296
L'
UNIVERS.
A
la troisieme session du congres,
les partís en vinrent
a
une rupture ou–
verte; les députés de San Salvador, la
province la plus libérate de la confédé–
ration, se retirerent avec éclut.
Flores, vice-président de l'État de
Guatemala, et membre du parti libé·
ral, s'était rendu odieux aux pretres
et aux moines en frappant d'une con–
tribution le couvent de Quezaltenango.
Durant un voyage qu'il
lit
dans cette
ville, les moines exciterent la popu–
lace contre tui, et le signalerent comme
ennemi de
la
religion. Une. foule
ardente se réunit devant sa maison,
criant : " J\Iort
a
l'hérétique !
»
Flores
s'enfuit vers l'église; mais au moment
ou
il
allait
en
franchir le senil, des
femmes exaspérées le saisirent, le frap–
-perent
viole~ment,
et le traínerent par
les cheveux. Echappé miraculeusement
des mains de ces furies, le malheureux
courut se cacher dans la chaire. Alors
on sonne la cloche d'alarme, et tous
les mauvais sujets de
la ville font
irruption
~ur
la place. Quelques sol–
dats essayrnt d'i nterdire l'entrée de
l'église, mais, as. aillis
a
coups de
pierres et de baton, iIs ont obligés
de battre en retraite.
La
multitude
se précipite dans Je temple divin, et
fait retentir la nef de ce cri féroce :
~
•l\Iort
a
J'hérétique
!
»
Elle court vers
Ja chaire ou s'était réfugié le paul'fe
martyr; les uns cherchent
a
Ja ren–
verser, d'autres
a
l'escalader; quel–
ques-uns frappent le malheureux Flo–
res de la pointe de leurs couteaux'
fix és au bout de Jongues perchrs. Un
jeune homme, plus hardi que ses
compagnons, mettant un pied sur les
moulures de la cbaire. et, s'exhaus–
sant par ce mayen jusqu'n la corni–
che, parvient
a
saisir la victime par les
che1·eu~.
Le
cur~,
effrayé de l'ora&e
popula1
re que lu1-mémeavait excite,
montre
solennelleme.ntl'image du
Sauveu
r, et conjure les assaillants d'é–
pargner l'hérétique, s'engageant
a
lui
faire quitter imméd iatement la viMe.
Flores tombe
a
genoux et ratifie cette
prome se; mais les moines raniment
l'a rde11r de la populace, qui, da ns un
acces de frénésie religieuse, se pros-
terne de1•ant la saintc image ponr lui
offrir en holocau te le sang de l'infor–
tuné que pour uit sa
ven~eanre.
Aus–
sitOt Flores est arraché de la chaire et
trainé da ns le couvent; lil, les furics
qui l'avaient déja si cruellement mal–
tra~té
se jettent sur lui et le font ex–
pirer sous leurs coups. Son corps
fut
lacéré, défiguré et livré aux in ultes de
la populace qui parcourait les rues en
demandant, la téte rles libéraux et en
criant:
a
Vive la reli$ion, meurent les
hérétiques du congres! " II n'en fallut
pas davantage pour rendre aux centra–
Jistes leur ancienne audace; le fanatisme
releva la tete, le parti rétrograde prit
le dessus, et les libéraux furent écrasés
dans tout l'État de Guatemala
.La provincede San·Salvador,
.conn.ue,
des !'origine ·des troubles, p
o11r sesprincipes dérnocratiques, résolut de
venger les patriotes de Guatemala. Le
6
mars
1827,
l'armée libérale parut
de.vant les portes de la capitale, et la
menaca d'une destruction complete.
l\lais fe
fan ati me
religieux était trop
puissant po11r pouvoir etre si facile–
ment terrassé. Les pretres coururent
par les rues
n exhortanl le peuple
a
prendre les armes; les moines r¡¡s–
semblerent des bandes formidables de
femmes qni, le couteau
a
Ja main, ju–
rerent que tout ennemi de leur reli–
gion périrait de lrur main. L'armée de
San-Salvador fut battue et mise en
fui te.
La province de Nicaragua n'était
pas plus tranquille que le reste de
!a confédération. Presque immédiate·
ment apres la déclaration d'indépen–
dance et la formation des deux grands
partis, cet État devint le théatre d'une ·
lutte effroyable. Le peuple ;:vait, dans
un moment d'erreur déplorable, élu
un gonverneur centraliste et un vicé–
gouverneur lihéral. Cettescission dans
I'administration amena un conflit san–
glant entre les citoyens. Les scenes
les plus horribles eurent lieu da ns tou–
tes les villes, et surtout dans le chef–
li eu. Le terrain fut di s1wté pied
a
pied , pouce par pouce, par les deux
factions. Enfin, la guei-re se concentra
dans
la capitale. On se battit avec