PEROU ET llOLIVIE.
S93
que aucun vestige d'habitations par–
ticulieres propre 11 nous éclairer sur
la condition des simples sujets.
L'habileté des architectes péruviens
s'est surtout révélée dans la construc–
tion des temples et des palais. Les
pompeuse. descriptions que nous ont
donn ées de ces édifices les historiens
esp<1gnols passeraient pour menson·
geres, ou tput au moins pour exagé–
rées, si des ruines grandioses et par–
faitement conservées ne certifiaient
aux yeux de l'observateur moderne la
véracité de ces écrivains. Le nombre
scul des palais et des temples dont les
restes se voi enl encore dans presque
toutes les provinces de l'ancien em·
pire péruvicn' suffirait'
a
défaut d'au–
trcs témoignages, pou r prouver que
ces édillces forent l'ouvrage d'un peu–
ple industrieux et puissant, non dans
l'acception absoluc de ces mots ,
muis
relativement aux .autres nations
arnéricaines. lis sont de grandeurs
différentes; quelques-uns n'ont qu'une
étendue médiocre;
il
en est dont les
dimensions gigantesq es confondent
l'esprit du voyageur ; tous se rcssem–
blent par leur solidité, le mo e de
leur construction et le style de l'ar–
chitecture. Le temple de Pachacamac,
le palais de !'Inca et la fortere
6
de
Cuzco occupaient ensemb le une su–
perficie de plus d'un edcmi-lieuedecir–
cuit. On y remarque un goGt, si non
bizarre, du moins étrange. Les Péru–
viens, ignorant l'usage de la poulie et
des autres puissances mécaniques in–
ventées par le génie de l'ancien monde,
et ne pouvant, par conséquent, éle–
ver
a
une grande hauteur les pierres
énormes dont ils se servaient, n'a–
vaient donné que douze pieds d'éléva–
tion aux murailles du palais. Les
pierres sont juxtaposées , sans c!ment
ni mortier, et cependant , au dwe de
plusieurs voyageurs , les
matéri~ux
sont si bien 1Jnis qu'on distingue d1ffi–
cilement les jointures. L'intérie_ur
ét~ it
mal distribué , et tout porte a cro1re
qu'il n'existait pas une seul e fen@tre
dans tout le bf1timent. Les pieces ne
recevant de jour que par la porte,
~e
vaient étre fort obscures
1
a
JUOIDS
qu'elles ne fússent éclairées par Je
haut, ce dont
il
n'est guere possible
de s'assurer. Malgré ces imperfections
et ces anomalies, ces monuments sont
la preuve d'une babileté peu commune
de la part d'un peuple qui ignorait
l'usage du fer et des moyens que la
science de la mécanique met·
a
la dis–
position des architectes modernes.
De tous les voyageurs qui ont décrit
les monuments du Pérou
(*) ,
il 11'en
est pas un qui n'ai t fait les observa–
tions sui vantes :
1
º
Les pierres em–
ployées par les Péruviens, dans quel–
ques-uns de Jeurs édifices, étaient pro–
digieusement gi;andes. Acosta en a
mesuré une qui avait trente pieds de
long et dix-huit de large sur six d'é–
paisse11r;
il
ajoute qu'on en voyait de
bien plús consi dérables encore
a
la for–
teresse de Cuzco. Comment les
Jn.
diens pomraient-ils remuer ces lourdes
masses et les élever' meme
a
la faible
hauteur de douze pieds? 2° Les Péru–
viens devaient etre fort ignorants et
inbabiles <lans l'art de la charpente.
Les outils grossiers et tout
a
fait in–
suffisants dont il s se servaient, les em–
p@chaient de fai re aucun progres dans
cette b1·ancbe si importante de l'ar–
chitccture. Il est probable qu'ils ne
pouvaient meme pas
emmortaiser
deux poutres; de Ja f'impossibilité ele
donner
a
leurs charpentes la solidité
nécessail"e. lis ne connaissaient pas la
vo(\te, et ignoraient l'usage des cin–
tres; comment parvenaient-i ls done
a
couvri r leurs monuments? 3º Tous ces
monuments prouvent
inconte~table
ment que, malgré une certaine habi–
leté pratique, les Péruviens étaient
(') Ulloa, Voyage en Améric¡ue, a dérrit
le temple de Cayambo, le palais des Incas
de Callo , dans la plaine de Lacalunga, et
celui d'Atun Cannar. La Condamine
a pu–
blié dans les l\Jémoires de l'Ar.aclémie de
lk rlin, année
r74.(i,
un mérnoire intéres–
sanl
s111·
Alun Canuar. Acosta parle des mo–
numents ele Cuzco. Zapala
a
donné de cu–
rieuscs ind ications sur d'autrcs édifices pen
connus. E nfin quelques rnpgcurs modcrncs,
parmi lesqnels il faut citer en'.premiere li–
gne
M.
de Humbold1, out traité le meme
su.jet.