306
L'UNIVERS.
fixes étaient la guerre
el
sa !mine
contre :Morazan; au fait,
il
ne con–
naissait péls autre chose.
II
a\·'1it des
manieres et
frn
langage enfantins,
tnais empreints de g;ravité; il ne sou–
riait jamais, et ne faisnit point parade
de sa puissance, bien qu'il parlt\t tou–
jours
il
la premiere personne, et qu 'il
se co rnplat
a
dire ce qu'il avait fait et
ce qu'il comptait faire. Un de ses
fa–
mili ers, pour lui faire sa cour, chercha
un papier portant sa signature, alln
de me montrer un spécimen de son
écriture; 111ais il ne put parvenir
a
le
trouver. En somme, mon en trevue
avec Carrera fut plus intéressante que
je ne l'a1·ais espéré; je ne pus me dé–
fen dre d' un e certaine émotion mfüée
d'un sentiment quelque peu charitable
en présence de cet homme si jeune,
d'origine si bumble, ayant µeu t-etre
de bons instincts, mais igno rant,
fa–
natique, sanguinnire, e clave de ses
passions, et néanmoins devenu la per–
sonniflcation de la force matérielle de
son pays. En le quittant, il m'accom–
pagna jusqu'a la p rte, et, en pré–
sence de ses ignobles sold ats, _m'offrit
cordialement ses services. A cette
époque, ain
r
que je.l'appris plus tard,
il
se plaisajt
a
répéter qu'il n'était
qu'un simple brigadier général soumis
aux ordres du gouvern ement. II ne
touchait aucun traitement fi xe pour
.son entretien ni pour celui de ses
troupes;
il
n'ai nini t pas
a
tenir des
cornptes, et demand ait de
!'argent
quand
il
en avait besoin. Avec ce sys–
teme, il n'exigefl pas pl us en huit mois
de temps que l\lorazan en deux mois.
E n réalité,
il
n'avait pas besoin d'ar–
gent pour lui-meme , et quant aux
In–
<l
iens, i
1
les pavait fort peu , par poi i–
tique , ce qui taisait le meilleur effet
parmi l'aristocratie, sur qui retombait
tout le fa rll eau des contribution s. On
apprencl ra peut·etre avec satisfaction
que ce chef r.edoutable su bit une do–
mi nation
a
laquelle les hommes clé–
bonnaires se plient volontiers; sa
fernme l'accompagnc a cheval dans
t outes ses expéditions, et exerce sur
Ju i un e gra nd e influence; j'ai ou·i di re
que le chef de i'État se préoccupe sé·
rieusement de ses querelles de mé·
nage. ,,
JI s'en tallait de beaucoup qu e la
contre-révol\Jtion, opérée au profit des
idées rétrogrades, eat rendu la tran·
quillité
a
la malheureuse pro1•in ce de
Guatemala. Les plaies que lui avait
faites la guerre civile étaient encore
saignantes, quand le ncuveau dicta teut
reparut sur les rhamps de bataille. Le
lecteur se rappelle le tra ité conr.l u en–
tre Carrera et Guzman,
génér~I
de
l'État de Los Altos, traité par lequel
le chef des Indiens s'était engagé
a
rendre un certain nombre de fusils.
Depuis cette époque, les habitants de
Guatemala s'étaient voués corps et
ame
a
la ca use de Carrera; comrne la
défiaa ce qui ava it longtems existé con–
tte tui s'était complétement di ss ipée,
ils demanderent qu'o n tui restituat les
armes qu 'i l avait livrées
iJ
Guzman.
Le gouvernement de Los Altos refusa.
Cette province était alors le foyer des
doctrines libérales, et Quezaltenango,
sa capitale; était l'nsile eles patriotes
ban ais de Guatemala. Craignant ou
feign ant de craindre une agression de
la part des libéraux, et mettant en
avant le commode prétexte de la res–
titution des fu sils , Carrera marcha
contreQuezaltenango ?vec douze cents
hommes. Les Indiens, croyant qu 'il
venait exterminer les blanc-, tui pre–
terent assistance. Les troupes de Guz–
man abanclonnerent leu r chef, qui fut
fait prisonnier de In propre main deCar·
rera, au moment ou, malade et embar·
rassé da ns les plis d'un manteau, il cher–
cbait
a
traverser
a
cheval un profond
-
ra vin. Le vainqueur s'empressa d'en–
voyer
a
Guatemala !'uniforme de Guz–
mancomme un témoignage materiel de
sa prouesse. Pu is, s'acheminant sur la
capitule, il destitua le chef de la pro–
vince, changea la garnison, et annexa
l'État. de Los Altos
a
la confédéra–
tion. Carrera fut
re~u
triomµh aleni ent
a
Guatemala;
il
y rentra au bruit du
canon et de la ni usiquc,. sous une voate
de feuillages, ornee de clrapeaux, au
m,íli eu d'acclamations enthou iastes–
L'infortuné Guzman, rancien go uver–
neur de province , l'ancien Jninistre,