GRE
Daos la faite fallut-il encouragor les peuples
a
qoel–
que em¡eprife, les confoler d'un mao vais fueces, chan–
ger un ufage, introduire une loi ? ou l'on s'amorifa des
fables anciennes en les défigurant, ou l'oo en imagina
de Rouvelles.
D'ailleurs l'embleme
&
l'allégorie ont cela de com–
m ode, que la fa&acité de l'efprit, ou le lihertinage de
J'imagination peut les appliquer
a
mille chofes diverfes:
mais 3-travers ces applications, q¡;e devient le feos vé·
ritable?
11
s'altere de plus en plus ; bien-ten une fa–
ble
a
une infinité de feos différens ;
&
celui qui paroit
a
la
ñn
le plus iogénieux efl le feul qui refle.
11
ne faut done pas efpérer qu'un bon efprit puiffe fe
contenter de ce que nous avons
a
dire de la philofo·
phie fabuleufe des
Grecs
.
Le uom de Promethée fils de Japhet efl
le
premier
c¡ui s'offre dans cette hitloire . Promethée fépare de la
matierc fes élémens,
&
en compofe l'homme, en qui
les forces, l'aaion ,
&
les mreurs font variées fdon la
combinaifon diverfe des él.émens; mais J upiter que Pro·
methée avoit oublié daos fes
facrifices, le prive da feu
qui de1•oit animer
1'
ouvrage . Promethée conduit par
Minerve, monte aux cieux, approche
k
fe rula
a
une
des roues du char du foleil, en
re~oit
le feu daos fa
tige creuíe,
&
le •apporte fur la terre. Pour punir fa
témérité , ]upiter forme la femme connue dans la fable
fous le nom de
P
andore,
lui donne un vafe qui ren·
fermoit toas
les maux qui pouvoient défoler la
race
des hommes,
&
la dép.eche
a
Promethée. Prornethée
renvoye Pandore
&
fa boite fatal
e;
&
le dieu trompé
daos fon atrente, ordonne
a
Mercure de fe
faifir de
Promethée, de le canduire for le Caucafe,
&
de l'en–
cha1ner daos
le fond d'une caverne ou un vautour af–
famé déchirera fon foie totljours renailfant; ce qui fut
exécoté: Hercule dans
la fuite délivra Promethée .
Cambien cette fable n'a+elle pas de variantes,
&
en
cambien de manieres ne
l'a·t-on pas expliqu€e?
Selon quelques-uns,
il
n'y eut jamais de Promerhée;
ce perfonoage fymbolique repréfente le génie audacieux
de la race humaine.
D'autres ne difconvieonent pas qu'il n'
y
air eu un
Promethée ; rnais daos la fureor de rapporter toote 'la
M
ythologie des Payens aux tradhions des Hébreox, il
faut voir comme ils íe tourmentent, pour faire de Pro·
m ethée, Adam, Moife, ou N oé .
Il
y
en a qui prétendent que
ce
Promethée fot un
r oi des Scythes, que fes
fujets jenerent daos les fers
pour n'avoir poin t obvié aux inoodations d'uo fleove
c¡ui dévafloit leurs carnpagnes. lis ajoütent qu'Hercule
détourna le fleu ve daos la mer,
&
délivra Promethée .
En voici qut interpreten! cetle fablc bien autremcnt:
l'Egyp te
1
difeot-il s , eot un roi fameux qu'etle mit au
rang des dieu .l pour
les grandes découvertes d'un de
feo
fujets . C'était daos les
tems de
la fable comme
a
u¡ tems de J'hiOoire; les fujets mé• itoieot des 11atues,
&
c'étoit au fouverain qu'on los élc;voit. Ce roi
fut
Ofiris,
&
celui qui
fit
les découvertes fot Humes :
Üliris eoc deux mioiflres, Mercare
&
Promethée ;
il
avoit confié
a
tous les dcox les décoovertes d'Hcrrnes.
Mais Promethée fe fa uva,
&
porta daos la Grece les
fecrets de l'état: Oliris en fut indigné; il chargea Mer–
cure du foin de fa vengeaoce. Mercure teodit des em–
buches
:1
Promethée, le furprit,
&
le jetta daos le fond
d'un cachot, d'ou il ne fortir que par la faveur de qocl–
<¡ue homme puilfant.
Pour rnoi, je fuis de !'avis de ceux qni ne voyent
dans cet ancien législateur de la Grece, qu'un bienfai·
teur de fes habitans fauvages qu'il tira de la barbarie
dans laquelle ils étoieot plongés,
&
qui leur fit
luire
les premiers rayons de
la
lomiere des Scieoces
&
des
Arts,
&
ce vaurour qui
le dévore fans
relftche, n'efl
<¡u'un embleme de la méditation profonde
&
de la fo-
mes s'adonnent ttnx a8:ioos
venueu(t!,
8c
s'éloignent des vicieu–
fes, (ur l'dpC.rance ou
de
recompen{e, ou
de
chatirnent
apr~s
cet–
te vie, une
foci~ré n~
pcut
p:u
long.tems
fubfiCler.
C'cft pour cela
que Strabon Jans le
1,
UTJrt Je fa Glo:raphit
(
Plf.!
:Cl.l~'j.
ldit. gm¡.
IAt.
tlu
1549·) dir que les hommes s'éloignent alors du vtce qu:md
ils
emendent
(e
r:tconrer avec des craime.s. des roenaces, ou avec de.s
tnnnieres invi!iblt!s les ch:uirnens
que
doonent les
Dieux;
&
aprils ce–
b
~joure~t-il
qu'il en
impoffible
de gouveroer
une
mulrirud~
f.1ns Ja
crnmte de femblnbles chatimens pour Jet mech:tns. Certe liberté done
~:~ue
plufieurs Grec• s':mribuoieot daos les affi:tires de Religion étoit un
effct de leurs tno:uu dl:bauchés, conrre lefquels veillcnt
le~
loix; puif.
que Soleo. Lycurgue
&
Mino~
auffi bien qae les autres Legislateurs
Grecs.
ont
roí\jours eofeigné
la
craiote des Diellx, paree qu'ils la
con.
fidéro1ent commc le principal folltien de chaque Republique
~
&
gou..
GRE
lirude. C'efl ainíi qu'on a cherché
a
tirer la vérité de,
fab les; mais la multimde des erplications montre fou·
lemeot cambien elles font iocertaiues .
Il
y
a une bro–
deric poétique tellement unie avec
le food, qu'il efl
impoffible de l'en fépnrer fans déchirer l'étolfe.
Cependaot en coníidérant altentivemeot mor ce
fy~
11eme, oo refle convaincu qu'il fert
eu
général d'cove–
loppc
t~ntllt
a
des faits hJfloriques,
tantllt
~
des
dé–
COU'Vertes fcicntifiques,
&
que Cicéron avoit
rniíon de
dire que Promethée ne fcroit poinr attaché ao Cauca–
fe,
&
que Cephée n'auroit point été tranfpnrté dani
les cieu• avec fa femme, íon 61s,
&
fon ger.dtc, s'ils
n'avoieot mérité par quelques aaions éclatantes que la
fablc
s'empar~t
de leurs noms.
Lious íuccéda
a
P•omethée; il fut théologien, philo–
fophe, pocte,
&
muficien.
11
inventa l'arr
de
filer les
inteflios des aoimaux ,
&
il
en fit des cordes fouores
qu'il fobflitua íur la lyre aux 61s de lio dont elle éroit
montée. On dit qu'Apo\lon jaloux de cette decouver•
te, le tua;
il
paOe pour l'inventeur du vers lyrique ;
il
c~aota
le cours de la !une
&
du foleil, la for mation
du monde,
&
l'hifloire des dieux;
il
écrivit des plan·
tes
&
des aoimaox;
il
eut pour difciples Horcule ,
Thamyris,
&
Orphée. Le premier fot un efprit lourd,
qui n'aimoit pas le chatiment
&
qui
le méritoit
fou•
verlt. Quelques auteurs acoufent ce difoiple bru1al d'a–
voir tué fon rnaitre.
Orphée difciple de Linus fot auffi célebre chc7.
les
Grecs
que Zoroaflre che?.
les Chaldéeos
&
les Per–
fes, Bnddas chez les lndieos ,
&
Thoot ou Hermcs
chez les Egyptiens; ce qui n'a pas emp¿ché Arit1ote'
&
Cicéron de prétendre qu'il
n'y
a Jamais eu d'Ür–
phée : voici le paffage d' Arifiote ; nous le rapponons
· pour fa fingularité. Les
Epicuri~ns
prouvoient l'cxillcn–
ces des dicux pnr les idées qu'ils s'en faifoicnt,
&
Ari·
flote
Icor
répondoit :
&
je me
fais
bim tme
idh
d'Orpble , perfonnage
rui
n'a jamais
<.té;
mais
toute
l'ant¡quité réclame contre Ariftote
&
Ckéron.
La fable lui donoe
A
pollon pour peoc,
&
Calliope
.pour mere,
&
l'hifloire le fait cootemporain de ) ofué:
il
paffe de la Thrace fa patrie daos 1' Egypre , ou
il
s'inflruit de la Philoíophie\ de la Théologie, de
l'A–
fhologie, de la Medecine, de la Mu6que,
&
de la
Poéfie.
JI
vient de l'Egypre en Grece , ou il efl ho–
noré des peuples;
&
comment ne l'aoroit-il pas éré ,
pretre
&
medecio, c'efl-a·dire bomrne
fe
donnaot pour
(avnir écarter les maladies par l'eotremife des dieux,
&
y
apporter remede , quand on en
e
O affiigé?
Orphée eur le fort de rous les pedonnages célebres
daos les
rems ou l'on n' écrivoit point l'hifloire . Les
noms abandonnés
a
la tradition étoient bicn-tllt oubliés
ou confondus;
&
l'on attribuoit
3
un feul homme rout
ce qui s'étoit fait de mémorable peodant un grand nom–
bre de fiecles. Nous ne connoiO'ons qoe
les H ébreu x
che'l qui la tradition fe
íoit confervée pare
<lt
fans al–
tération ;
&
n'aoroient ils que ce privilége,
il
fuffiroit
poor les faire regarder comme une race tres·particolie–
re,
&
vrairncot chtrie de D ieo .
La Mythologie des
Grus
n'étoit qu'on amas coofus
de foperllitions, ifolées; Orphée en forma un corps de
doarine; il inOitua la divioation
&
les
myO~res;
il
en
fir des cérémonies fecrettes, moyen sOr pour donner
un air folemoel
a
des
poérilit~s;
telles fureot le>
fetes
de 13ncchos
IX
d'Hecntc, les éleufinies, les panathenées
&
los thefmophories.
11
cojoignit le filen ce le plus
ri–
gnu reox a
u~
initiés ;
il
donna des regles pour le choir
des profélyte : elles fe réduifoient
¡,
o'adrnettre
a
la par–
ticipatioo des myfleres, que des .ames fenfibles
&
des
irmg'nations ardentes
&
fottes , capables de voir
en
grnnd
&
d'allomer les efprits des autrcs:
il prefcrivit
d<S épreuvcs; elles con6floienr dans des purifications,
la confeffion des fauces qu'on avoit commiíes, la mor-
tifi-
vcrnemcnt. Les loix humn.ines ne valent
a
rien .:mtre rcomme
remar...
qncnt le CumberlnaJ contre I'Hobbi:',
&.
le
W:ubllrthon
dan,
fon
onvr:~se
fue
la
Mlffion de
Moyfe
J
q11'~
éloigner les hommcs moins
puiffans des crim
es publica; mais le!!
puifl~n'
qui fe moquene de
1
loix.
&
les moins
puiRil.nsmém\: d;¡ns le' enmes co1.chés, n"ont tJ'au.
ue ob(bcle q11e
lt~. crainte du cbatiment referv¿ po:ar
le
Cid
aux
mec:hans daos
l'auuc
vie.
C'eft pour cela que
les Pithngoriciens,
&
Pl:ttouicit!n.s expliyuc.rcnt
ec~
cbatimcn.s rc(ervé.s
ilJlrCs la more nvec
JeJ fyfti!mes
JI!
la
Méte1Dpfyrofe. Jc b.
réllOIOn
a
l"nmc de
l'unt..
vers, de la grande
ann~e t•lntoni~iconl!
&c.
pendam que la
m
a).
titude étoit rérenue d:1os
(es
devo~rs
par la crainre
d~
ce.s cbati..
mens.
8c.
par l"e(perance de ces récompenfes rl\contées
p:u
les Pot:...
tes. Jdquc:ls étoicnt
reveréJ
a.
C.1tt(c
d'unc pretendue infpiration des
Deicés .
.Eft
Dtf41
in
Mbis
•
dJ:IIante
ctl!t[cinnu
filo.