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172

L'UNIVERS.

fit honueur en le recevant avec tout Je

respect

el(}

it

un ennemi tombé, en lui

prodiguant les soins et les égards que

l'on doit au malheur. l\'lorelos fut di–

rigé sans délai sur Mexico. Toute la

population vinta sa rencontre jusqu'a

San Augustin de las Cue1•as ; il eut a

subir l'avide curiosité d'une foule in–

solente , et les insultes que les popu–

Jaces de tous les pays prodiguent ame

ennemis vaincus. Mais de tels outra–

ges trouverent Morelos insensibJ·e. Ici,

comme dans la prison, son sang-froid

ne l'abandonna pas un seul instant;

l'idée de subir la dégradation des or–

dres sacrés était la seule r.bose qui l'af–

fectait. Cette humiliante cérémonie le

fut doublement pour lui, par la pu–

blicité et l'appareil qu'on luj don na. Son

proces fut cónduit par cet Oidor Batal–

Jer, le plus barbare de tous les membres

de l'audience, celui qui soutenait inso–

Jemment la supériorité des Espagnols

sur les créoles. L'instruction se termina

rapidement par une sentence de mort.

Le

22

décembre

1815,

Concha

fut

chargé d'extraire le condamné des pri–

sons de l' inquisition, et de le conduire

a l'hdpital de San ChristovaI; derriere

Jequel

l'exécution devait avoir lieu.

l\'Iorelos, en arrivant, el.ina avec cet of–

·ficier; il l'embrassa tendreme11t, en le

remerciant des égards qu'il lui avait

témoignés; puis il se confessa , et se

.rendit ensuite d'un•pas ferme sur la

place ou il devait etre fusillé. La courte

priere qu'.il prononca avant son sup–

plice, mérite d'etre í·apportée pour sa

noble simplicité: " Seigneur, dit le gé–

néral, si j 'ai bien fait, tu le sais, et tu

m'en récompenseras ; si j'ai mal fait,

je recommande mon ame

a

ta misé–

ricorde infinie.

»

Apres cet appel au

juge supreme, il se banda les yeux,

commanda le feu , et

re~ut

la mort

avec ce visage calme et impassible

qu'on avait admiré tant de fois sur les

champs de bataille.

·

Avec la vie-de Morelos se termina

la plus brillante période de la révolu–

tion. Lui seul possédait assez d'in–

flu ence pour dominer les prétentions

des chefs secondaires, pour réunir

Jeurs efforts dans un but commun,

pour les faire concourir

a

un

m~me

plan , pour concilier enfin leurs in–

térets divers et leurs ambitions ri–

vales. Par sa mort, le Iien qui ratta–

chait les fractions éparses du

~rand

parti de l'indépendance fut brise ; l'u–

nité d'action disparut, et tout retomba

dans une

~rande

confusion : chaque

province s isolant, se prétendit des

droits séparés, et bii>ntot, par l'absence

de toute combinaison, la cause des in–

surgés, bien que défendue sur certains

points par

d'incontestables

talents

militaires, tomba graduellernent dans

· un état désespéré.

Six semaines s'étaient écoulées entre

Ja prise de Morelos et sa condamna–

tion, et pendant ce temps Je

con~res,

escorté par Bravo, avait gagné Tebua–

can et recommencé ses travaux. Son

premier acte fut d'adresser au vice–

roi une note tout

a

la fois suppliante

et

mena~ante

en faveur du malheureux

général prisonnier. C'était l'reuvre de

fa

rcconn aissance, mais de Ja recon–

naissance impuissante. Qu'étaient les

membres du congres aux yeux du

vice-roi? une troupe de traitres et

de factieux mise en quelque sorte

hors Ja loi, et dont le proces était

fait d'avance. C'était, pour Calleja,

comme si des bandits l'eussent prié

d'épargner un des

leurs déja con–

damné. Cette note ne reste pas moins

comme un monument de patriotisme.

Le congres s'y plaintavec noblesse que

Je gouvernement espagnol ait cherché

a

donner aux nations civilisées une

idée désavantage.use de la révolution.

II clescend

ensu~ite

au role de suppliant; _

il conjure Calleja d'épargner les jours

du généralissime, qui épargna souvent

ceux de ses ennemis apres la victoire;

il

prie au nom de l'humanité, au nom

de la modération, la meilleure poli–

tique a suivre dans les révolutions;

puis il dit au vice-roi: " Si vous vous

montrez cruel, qu'aurez-vous

i:t

espé–

rer de nous pour les votres, quand les

chances de Ja guerre · les ·feront nos

prisonniers?

Songez que

soixante

mille Espagnols répondent de la tete

de l\forelos, cher

a

tous les Américains,

et dont le sort intéresse jusqu'a ceux