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L'UNIVERS.
une vaste contrée, parcourue en tous ·
sens par de nombreux détachernents
ennemis supérieurs en nombre. Il lui
fallut endurcr, en traversant la
tierra
caliente,
toutes Je¡¡ souffrances que
Je manque de vivres et d'eau peut
faire éprouver. Il atteignit enfin, re
8
juin
1817,
la
//alf.e del Ma'iz,
située
sur la riviere de Panuco, dans l'in–
tendance de San Luis Potosi , ou finit
Ja plaine et commencent les hauteurs
du platea1,1. La , il eut
a
combattre
quatre cents cavaliers royaux qu'il
défit, et ce prernier succes lui perrnit
de donner deux jours de repos
a
ses
gens, qui allaient rencont.rer,
a
Ja Ha–
cie.nda de Peotillos , une opposition
plus sérieuse. Le brigadier Arminan,
a
la tete de neuf cent quatre-vingts
hommes d'infanterie européenni!, et de
onze cents cavaliers créoles, occupait
Ja route que Mina devait suivre. Il
fallai t ou se renfermer dans la Ha-
. cienda, ou déloger l'ennemi de sa po–
sition. l\lina prit ce dernier parti. Il
<.lispose son monde, cent soixante–
douze hommes, sur une petite émi–
nence qui domine la plaine , et de la,
s'élan~ant
a
la tete de cette poignée
de braves sur les
lignes espagno–
Jes ,
il
renverse tout ce qui s'opposi a
son passage, et met dans la déroute la
plus complete une troupe d'élite, qui le
regaráait quelques heures auparavant
comme une proie facile. Ce tul'ent les
gens d'Arminah qui se trouverent fort
heureux_d'échapper par la fui
te
aux
coups des insurgés, qui ne pouvaient
pas les poursuivre. On prétend qu'ils
durent, en partie , le succes de cette
journée
a
la maniere dont ils char–
geaient leurs armes. Au lieu d'unc
seule baile de calibre, ils mettaient
a
Ja fois un tres-grand nombre de petits
projectiles qu'on nomme
postes,
et ti–
raient
a
bout portant. Si les pertes
des royalistes furent grandes , celles
de Mina l'étaicnt aussi , et, de plus,
irréparables. II comptait onze offi–
ciers et dix-neuf soldats tués, et vingt–
six blessés. Il dut, avec ce qui lui res–
tait, se hliter de poursuivre sa marche
sur le Baxio, ou il pouvait se recruter
un peu. La fortune le servit encore a
l'attaque fle la petite ville de Pinos ,
dont
il
s'empara por surprise, bien
qu'elle eüt une garnison de trois cents
hommes. Il n'y perdit pas un seul des
siens. Il accorda le pillage ,
a
l'excep–
tion des églises. Un de ses soltJats
s'étant permis de prendre des vases
sacrés, fut
a
l'instant fusillé. 'Enfln' le
22
juin, apres trois jours de marches
forcées dans un pays désolé par la
guerre , Mina se mit en communica–
tion avec un parti de révolutionnaires
du Baxio, commandé par don Christo–
-val Nava. Le voici au milieu d'hom–
mes aux formes athlétiques, bons ca–
valiers, montant d'excellents chevaux,
armés de lances et de ¡¡abres, dont ils
se serveñt
a
m¡¡rveille. Le co turne de
ces hommes est ricbe et pittoresque;
Jeur veste ronde, Jeurs culottes de ve–
Jours, sont ornfes de galons d'or et
d'argent. Des guetres de peau de
daim enveloppent leurs jambes;
a
Jeurs souliers, ouverts de coté, sont at–
tachés de longs éperons en cuivre,
incrustés d'argent et armés de molet–
tes de quatre pouces de diametre. Le
col de leurs chemises est ouvert; ils
portent des chnpeaux
a
larges bords,
entourés d'u'.n ·g¡¡lon
d'ar~ent,
et dé–
corés de l'irnage de la V1erge de la
Guadalupe, enformée dans un mlidail–
lon recouvert d'un. verre. Tel était
alors, et tel est encore aujourd'hui le
costume des Rancheros, qui, dans un
plus haut <legré de civilisation, res–
semblent assez aux Gauchos dos Pam–
pas_, dont le capitaiae Head nous a
'fait une si pittoresque description.
Comme eux, li Ranchero mexicain se
distingue par la force,
le courage., -
l'activité, le mépris du danger, et
toute l'adresse possible dans l'exer–
cice du cheval et le rnaniement des
armes.
Mina, conduit par ce Narva qu"il
venait de rencontrer, parvint dans le
petit fort de Sombrero sans
~tre
in–
quiété, taHt la crainte qu'inspiraient
les vainqueurs de · Peotillos
était
grande.
11
avait parcouru en trente–
deux jours, deux cent vingt licues , et
s'était trois fois engagé avec un en–
nemi infiniment supérieur en nombre.