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390

L'UNIVERS.

compter sur son prochain et

a

ne faire

d'efforts individuels que pour se pro:

curer le strict nécessaire, d'éteindre

dans son creur toute étincelle d'am–

bition, et par conséquent de paralyser

en luí toute initiative, tout élan de

génie. C'est le propre du régime de

la communauté d'accoutumer le ci–

toyen

a

une certaine médiocrité résul–

tant de l'acquisition facile des moyens

d'existence, et de le priver de ces dé–

sirs de progres qui font accomplir les

grandes chqses et menent aux grandes

inventions. Un peuple

a

demi civilisé

peut s'accommoder du systeme de la

communauté, et

rester

volontiers

courbé sous le nivea u qu' il impose

a

l'intelligence de l'individu; mais une

ilation active et éclairée ne se rési·

gnera jamais

a

une organisation qui

a pour effet inévitable de tuer toute

spontanéité, toute ambition,

toute

grande pensée. Les pbilosophes qui

ont revé l'u topie de la vie en com–

mun, ont tous oublié ou dédaigné

cette considération qui, pourtant, est

toute puissante au point de vue so–

cial.

Du reste, et comme aggravation de

ces conséquences. le regime de Ja

communauté coincidaiJ;, au Pécou,

,avec une inégal ité de conditions tout

a

fait en contradiction avec la ten–

dance fraternell e de certaines lois . La

distinction des rangs était absolue.

·Un grand nombre de citoyens étaient

tenus, sous le nom de

Yanaconas,

daos l'état de servitude. Leurs habil–

lements et leurs maisons étaient d'une

forme differente de celle des demeures

et des vetements des hommes libres.

Comme les

Tamemes

du l\lexique, ils

étaient employés

a

porter des far–

deaux et

a

exécuter les travaux les

plus pénibles

(*).

Au-dessus d'eux

étaient le$ hommes libres qui n'exer–

~aient

aucune fonction publique et

n'étaient revetus d'aucune dignité hé–

réditaire. Ensuite venaient ceux que

les Espagnols out, par la suite, nommés

Orqjones

(H),

a

cause de la longueur

(') Herrera,

JJecad.

,{••) Herrera, ibid.

qu'ils donnaient artificiellement

a

leurs

oreillcs. Ces derniers composaient la

classe noble, et remplissaient tous les

emplois, en temps de pa¡x comme en

temps de guerre. Enfin, a la tete de la

nation, étaient les Incas, enfants du so–

leil, dominant autant les Orejones par

leur naissance et leurs priviléges, que

les Orejones eux-memes étaient

a11-

dessus des autres citoyens. On voit

qu'apres tout, l'é,galité n'existait, au

Pérou, qu'entre

les

individus de la

classe inférieure, et que la loi avait

établi une distance énorme entre les

différentes classes de la société. A

chaque pas que l'on fait dans l'étude

de cette curieuse législation, on ren–

contre des contrastes frappants, des

anomalies étranges et des contradic–

tions choquantes, en un mot, tous les

inconvéni ents d'un gouvernement de

droit divin, et tous les avantages d'une

organisation élaborée par des souve–

rains amis de leurs sujets.

La forme de société adoptée par

les Péru1

1

i1ms, impuissante a civiliser

complétement cette nation, avuit fa.

vorisé

ju qu'a un certain point le

progres des arts. Mais on va voir que

la limite du perfectionnement ne dé–

pa ssai~

pas ce niveau peu élevé sous

lequel se développe la vie matérielle

avec quelques-uns de ses avantages les

plus vulgaires. Les Mexicains, qui n'é–

t11ient pas soumis au meme régime so–

cial, avaient mar.cbé plus rapidement

daos la civilisation, et les produits de

Ieurs arts industriels prouverent ·aux

conquérants Pspagnols que leurs con–

naissances étaient plus variées et plus

étendues que celles des

Péruvien~.

-

Toutefois, il faut le dire, ces derniers

étaient plus avancés en tout ce qui

concerne les arts les plus nécessaires.

L'agriculture, par exemple, était

mieux entendue et plus perfectionnée

au Pérou que dans toute nutre partie

de I' Amériquc. Les approvisionne–

ments de toute es pece étaient si

abondants dans tout{lS

les provinces

de l'empire des Incas, que les Espa–

gnols' dans leur marche a travers

ce vaste territoire, trouverent partout

des vivres, et ne furent jamais expo·