais la paix que vous cherchcz

a eonclure au moyen de votre médiation est une

paix imposée,qui mefaitjouer aux yeux du monde·

le role d'un vaincu auquel on dicte la loi... la loi,

quand je viens de remporter deux vicloires écla–

tantes !...

1\1.

de l\'leLternich revint

a

l'idée de

la

médiation, dont

il

ne pouvait se départir, s'ef–

for~a

de la montrer non comme une contrainte

qu'il s'agissait de faire subir

a

Napoléon, mais

comme une intcrvention officieuse d'un allié,

d'un ami, d'un perc, qui, au jugemcnt du monde,

quand on connaitrait les conditions proposées,

serait encore considéré comme bien partial pour

son gcndre. - Ah! vous persistez, s'écria Napo–

léon avec colere, vous voulez toujours me dicter

la loi, eh bien , soit, la guerre

!

mais

a

revoir,

a

Vienne

1 •••• -

cuments nombreux , soit <lans nos archives diplomaLiques, soít

dans les archives diploma tiques éLrangeres; pour celui donr

il

s·agit ici au conrraire, apoléon n'ayant ríen adressé

a

ses

agent exlérieurs, on manque de !'un des moyeus d'informa-