Table of Contents Table of Contents
Previous Page  213 / 792 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 213 / 792 Next Page
Page Background

LAN

~noncer

des propofitions;

il

faut d,:>ne par1er pour avoir

des idécs généra)es; car fi-t6t que l'imagination s'ar–

réte, l'efi>rit ne A:L•rche plus qu'a l'aide du difcours .

&i

don~

les premiers inventeun n'ont

¡m

<lohner des

noms .qu'aux idées qu'ils avoienr déja, il s'enfuir que

, les prcn¡iers

fubqan~ifs

n'ont p11 jamais étrc que des

.,

.¡¡om~ propre~

.

,.

M~is

lorfque, par des m oyens que je ne con¡;ois

•'

~pas,

QOS

pouyeaux·gramrnairiens COm lnenccrent

3.

étCO• .

., dre lellrS idéeS,

&

a généralifer leurs

rnotS,

l'igoo–

" rance des invenreurs dur a!fujettir eette mérhode

a

des

., bornes fort étroires;

&

comme ils avoieor d'abord

., trop mulriplié les noms des individus , faute de con–

" notrre

le~

genres

/lí

l\'5 efpeces, ils fi rent enfuire t[OP

,., <i'efpeces

&

de genres, faute d'avoir

eoniid~ré

les '

•• érres par toures leurs ditfé rences . Pour pou!fer les di-

viiion~

a!fe7. loin. il eut fallu plus d'expérience

&

de

lumie•e qli'ils n'en póuvoient avoir,

&

plus de rer

•• cher¡¡he¡;

&

de travail qu'ils n'y en vouloieot emplo•

yer. Or, ii méme

aujou~d'hui

l'on découvre <!haque

JOUr de nou.velles .efpeces qui avoienr échappé juf.

qo'iei

i

toutes nos o bfervarions. qu'on penfe combien

.. il dltt s'en cférobor

a

des .hdmrnes qui ne ju!íeoiént.

des•

e

nofes que fur le prem1er afpeél

~

Q11ant aux cl'af–

fes · primltives

&

~ux

norions les plus g'énérales,

il

eft

fuper~u

d'ajourer qu'elles durent leur échapper eneo.

re ': comfllent,

p~r

· exempfe,

auroient~lls

imaginé pu

entendu les m ots de

mati.r•, d

'efpr.it

,

de

.fubflan«,

de

mod•,

de

figure,

de

mouvement,

puifque na. phi.

, lofophes qui s'en fervent depuis ii longrtems onc bien

de la· peine

a

les entehdr.e eux-mc!mes

&

que les idées

qu'on attache

a

ces mots étant purement m6taphy·ii,

q ues' ils

:::'en

tr-nuv.oient aucun modél<; dans

1:¡,

·na-

.,

ture?

,.,

e

A,pr6s s'étre étendu, comme on vient de> le··voir, fur

les premiers obflacles

qu~

s'oppofenc ·a l'inllirmion con.

Ventionnelle dei

languu,

M. RooiTeau Ce fait un rer(l)e

de comparaifon de l'invenuon des feuls fubllantifs

phy~

fiques, qui font la partie de la

langtu

h

plus facile

¡¡.

tróu ver pour juger du chemin q1.1i lui relle a faire

jof~

qu'au rcr111e ou

ell~

pourra exprimer toutes les penfées

des hommes, prendre une forme conflante, erre parlée

en public,

·&

inHuer

fu~

la fociété:

il

in vire le leéleur

a

réfl échir fur ce qu'U a fallu de tems

&

de connotffan–

cés

pour tr-ouver les nombres ' qul fuppnfent les médlta–

tian~

philofophiques les plus profondes

&

l'abflraélion la

plus métaphy1ique, la plus · pénible,

&

la moins na tu"

celle; les: autrcs mots abllraits, les aoriftcs

&

tous les·

tems ·des verbes, les parricules, la fynraxe; lier les pro–

p ofitions, les raifonnemens,

&

fo rmer rnute la Iogique du

difeour¡ apres quoi voici comme

il

conclur : , Quanr

a

moi, effrayé des difficultés qui fe mulriplient,

&

con–

vaincu de l'impotlibil íté prefqtte démonrrée que les

••

langueJ

aient pu na!tre

&

s' établir par des moyens pu-

rement humains;

je

lailfe

a

qui voudra l'entrepren–

, dre, la difcuffion de ce d itl) cile vrobleme,

ler¡uel

a

,,

lt/

1~

plur

nlceffaire, de

la

focile¿ déja

lile ,

J

!'in–

.,.,

.fli~ution

des

langues;

ou

d~J

langues

deja in-venll e.r,

.C.

y-,

l'l&ablifferAent de la foc ilté,.

11

étoit d ifficile d'expofer plus .nettement l'impoffibi–

Jité qu'il y a

a

déduire !'origine des

lmtguu,

de l' hy–

pothefe ré.voltante de l'homme fuppofé fauvage dans les

p remiers jours du monde;

&

pour en faire voir

1

'at5fur–

d ité, il m'a paru imporrant de ue rien perdre des aveux

d'un philofophe qoi l'a adopté pour y fonder l'inégaliré

des conditions,

&

qui malg ré la pént'tuation

&

la rubti–

lité qu'on lui conool t, u'a pu tirer de ce príncipe ehrmé–

r:ique tout l'av:antage qu'"il s'en étoit promis, ni peut–

~tre

mi:me celui qu'il croit en avoir tiré .

Q u'il me foit permis de m'arréter un inrlanr íur ces

derniers m ots . Le philofophe de Gene

ve

a bien fenti que

l'inégalité des condirions é'toit une fu ite néceíhire de l'é–

tabliiTemenr de la fociété; que l'éEablilfemeot de la fo–

eiété

&

l'infliunion du langage fe íuppoCoient refpeéli–

vement, p•1ifqu'il regarde comme un probleme difficile,

de d ifcuter Jeque! des deux a' été pour l'antre d'une né–

ceffité antécédente plus confidérable. Que ne faifoit-il

~ocore

quelques pas

Ayant vu d'une maniere d6mon–

llrative que les

langu• r

ne peuvent tenir

a

l'hypothefe

de l'homme né fa uvage , ni s'ctre érablies par des mo–

yens purement hnmains; que ne concluoit-il la

mC1ne

chofe de la fociété? que n'abbo ndonnoir-il emierement

fon hypotheie, comme autli incapable d'expliquer !'un

que l'autre? d'ailleurs la Cuppofition d'un fait que no us

favons

pao.le

témoignage le plus fur, n'avoit point été,

loin d'erre admiffible comme príncipe explicatif de fa1ts

rt'els , ne doit

4tre

regardée que comm: une fiélien chi·

mérique

&

propre

i\

égarer .

Tome / X .

LAN

Mais fuivons 1e íirnple raífoHnement . Une

la"K'"

eft •

fans contredit, la tntalité des u

fa~

es propres

il

une na–

tion pour ex primer les pcnfées par la voix ;

&

ceNe ex –

preffion o:ft le vé hicule de la communicat1on des pen·

fées. Ainii toute

lan,gue

fuppofe une focíété

préex•fl~n­

te, qu¡, eomme fodé ré, aura eu befoin de

cett~

com–

munication,

{X

qui, par des aéles déja ré,irérés , aqra

fondé les ufages qui coBftituent le eorps dé fa

{an~u•.

D'autre part une focic'ré formée par les moyens humains

que nous pouvons eonnoicre, préf<tppoíe un m oyen de

communication pour fi-xer d'abord les devoirs refpeélifs

des afio<!iés,

4

eníuire pour les mettre en érat de les

exiger les mis des autres. Que fuit-il de-l i? que fi l'on

s'oblline

i

vouloir fonder la premiere

la.nguc

&

la pre–

miere faciété par des voies humaines,

il

faut admettre

l'l!tcruité du monde

&

de< génénuions humaines ,

&

re–

na ncer par conféquent

a

une premiere fociété

&

a

une

premiere

langue

propremem dices: fenrimenr abfurde en

foi, puifqu'il implique conrradiélion,

&

dé menti

d'ail ~

leurs par la droite raifon,

&

par la fou l<: accablante

des témoignages de toure efpece qui certifient la nou–

veauté du monde ;

N u/la igitur in principio falla

•fl

é}u(modi

&ongrega~io,

nec unquam

fHiJ/"e_

bom~ner

in

t~rra

t¡tu

propter

tñfanttam non loquerentur,

t11tell1g ee,

cut ra–

tio non de

.¡l.

Laélance .

De

vero c"ltu. cap.

x .

C'elt

que fi les hommes commeneent par exifter fans parler ,

jamais ils nelparleront . Qulnd on faít q.uelques

languo,

on pourroit alfément en iovenrer une aurre : mais fi l'o n

n'cn

lait

aueune, on n'en

1

[aura

jamais,

a

muins qu'on

n'emendre parler q uelqu'un. L'orgaue de la parole elt

un inflrurncnr qui demeure oilif

&

inutile, s'il n'ell mis

en jeu par les impreffiom de l'ouie; perfonne n'ig no re

que c'efl la furdité originelle qui tient dans l'inaélion la

bouche des múets de naiUance;

&

l'o n fait par plus d 'u ne

expérieoce bien conflatc!<>, que des hommes élevés par

accident loin du comrnerce de leurs femblables

&

dans

h:'

filence

·des

furets ,. n'y avoient appris

a

prononcer au–

eun Con articulé, q9'ils imitoient feulement les cris

na~

·rurels des anlrnaux ávee lefquels

ils

s'étoienr trouvés en

liaifon, & ·que tranfplantés dans notre fociércl. , ils av"iem

eu bien dé la péine a·imiter le laugage qu'ils emendoient,

&

ne l'avoienr jamais fait que rres- imparfaitemenr .

Voy•:~;

I•J notu (ur le di.fcourJ de

M .

J. J.

R ou !feau

fu r l'ori..–

gi>u

&

fu

ftJndém•itJ

¿,

/'inlgalitl parmi lo homm•J.

Hérodote raconte qu'un rol d'Egypte fit élever deux

en fans enfemble, ma1s dans le filen ce; qu'une chevre

fut leur no.urdce; qu'au bout de deul.: ans ils tendirent

la main

it

celui qui éroit chargé de cette 'éducation ex•

périmenrale,

&

lui dirent

bucoJ,

&

que le roi ayant fu

que

b,/¡

en

/ang1u

phrygienue fignit:ie

pain,

il

en con–

elot que le langage phryg ien éroit uarurel,

&

que les

l?hrygiens é toienr les plus anciens peupks du moude,

lib.

11.

cap.

ij .

L es E gyptiens oe renoncerent pas

a

leurs

prétenrions d'ancienneré, malgré cette déciiion de leu r

flriuce,

&

ils firent bien:

il

ell évident que ces cnfans

parloient comme la chev re leur n ourrice , que les Grecs.

nomment

ll'••

pa r ono maropée ou im itatio n d o c ri de

cet animal,

&

ce cri

ne

re!femble que par hafard au

b•k,

(

pain) des Phrygiens.

Si la conféquence que le roí d'Egypte tira de cette

obfervation, en <!roit mal déduite, elle é roit encore vi–

cieufe par la fuppoUtion d'un príncipe erronné qui con–

filloit

3

croire qu'il y eüt une

langue

nalOrelle

a

l'hom–

me . C'ell la penfée de ceux qui etfrayés des difficult<is

'>du fyflémc que l'on vient d'eX3mmer fur !'origine des

languo,

onr cru ne devoir pas pro noncer que la pre–

miere vlnt m iraculeufemenc de l'infpirarion de D ieu

m~me.

Mais s'il

y

avoit une

langtu

qui ttnt

i

la nature de

l'homme, ne feroit-elle pas commune

a

tou t le gcnre

hum•in, fans difl in&ioo de tems, de climaes, de g ou–

vernemens,

de

religioo~ ,

de mreurs, de lumieres acqu i–

fes, de

préju~é's ,

ni d'aucones des aueres caufes qui

o~caftonnent los différcnces des

Jangua

1 Les muets de natf–

fanc.e, que nous favons, ne l'c!rre que faute d'entendre,

ne s'aviferoienr-lls pas d u-moins de parler la

langu<

na–

turelle, vu íur-rour qu'ellc ne feroit é10uffée che'l. eux

pa.- aucun ufage ni aucun préjugé conrraire?

Ce qui cll vraimenr ¡taturel

a

l'h.Qinme, cfl immua–

ble comme fou elfence: aujomd'hui co mn'le d'es l'anro–

re du monde une pente Cecrete ma1s iovincible mee daos

Con ame un de!ir conf!ant du bonheur, fuggere aux deux

fexes cettc concupifcence mutuelle. qui perpétue l'efpece,

fait paffer· de géru!rations en générarioos cerre averfion

pour une endere folitude, qui

no:

•'éteint j,an.10is

dan~

le

creur me me de ceux que ta fagelfe ou la rel ig ion a jet–

tés daos la reuaile·, Mais

rappro~oos-nous

de> cotrc ob–

j<;t ; le Iangage naturel de chaque efpece de brutc , ne

e

e

~

voyo us·