S
T
R
la
reine EHfabeth., qui ne ma-nqua pas de donner au ,
r oete <les margues de fa faveur. C'eft évidemment
cettt! princeífe qu'il a eu en vtle dans
fonfonge d'été.,
gtland il dit :
H
une belle veftaIe couronnée dans 1'oc-
;; cident
« ;
& -tout cet ·endroit eft un compliment
joliment amené,
&
adroitement appliqué
a
l~
reine.
L'admirabIe caraétere de Falfiaffe dans la .pIece ele
Henri
[v.
lui pltlt íi fort
~
qu'elle did. Shakefpeare
de le faire paroitre
amo~reux
dans ane autre .plece ;
&
ce fut-Ia ce qui
produ.¡íi~
les
com~res
d;.W'mdfor
.,
¡jiece qui prouve que la reme fut bIen obele. . .
Mais Shakefpeare resut des marques extraordmal–
res cl'affeétion au comte de Sourhampton, fameux
el'ans l'hiHoire de ce tems-Ia., par fOI1 amitié pour le
comte d
'Elfex.Ce{eigneur lui 6t
a
une {eule fois un
préfent de rnille livres
fie.rlin~,
pour l'aider dans
u ne acquifition qu\l f0uhaitolt de fe procurer. Il
l?a{fc1. les dernieres années de fa vie dans l'aifance &
dans le commerce de Ú!s ámis. Son efprit & fon bon
t araél:en! lui valurent la recherche & l'amitié de la
.nobleíre , & des gentilshommes dll voiíinage.
M.
Rowe dit qu'on raconte encore dans la comté,
'une hifioire aífez .)ilaifante
1i.lrce fuj et. Il étoit par–
ticulierement lié avec un vieux gentilhomme nom–
mé
Combe ,
tres - connu par fes richeífes & par ron
·caraétere ufurier. Un jour qu'ils étoient en compa–
gnie d'amis, M. Combe dit en r-Íant
el.
Shakefpeare ,
~u'il
s'imaginoit qu'il avoit deífein de faire fon épi–
taphe, en cas ql1'il vint
el.
mourir, & que comme il
ne fauroit point ce qu'on diroit,de lui quand il feroit
mort,
~lle
prioit de la faire tout de fuite: fur c!= dif–
cours, Shakefpeare 6t quatre vers, dont voici le
fens:
»
Cy git, dix
p~:)Ur cer~t
; il Y a cent contre
,>
dix , que fon ame fon fauvee: íi donc qudqu'un
~>
demande qui repofe dans cette tombe: Ho 1'ho
~
o,>
répond le diable, c'eft mon
Je~n
de Combe.
Ce M. Combe eft vraiífemblablement le meme,
'dont Dugdale dit dans fes
4ntiquités de Warwick-shi–
.re,
qu'il a un mG>oument dans le chreur de l'églife
ae
Stratford,
avec l'épitaphe fuivante: " Ici efi en–
»
terre le corps delJean Combe, écuyer, mort le
~~
lO Juillet
1614.
Il a légué diverfes charités an–
»
nuelles
a
la paroiífe de
Straiford,
&
cent liv.-fier–
" ling pour les preter
a
quinze pauvres marchands ,
'J
de trois en trois ans, en changeant les parties cha–
.,>
que troi'íÍeme année
~
a
~uinze
shellings par an ,
)) dont le gain rera difiribue aux pauvres du lieu ".
Cettei:!onation a tout l'air de venir d'un ufurier
ri–
che
'&
raffiné.
Shakefpeare mourut lui-meme deux :lns apres dans
la cinquante-troiíieme année de fon age,& laiífa tres–
p eu d'écrits; mais ceux qu'il publia pendant fa vie
<;lnt immortalifé fa gloire. Ses ollvrages dramatiques
pamrent pour la premiere foís tous enfemble,
el.
Lon–
dres en
I623 ,
in-fol.
& depuis MM. Rowe, Pope &
Théobald en onL publié de nOtlvelles éditions. l'i–
:gno~e
fi
celle qu.e
M.
Warburton avoi! projettée , a
. eu heu. 11 devolt y donner dans un dIfcours préli–
minaire, outre le caraéttlre de Shakefpeare & de fes
écrits, les regles qu'il a obfervées pour corriger fon
'auteur, avec un ample gloífaire, non détermes d'art
ni de vieux mots., mais des termes auxquels le pol
te a donné un fens particulier de fa propre autorité
~
qui [aute d'etre entendlls, répandent une
grand~
obfcluité dans fes pieces. Voyons maintenant ce
<¡u'on penfe du génie,de
S~ak~fpeare,
de fon efprit,
de fon ílyle , de fon lmagmatlOn, & de ce qui'peut
excufer fes défauts. Qu'on ne s'étonne pas íi nous
entrons dans ces détails, puifqu'il s'agit du premier
auteur dramatique d'entre
les
modernes.
A l'égard de fon génie , tout le monde convient
flu'H
l'avoit tres - beau, & qu'il devoit principale–
ment
el.
lui-meme c!,!
'D-l~i1
étoit. On 'peut comparer
.Spakefpeare , felon AdIífon,
a
la
plerr~
encha!fée
S
T
R
da.nsl'anneau de Pyrrhus, qui repréfentoi.t la fiO'úre
d'Apollon avec les neuf mu{es dans fes veines
I:J
que
la narme y avoit tracées elle-meme , fans aucl;n fe–
cours de l'art. Shakefpeare ·eíl de tous les auteurs le
plus origiHal, & qui ne
~oit
úen.a l'imitation des
anciens ; iI n'eut ni modeles , ni r-ivaux, les deux
fources de l'émttlation, les deux principallx aiguil....
Ion$" du gé nie. Il efi un exemple bien remarquable -
de ces {ortes ele grands génies, qui par la force de
leurs talens natllrels, ont pro4uit au milieu de l'irré.
gularité , des ou vrages qui faifoient les dél,ices de \
leurs conte¡nporains,
&
qui font l'admiration de la
pofiérlté.
Le génie de Shakefpeare fe trollvoit aliié avec la
6neífe d'efprit , & l'adreífe
a
p1énager les traits frap–
pans. M.
l ~
Blanc rapporte un endroit fin de la tra–
gedie de Céfar. Décius, parlant du diétateur, dit:
" Il fe plait
a
entendre 'dire, qu'on furprend les
H
lions avec des 61ets, & les hommes avec des fIat..
»
terles,
&c.
mais quand je lui dis, qu'il hait les flar–
>,
'teurs .,
il
m'approuve , & ne
s'app~r~oít
pas que
»
c'eft en cela que je le f!atte le plus
>h
Dans
f~
tra-
,gédie de Macheth , il repréfente avec beaucoup d'a–
dreífe l'impreffion naturelle de
~a
vertu ; on voit un
fcélérat eifray€ flir ce qu'il remarque la modération
dn prince qu'il va aífaffiner•
"Il
gOllvernoit, dit-i1
,>
en parlant de ce prince, avec tant de douceul'
&
»
d'humanité
H ;
d'oll il concIud que toutes les puif–
fances divines & humaines fe joindroient enfemble
pour venger la mort d'un roi íi débonnaire. Mais il
ne fe p'ent rlen de plus intéreffant que le monoloO'ue
de Hamlet , prince de Danemarck , dans le troiíi:'me
aél:e de la tragédie de ce nom : on [ait comme M.
de Voltaire a rendu ce morceau. C'efi Ham1et qui
parle. _
.
"
Demeur~, ~l
faut ehoifir,
&
¡:affer
a
l:injlant
De la 'Vle a La mOrl
,
ou de
t
elre au neant.
Dieux cruels
,
s'il en efl, éclaire{ mon eourage!
Faut-il vieitlir·eourbéfou s la mai{2 qui m'outrage
,–
Supporler oufinir mon malheur
&
monIon?
Quifuis-je? qui m'arrete?
&
qu'efl-ce que
lamort~
C'1f
lafin de nos maux
;
c'eji mon uniqlle ajyle;
Apr~s
de longs tranJPorts, e'
tjl
un fommeil tran"
quiLe;
.
On s endort,
&
tout meurt
;
máis un affreux rlveil
Doit/uccéder peut-étre azlx douceurs duIommr:il
!~
On nous menace
;
on die que celle courte vie ,
De tourmens éternels
~ji
au'/ji-tótJui'Vie.
O mOrl
!
mornene fatal! affreufe éternilé!
, Tour ereur
ti
tonfeuL nom
fe
glace épouvanté.
Eh., qui pourroitfans toifupporter ceUe 'Vie;
De nos prétres menteurs bénir l'h.ypocrifie;
D'une indigne maüre.ffe encenJer los erreurs;
Ramperfous un min;¡tre, adorerfes hauteurs ;
Et montrer les tangueurs deIon ame abattue
A des amis ingrats qui détournent la vue
?
-
La mortJeroie trop douce en ces extrémités,
¡'\fais lefcrupule parle
&
nous crie, arréte{ ;
Il défend
ti
nos mains cet heureux nomicide,
El d'un lzéros guerricr foil un chrétien timide.
Par rapport au fiy1e , il efi certain que fes expref–
íions font quelquefois fublimes. Dans les tableau"
de l'Albane , les amours de la (uite de Vénus ne font
pas repréfentés avec plus de grace, que Shakefpeare
n'en donne
el.
ceux quí font le cortege de Cléopatre,
dans la defcription de la pompe avec laquelle
ce~te
reine fe préfente
a
Antoine fur les bords du Cydnels.;
mais
a
des portraits
OU
l'on trouve toute la
no~.lefie
& l'élévation de Raphael, fuccedent quelqueí01s de
miférables tableaux dignes des peintres de tayerne ,
qui ont copié Téniers.
Son imagination étoit vive, forte, riche-& har–
die. Il
ani;~e
les fall(omeS qtl'il fait paroltre.• il .co
ffi :--