to8
LAN
1• . Par rtpport
a
l'ordrc
•n~ly1iq•.•c,
il
y
a deux tño·
v<ns par l<fquels il peut Ctrc rendu !en_fible
~ans
l'énon·
éi:ttion vocale de la pcufée. Le prem1er, e ell de
rau~
¡¡cr tes mots dam l'élocmion felon le
m~me ord~e
qUI
réfulte de la fuccemon analytique des
id~es paruell~s :
te fecond
c'ell de dooncr aux mots déc:hnables
des~~~flcxions
o~
des termina\fons relatives
a
l'ordrc analyn–
que
&
d'cn régler cnfuitc:; l'arrangement. d•ns l'élocu–
tion' par
d'au~res
principes, capabies d'aJOU.ter quelque
perfetlion
a
t'art de la parole. D e-13 la
d~vifion
la plus
univcrfelle des
lan.,t<J
en dcux efpcces genérales, que
M. l'abbé Girarl (
Princ. di[<. l . tom.
;.
pag:
~3·)
appelle
ana!oguu
&
tranfpojitivu,
1!'
autqucllcs.
J!'
con·
(erverai les memes noms, paree qu 1ls me paro1fient en
caraaérifer tres-bien le génie diflinóHf.
Les
/a,g rus
analp~Hu
forn celles dQnt la fyntaxe cfl
(oumife
a
l'ordre analytiqne, paree que la fuccd!ion des
mots dao; le difc:ours y fuit la gradation analytique des
ídées · la marche de ces
langtt~s
efl cffcaivcrr.ent analo–
gue
&
en quelquc forte parallele
a
cclle de l'cfprit me–
me dont elle fuit pos
a
pas l<s opérations.
Les
lang~tts
tr.,fp•fitivu
follt cel)es. qui daos _l'élo_–
cotion donnent aux
tnats des
termma1fons
relauve~;
a
J'ordre analytique,
&
qui acquierent ainfi le _droit de leur
faire fuivre dans
le difcours une marche hbre
&
tout–
a.fait indépcndante de la fucccflion naturclle des idées.
Le
fran~ois ,
l'italien, l'ofpagnol,
&c.
font des
l&ngua
analogües ; le grec, le latín, l'allemand,
&c.
font des
lmtgun
tranfpofitives.
Au reflc cene prcmierc ditlinaion des
languu
ne
porte pas [ur des caraaeres cxclunfs; elle n'indique que
la maniere de
proc~der
la plus ordinairc : car les
lan–
~tus analo~ues
ne laiacnr pas d'admettre quelqucs inver–
..iions 1égercs
&
facilcs 3 ramencr
:1
l~ordre
natllrel, com–
·· me ks tt'nli•olir;ves reglent quelquefois leur marche fur
la fuccellion analytiqu<, ou s'en rapprochent plus ou
moins . Afl"ez communément le befoin de la ciarté, qui
cfl la qualité la plu< effemiel\e de toute éoonciation,
l'emporte fur le génie des
'""~""
analogucs
&
les dé–
tourne de la voie analytique di:s qu'e.lle ceffe
d'!t~e
la
plus tumineufe : le<
la"J!.""
tranfpofit¡ves au contraiTe y
ramenent leurs procédés ' quelquefois dans la méme
v\le.
&
d'autres fois pour fuivJc ou les impreflions du
~out
ou les lois de l'harmonie . Mais dans les unos
&
d:lll'\
'~tos
a.urres,
les mots portcut l'empreinte du génic
caraaén!li~ue:
les noms. les pronnms
&
les adjeéfifs
déclinables par nature, fe déclincnt en effet dans les
Jangua
tran[pontives, afin de pouvoir
[e
pdter
a
toutes
les invedions ufuelles fans faire d1fparoitre les trairs fon–
<lamenraux de la t"uccemon analytique . Dans les
languu
analogues, ces memes efpecrs de mots ne fe déclincm
poinr; paree qu'ils doivent toujours fe fuccéder dans
l'ordre analytique, nu s'<n écarter
!i
peu, qu'il e!l tou·
jours reconooi!fable.
La
langu•
al\emande efl tran[pofitÍ\•e,
&
elle a la dé–
clin1ift m; cependant ·Ja
m;~.rche
n't·n efl pas libre, com–
nle elle paroit l'avoir
été
en grec
&
en latin, oU cha·
cun en décidoit d'apri:s
(on
oreille on
Con
goO t parti–
c nlier:
ici
l'ufagc a
fil~
toutcs les confiruél:ions. Daos une
propofition limpie
&
abfolue, la c:onflruaion ufuelle fuit
e
e
l'ordre analytiquc;
dit rrtaturtn
a~«fftrn
ibrt
thatlit'hk~it
entf.Vt·d~r
áurch
btWrgrmg,
odt r durch
Xtdmrc/u11
()es
créatures démontrent leur aaivitc! foit par mouvemenr ,
fuit par peníée.)
11
y a feulement quelques occurrences
oU
l'on ab1ndoone 1\ndrc an:Jlydql'C pour donner
3.
la
phrare plus u'énergie
Oll
de clarté. C'efl pour la me–
me cauCe qne daos les propofitions incidentes, le verbe
eH
toujours
3 la fin ;
da1 we{nt
welehn
in un1
douket
( l'é<re qui dms nous pen[e); ""'"
d<nm dif:"' die
"'"'glich .fi11d
(entre les cho[es qui
p~mbtes
font).
11
en e!l de
m~me
de toutes les atttres mverfions unrées
en allcmand; elles y
[o nt
déterminécs par l'ufago ,
&
ce feroit un barbariíme que d'y fu b!lituer one autre for·
te d'invcrlion, ou méme la con!lruélion analytique .
Cette obf<rvation, qui d'abord a pu paroitre un hors–
d'a:uvre, donne lieu ;\ une eonféquence géoérale; c'ell
que, par rapport
i
la c:on!lmélion de< mot<, le<
¡,.,_
gua
tranCpofith•es peuvent fe"foudivifer en deux claffes .
Les
lug ua
tranfpofitivcs de la premicre claffe font
li,.·
itres,
paree que la con!lruaion de la phrafe dépend,
a
peu de chofe pres, du choix de celui qui
p~rlc,
de Con
oreille, de fon gollt párticulier, qui pettt varier pour la
méme c!noneiation, fel on la diverlité des circonflances
ou elle a lien;
&
telle e(\ la
lan~ue
latine . Les
l«nr:un
tranfpofitives de
¡,.
feconde clalfe for.t
uniforme~,
paree
que la eonllruaion de la phrafe y ell con!lamment re–
glée par l'ufage, qui n'a ríen abandonné
a
la décifion
LAN
1 du goüt ou de l'oreille;
&
tdle c!l 11
lanKue
sllemande.
Ce
que j'ai remarqué [ur
la
premiere divilion cft cn–
core applicable
a
la fecoude . Quoique les caraélcres di–
flinélifs qu'on y afligne foient fuffiCans pour déterminer
les dcux daffes, on oc lailfe p3s de trouver quelquefois
dans !'une quelques trais qui ricnnent du génic de l'au·
rre : les
la,gtus
tranfpofitives libres peuvent avoir cer·
raines c:on!lruélions 6xées invariablement,
&
les unifor–
mes peuvent dans quelques occafions régler
l~ur
mar–
che arbitrairement.
I1 fe préCente ici une que!lion affe-z. naturelle. L'or·
dre an:tlytique
&
l'ordre tranfpofitif des mots fuppofcnl
des vúes toutes di!férentes dans les
la»_{NeJ
qui les ont
adoptés pour régler leur fyntaxe: chacun de c-.
deux or·dres
caraaérif~
un génie tout différent. Mais
com.meil n'y a eu d'abord fur la terre qu'une fcule
'""$'",ell-il poffible d'amgner de quelle eCpec:e elle éto11,
fi
elle étoit lnalogue ou tranfpo!itive
?
L'ordre ano:yrique étant le prototype invariable des
deux efpeces générales de
/a,gueJ,
&
le fondement uní–
que de leur c:ommunicabilité refpeélive,
il
paroit alfe'l.
naturel que 13 premierc
la>tgu<
s'y foit attaché< Cc:rupu–
leufoment,
&
qu'ellc
y
ait affujetti la fuccemon des rnots,
pl~tót
que d'avoir imaginé des définences relatÍI·es :\ cet
ordrc, afio de: l'abandonner enCuite 13ns c:onféquence:
i1
efl c!videnr qu'il y. a moins d'art dans le langa¡¡e ana–
logue que daus
1~
tranfpofitif;
&
toutes
les infl1mtion5
hu.naines onr des eommenccmens limpies. Cette c:on–
clufion, qui me femble fondée folidemeut fur les pre·
miers príncipe< du langage. fe trouve c:ncore appuyée fur
ce
que nolls favons de 1' hifloire des différcns
idiomcs
donr on a fait
nfa~e
fur la terre.
La
langue
hébrai"que,
la
plus ancienñe de toutes cel–
les que nous connoiffons par des monumens venus juf–
qu'il nous,
&
qui par-lit femble tenir de plus pres
il
la
lang u•
primitive, e!l af!rcinte
a
une marche analogue;
&
c'e!l un argument qu'auroieut pu faire valoir c:eux qui
peufeot que c'e!l l'hébreu
m~mé
qui e!l la
la•gue
pri–
mitive . Ce n'e!l pas que je eroye q,u'oo puiífe érablir
fur c:els ríen de pofitif; mais fi cette remarque n'e!l pas
afrez forte pour terminer la qoellion, elle prouve du–
moins que la conllruaion analytiqlle, fuivie dans la
la,-
1!.'"
la plus ancienne don! nom ayons connoilfancc, peut
bien avoir été la conllmaion ufuelle de la premiere de
t<?utes les
langues ,
conformément
a
ce qui DOUS cfl in–
diqué p3r la raifon méme.
D'ou il fllit qlle les
lan!(HeJ
modernes de I'Entope
qui ont adopté la eon!lruélion analytique, tiennent
a
la
/Qngue
pnmirive de bien plus pri:s <¡ue n'y tenoienr le
grcc
&
le
latín , quoiqu'elles en f01ent beauc:oup plu'
éloignée.s par les
tcms. M. Bullet, dans fon grand
&
favant ouvrage fur la
langue
celtique, trouve bien des
rapports entre cette
langue
&
les orientales , nntamment
l'hébreu. D. le Pellctier uous
molltr~
de pareilles ana·
logies dans
Con
diélionnaire bas-llrcton, dont nous de–
vons l'édition
&
la préfacc aux foins de D. Taillandier;
&
tomes ces analogies fom purement matériel!es ,
&
con·
li!lent daos un grand nombre de racmes communes aux
deux
langues .
Mais d'autre part, M. de Grand val, con·
fdllcr au confeil d'Artois, de la foc. litt. d' Arras, dans
Con
difcour's hiflorif¡ue
f"'
/'origine de la
lan;¡uc
fra>t–
fOifo
(
voye1.
1,
/l.
vo. du mercure de Juin,
&
le v ol.
de Juillet
r¡f7.) me femble avoir prouvé tres·bien que
norre
fran~ois
n'ell ríen autre chofe que le gaulois de;
vieux Dru"ides, infenfiblement déguifé par
tnute~
les mé·
r~morphofes
qu'amenent nécelfairement la fuccemron des
hecles
&
le c:oncours des circ:on!lances qui ''arienr fans
celle. Mais ce g•ulois étoit . certainement, ou le celti·
q~e
tour pur, ou un diateae du celtique;
&
il
faut en
d~re a~taor
de l'idiome des anciens ECpagnols, de cclui
d' Alb1on , qui ell aujourd'hui la grande-l3retagne,
&
peut-~tre
de bien d'autrcs? Voil:i done notre
langue
mo–
derne, l'efpagnol
&
l'anglois , hés par le celtique avcc
l'hébreu;
&
cctte liaifon, c:on6rmée par la conOruaion
analogue qui caraaérife routes ces
langltts,
c!l,
a
mon
gré, un índice bien plus fllr de leur 61iation, que tou·
res les
étymolo~ies
imaginables qui les rapportent 3 des
lnng11tr
tranfpofirives : car
c'dl
(br·tnut d:ms la fynraxc:
que. <:onliOe le génie principal
&
indcllruaible de tous
les 1dtomes.
_ La
la.ngu<
italienne, qui e!l anaiO<'Ue,
&
qnc l'ún
parle 3UJOurd'hui dans un pays ou l'gn parlnit, il
y
a
<JUelque•
fie~lcs ,
une
langu•
tranfpofitive, (.w oir le
111·
~m,
peut fa1re naitre ici une objcélion cotllre la princi–
p~le preu~e
de
!"1 ·
de Graudval, qui juge que l:t
lan¡;u<
d une oatoon d01t tOUJOUrs fubli!ler, du moíns quant au
fonds,
&
qu'on ne doit point admettrc d'argomens né–
gatifs en pareil c:as, fur-loÜt quand la nati n e!l grande,
&
qu'elfe