LO I
honneur ou de ía vie. En Angleterre les
jur~s
décident
dn fait, le juge prononce la peine que
1~
/oi
infiige;
&
poll<' cela il ne lui faut que des yeux.
Ceux qui ont daos Icurs mains les
loii
pour gouver–
ner les peuples, doivent roujours íe l:tiiTer gouverner eux–
m~mes
par les
/oii.
C'efi la
loi,
&
non pas
l'homme
qui doit rlgner . La
loi,
dit Plutarque, ell la reine de
tous les mortels
&
immortels. Le feul édit de 1499,
donné par Louis XII. fait chérir fa mémoire de
to~s
ceux qui rendent la juClice dans ce royaume.
&;
eje tous
ceux qui
l'~iment.
11
ordonne par cet édit mémorable
, qu'on fui ve toujours la
loi,
malgré les ordres contrai–
,
res
i
la
loi,
que l'importunité pourroit arracher du
,
monarque
, .
Le motif
&
l'effet des
lois
doit étre la profpérité des
citoyens. Elle réfulte de l'intégrité des mceurs, du maln–
tien de la police, de l'uniformité
d~ns
la dillribution de
la juClice, de la force
&
de l'opulence de l'état,
&
les
lois
fom les nerfs d'wne bonne
adminillr~tion.
Quelqu'un
ayant demandé
a
Anaxidame, roi de Lacédémone, qui
avo!t l'autorité daos
S
parte, il répondit que c'étoienr les
lois;
il pouvoit
~jouter
avcc les moours fur lefquelles elles
intlaenr,
&
dont elles tirent Jeur force. En effet, che1.
les Spatriates, les
lois
&
les mceurs intimemem unics
dans le cceur des citoyens n'y faifoient, pour ainfi dire,
qu'un meme corps . Mais ne
oous
flattons pas de
voir Sparte renaltre au fein du <Zommcrce
&
de l'amoQr
du gain.
, La grande différence que Lycurgue a mife entre
Lacédémone
&
les amres cités, dit Xénophon , con–
" fille en ce qu'il a fur·tour fait, que les citoyens obéif–
" fent aux
/qis.
lis courenr lorfque le magiClrat les ap–
" pelle: mais a Athenes, un homme riche feroit au de–
" fefpoir que l'on penfat qu'il dépendlt du magiClrat,.
JI
y
a plus; la premiere fon8ion des éphores de La–
cédémone, en emrant en charge, étoit une proclama–
tion publique, par laquelle ils enjoignoient aux droyens,
non pas d'obferver les
/oís,
mais de les aimer, afin que
l'obfor vation ne leur en ffir point dure.
R íen ne doir etre fi cher aux hommes que les
lois
de–
fliuées
a
les rendre bons, fages
&
heureux. Les
/oís
fe–
rom précieufes au peuple, tant qu'il les regardera com–
me
110
rempart contre le defpotifme,
&
comme la fau–
vcgarde d'une JUCle liberté.
-Parmi les
/oír,
il
y en a d'excelleutes. de vicieufes
&
d'inutiles. Toute bonne
loi
doit erre julle, facile
a
exé–
cuter, particulieremcnt propre au gouvernemeot,
&
au
pcuple qui la
re~oit.
Toute
loi
équivoque ell injuCle, paree qu'elle frappe
fans avenir. Toure
/oi
qui n'eCl pas elaire, tlette, pró–
cife, efl vicieufe.
Les
/Qis
c!oivent commencer dire8ement par les ter–
mes de juffion . Les préambules qu'on y met ordinaire–
Inent font conllamment fuperflus, quoiqu'ils ayem été
inventés pour la juClification du législateur,
&
pour la
famfat!ion du peuple. Si la
loi
eCl mauvaife, conrraire
au bien public, le législateur doir bien fe garder de la
donner; fi elle eCl néceffaire, effentielle, indifpenfable, il
n'a pas befoin d'en faire l'apologie .
Les
/pis
peuvent changer, mais
leur Clyle doit rou–
jours
~tre
le
m~me,
c'efl-a-dire fimple, pr6cis , reffen–
taor toujours l'anriquité de leur origine comme un rcxte
íllcré
&
inaltérable.
Que les
lou
refpircnt toujours la candeur: fa iros pour
prévenir ou pour punir la méchanceté des hommes, el–
les doivem avoir la plus grande innocence.
Des
/oís
qui choqueroient les príncipes de la nature,
de la morale ou de la religion, infpireroient de l'hor–
reur . Dans la profcription du prince d'Orange, par Phi–
li!'pe 1
J.
ce princ;:e promet a celui qui le tuera' ou
á
fes
héritiers, vingt mille écus
&
la nobleffe,
&
cela eu pa–
rolc de roi,
&
comme ferviteur de Dieu . La nobleffe
promife pour une telle a8ion! une telle a8ion ordonnée
comme !erviteur de D ieu
!
tour cela renverfe égalemenr
les idées de l'honneur, de la morale
&
de la ryligion.
Lorfqu'on fait tant que de reno re raifon d'une
foi,
il
faut que cette raifon foit
1°.
digne d'elle. U nc
loi
ro–
maine décide qu'un avcugle ne peut plaider, paree qu'il
ne voit pas les orncmens de
1:1
magiflrarure.
ll eCl pi–
royable de donner une fi mauvaife raifon, quand il s'en
préfente tant de bonnes.
2°.
JI
faut que la raifon allé–
guée foit vraie; Charles IX. t'ut déclaré majeur
a
r4
ans commencés, paree que, dit le chancelier de l'HO–
pital, les
/oís
regardent l'année oommencée, lorfqu'il
s'agit d'acquérir des honneurs; mais
le gouvernement
des peuples n'efl-il qu'un honneur ?
3°.
JI
faut, daos les
/oiJ,
raifonner de 1¡¡
réaliré
a
la réalité,
&
non de la
réalité
~
la figure, ou de la figure
s
la réalit6 . La
loi
'{ome
IX.
LO I
Jti
des Lombards,
l. ll. ti
t.
XXXV!!.
défend
a
une fem–
me qui a pris l'habit de religieufe de fe marier. , Car,
, dit cene
loi,
fi un époux qui a enga¡;:é
3
lui une fcm–
" me par un anneau, ne pent pas fans crime en épou–
,
fer une autre;
a
plus forte raifon, l'époufe de D 1eu
, ou de
la
fainte V ierge. ,
Entin des que dans une
loi
on a tixé l'état des cho–
fes, il ne faut point
y
ajoutcr des expreffiom vagues .
Dans une ordonnance crirninelle de Louis XIV. apres
l'énumération des cas royaux, on ajoute: ,
Et ceux
, dom de tous tems
les juges royaux ont décidé , ;
cette addition fair rentrer daos l'arbitraire que la
loi
ve–
noit d'éviter .
Les
lois
oe fonr pas regle de drolt. Les regles font
générales, les
lois
ne le font pas : les
re~les
dirigenr,
les
/oís
cornmandem : la regle fert de bouffole,
&
les
lois
de cornpas .
11
faut
impofer au peuple
a
l'exemple de Solon ,
moins les meillenres
lois
en elles-mémes, que les meil–
leures que ce peuple puiffe comporter daos fa riruation.
Autrement il vant mieux laiffcr fubfiller les défordres,
que de prétendre y pourvoir par des
lois
qui ne feront
poinr obfervées; car, fans rernédier au mal, c'eft en–
care avillr les
lois.
Il n'y a rien de fi beau qu'un état
mi
l'on a des
lois
convenables,
&
o
u
on les obferve par
ra~fon,
par paf–
fion, comme on le tit
a
Rome daos les premiers rems
de la république; car pour lors il fe joim a la fageffe
du gouvernemem toute la force que pourroit avoir une
f3érion.
11 eCl vrai que les
lois
de Rome devinrent impuiiran–
res a fa confervation; mais e'ell une chofe orc!inaire
que de bnnnes
lois,
qui ont fait qu'une petite républ i–
que s'aggrandit, lui deviennent
il
charge lorfqu'elle s'ell:
aggrandie, paree qu'ellos n'étoient faites que pour opé–
rer fon aggrandiffement.
11
y
a
bien de
la
différcnce entre les
lois
qui font
qu'un penple fe rend mairre des autres,
&
celles qul
maimiennent fa
puitr.~ncc
lorfqu'il l'a aequife.
Les
/oís
qoi font regarder comme n6ceffalre ce qui
efl indifférent, ne fom pas fen[écs,
&
ont encare cet
inconvénient qn'elles font confidérer comme indifférent
ce qui eCl néceffaire; ainfi les
/oís
ne doivent llaruer que
fur des chafes effontielles.
Si les
lois
indifférentes ne fonr pas bonnes, les inu–
tiles le !hnt encare moins, paree qn'elles affulbllffenr les
/oís
néceflaires; celles qu'on peut éluder, af!'oibliffenr
auffi la
lé~islation.
Une
loi
doit avoir fon effet,
&
il
ne faut pas permettre d'y dérogcr par une convcmion
particuliere.
Plurieurs
lois
paroi1Tent les
m~mes
qui font forr diffé–
rentes. Par exemple, les
lois
grecques
&
romaines pu.
niffoient le receleur du vol comme
le voleur;
la
loi
franyoifc en ufe ainfi. Ce!les-la étoient raifonnables,
celle-ci ne l'eCl point .
Ch~1.
les Grecs
&
les R omains,
le voleur étoit condamné
it
une peine pécuniaire, il fal–
loit bieu punir le receleur de la merne peine; car rout
homme qui contribue, de quelque fac¡;on que ce foit, a
un dommage, doit le réparer. Mais en France, la pei–
ne du vol étant capitale on n'a pu, fans outrer les cha–
fes, punir le receleur oomme le voleur. Celui qui re•
c;:oit le vol, peut en mille occafions le recevoir inno–
cemment: celui qui vole ell toujours coupable. Le re–
celeur empeche
a
la vériré
la conviaion d'un crimo
déja commis, mais 1' autre commet
le
crime ; rout
efl paffif dans le receleur, il
y
a une
~a
ion dans le vo–
leur. JI faut que le voleur furrnonte plus d'obllacles,
&
que Con
ame fe roidiffe plus
long-rems conrre les
l•is.
Comme elles ne pcuvent prévoir ni marquer rous les
cas
c'eCl a la raifon de comparer les faits obmis avec
les 'raits indiqués.
L~
i>ien public doit décider quan<l la
loi
fe rrouve muette ; la coilrume ne peut rien alors,
pare~
qu'il efl
d~ng~reux
qu'on ne
l'applique mal,
&
qu'on. ne veuille la diriger, au lieu de la Cuivre.
Mais la coururne affermie par une cha!ne
&
une fuc –
ceffion d'exemples, fupplée an defaut de la
loi,
tien t fa
place, a la meme autorité,
&
devienr une
lai
tacite ou
de prefcription .
.
Les cas qui dérogenr au droit commun, doivent
~tre
exprimés par
la
loi;
cette ex ceptiQn e(l un hommage
qui confirme fon
autorit~;
mais rten ne lui porte attein"
te
commo l'extenfion arbitraire
&
indéterm'née d'un
ca~
¡, J'autre.
JI
vaut mieux attendre une nouvelle
/oí
)lour un eas nouveau, que de franchir
les bornes de
l'exception déja f.oite.
C'ell fur·tQut dans les cas do rigueur qu'il faut
~~re
fobre a multiplier les cas cités par la
/oí .
Cette fubt1hté
V v v
d'efprit