GOU
ce difcours, mais
il
emendra l'air
&
le
ton ;
il
verra
qu'on ne lui donne point ce qu'il a demandé ; foit é·
tonncment, rol[ laffimde. il fufpendra fe, \armes; qu'on
profite de cet intervalle pour le fatisfaire.
Le fecond jour, on rnettra fa patience
~
une plus
lon gue épreuve,
&
l'on
continu~rn
par degrés les JOltrS
fuivans, en obfcrvaot toOjours de ne
le carcfler que
lorlqu'il fera tranquillc,
&
de celfer les carelfes qu'on
lui fait, ou
m ~rne
de prendre un air plus férieu1
d~s
qu'il fera opini3tre ou
imparient : ccrte conduire n'a
rien de dur ni de cruel ; l'enfaor s'appercevra biemOt
qu'il n'ell carelfé
&
qu'il n'obuent ce qu'il veut que
quand
il
ell doux ,
&
il prendra fon parti de
le de·
venir.
Des que vous
1
'a
ure-,; rendu tel , comptez que vous
aurez rout gagné; fon ame fera entre vos mains corn–
mc une cire molle que vous pnitrire•¿ comme il vous
plaira; vous n'aurez plos ;\ travailler que fur vous-me–
me, pour von1 foutenir daos une attention continuellc ,
pour deméler en lui ces femcnces de défauts ou de
vices fouvent fo ibles
&
obfcnres ,
&
que néanmoins il
faur réprimer des qu'elles paroiffen t'
n
l'on veut y par–
venir avec cerritude
&
fans tourmenter l'enfant; pour
me
u
re votre efprit
a
la portée du O
en'
fur-tout pour
avoir une conduite foOtenuc: car ne croyez pas qu'on
éleve un enfant avec de beaus difcours
&
de belles
phrafes: vos difcours pourronr éc lairer fon efprit; mais
c'ell votre conduire qui formcra foo caraaere.
N
e
rerTcmblc~
point
:l
la plOpart des
gollvtrnantci,
qu i fc¡nt tracal!lcre1, grondeufes,
acari~ tres,
ou au con–
traire roOJours en admiration devanr leurs
éleves
&
Jeurs
complaií.1t1tes érernclles : quelques-unes
rn~me
réunilfent les deux
<X
tremes, fucceffivement idolSrres
&
pleines d'humeor. C'eíl Icor mal-adrelle,
&
ce fonr
leurs défauts oui donnenr aux enfans uoe panie de ceux
qu'il s ont. Avec bcaocoup de fermeté dans
la con–
duite, ayez bcaucoup d'égnlité daos l'humeur, de gaie–
lé
dan~
vo1
lt~ons,
de douceur daos vos difcours; pre·
eh"¡
d'exrmpl~ ,
ri"n n'ell plus puirTant fur
les enfans
comme fur
lc1 llum mes fair s; de quelquc tempéramenr
que foir V<>tre
~leve ,
vous ver
re~
qu'iofenliblement
la
douccur
&
la féténité de votre ame palfcronr daos
la
fiennc .
Si vous voulez l'inllruire nvec fruit, ne vous coo–
lcnte'l pa• de lui étaler votre éloquence devanr les au·
!res
&
quand voos pourrc•¿
etre
eotendue; ce o'efi pas
quand l'cnlant el! diffipé, que les chafes (enfées qo'on
lui d't peuvetll taire imprellion fur
lui: c'ell daos
le
particuher, quand fon ame efi rranquille
&
fon efprit
rccneilli.
11
n'y a pui11t d'enfant en qui l'on ne puilre
fat lir de ces momens d'attcntion; une
gottvernante
ha–
bile peut le> fJ irc naitre fouven¡ .
Des qu'il Cera capable d'avoir une fdée de D ieu,
e>pliq ucz-lui ce que e' el! que fa
route-puiflance, fa
bonté, fa ¡ullice; appreoez-lui le eu!te qu'on
lui doit
&
les prierc¡ qu'il faut
lui adrerTer; pour lui dooner
l'exemple, priez avcc lui,
&
rnettcz-vous dans
la po–
flore
nu
il doit
~rre.
Ce n'ell qu'en parlanr
a
fes yeux
que vous pnrl<rn.
i\
fa raifon . A commencer do rno–
menr que vous l'aurez inllruir, ne permertez jamai> ni
qu'il oublie de pricr, ni qu'il prie dans une pollure peu
décente, a-múins qu'il ne foir malade: alors au lieu
de fes pricres ordinaites, qu'il en falfe une courte,
&
qu'il n'y manque ¡amais: vous lui apprcndrez
fes nu–
tres devoirs de religion'
&
les
lui
ferez prariquer
a
mefure qu'il fera en age de les remplir.
Ses devoirs envers fes pareos marchcroot de pair avec
ceux de la rcligion; apprene-,;-lui que fon bonheur pu
fon mnlheur
err
dans lcurs mains; qu'il tient de
leurs
bontés rour ce qu'il el!
&
rour ce qu'il a ; qu'ils font
pour lui l'image de D rcu ; que Dieu leur a donné par
rapport
a
llll une partie de fa puiflance, de fa bonté
de fa JUilice ; qu'il ordonne de les aimer
&
de les
ho~
norer,
&
qu'il n'a promis une longue vie qu'auK en–
fans qui les honorenr; mais il faut que
les pareos en.
trenr bien dans vos vOes: cnr ti vos difcours ne font
pas fecondés par leur conduite, toutes les
le~ons
que
vous
pourre~
faire
il
l'enfanr, fom aurant de pnroles
perdues.
Le premier fenr iment qu'on doir exiger d'un enfant,
ce n'eO pns fon amitié, c'ell fotl rcfpea: fi
l'on veur
s'~n
faire aimer par la fuítc,
il
faut cornmencer par s'en
fatre Cf3indre; cclui qu'on él eve daos
l'indépendance
n:ell occ_upé que de
lui-m~me,
&
fon creur s'endur–
ctr; cdur qu'on éleve dans la foOrniffion fent le befoin
qu'il
a
d'appui,
&
s'attache natorellement
aux
períonncs
dúnt il dépeud .
GOU
Que (es pareos lui cuchenr route la tendre!Te qu'ils
om pour lui; l'cnfaut en abuferoit; qu'ils vieonenr ra–
remcnr le trou ver, ou du-moins qu o!s rcllent peu avec
lui; qu'ils ayenr l'air de venir plütOt vour •'rnformer
de fa conduite que pour le carefrcr; qu'il>
tlC
badment
point avec lui d'une maniere indécente, comrne avec
un perroquet ou une poupée. Qunnd _ou el! pere, peur–
on ne pas femir le rcfpca qu'ou dott
A
Con
fils?
Qu~
roo• les jours l'enfant aille rcnclre
a.
fes parens ce
q~r
leur el! dO; qu'il
y
relle ptu,
~-molltS
que ce ne,_íort
par récornpcnfe;
n
vous .ates conrente de lut, qu ti
y
toir
re~
O avec bonté, qu'on lui faiTe quelques careífes,
qu'on lui donnc quelques avis toOJuo:s
confo~~es ~
ceux que vous lui aure1. donnés: cnr
ti
faut 9u
ti
y atr
une Correfpondance exaae entre tOUS les difcoUrs qu'i[
entrndra. Pour cela il ell
~-propos
que
quel~u'un
d'in –
telligent viennc torJs les rnatins f.woir de vous ce qui
s'ell palfé' ce que vous avez dit
a
l'enfanr' ce que vous
jugez 3-propos qu'on lui di(e. Si vous
n'ete~
pns
co~tenre de lui, qu'il fe préfente toOJours, c'ell un devotr
auquel
il
ne doir ¡amais manquer ; rnais qu'alors la fa–
tisfaaion de voir fes pareos lui foir refuíée .
JI
ell vrairTcrnblable qu'il fondra en !armes. S'il cll
ronché comme
i1
doir l'otre, nc joigncz poinr .d'autre
peine
~
cene punition, au contraire il faur le confoler.
Entrez dans fa donleur, dires-lui qn'elle cll Juíle, mais
qu'il s'y ell expofé,
&
qu'il ne ticnt qu'a lui de ren–
trer en graee par une meilleurc
condnit~
;_
n
au
co~rraire il n'ell pns afln. fenúb le
a
cene
dtfg_rac~,
J.o•–
gnrz-y routes les privations capables de la lut fatre len–
tir , impofez-les lui uon cornme la peine de fa premiere
fa ute, mais comme ce
\le
de fon infenúbilité: au reO
e,
dans une éducation bien faite , ce dernier
ca~
ne peor
guere arriver;
i1
faudroit que l'enfant eOr été bien
gA–
té, pour que fon ame fe fOr endtJrcie
~
ce point-1:\.
Jc n'ai point parlé de
l'obéilfance, quoiqu'elle foít
la bafe de toure éducarion; fans elle, il ell impoffible
de lixer aucun principe daos l'efprit d'un enfant; elle
doit etre établie daos fon creur nvanr memo qu'il fa–
che ce que c'ell qu'obéir',
&
Je l'ai
fuppolée en par–
lat~t
des devoirs précédens .
Le~ enfan.~
nc
fon.r defo_–
bérlfans qu'auranr qu ·on veur bten qu
tls
le
Lotent;
ti
n'en el! aucun qui ofe réfi(\er foit :\ ce qu'on
lui or–
donne íoit
a
ce qu'on lui défend, quand il tll íOr
d'~rre puni;
11
ne faur pas foulfrir qu'il balanc,· ;
In
plus
legere defobéiflance doir arre punic. Si di:> la premiere
enfance on ne l'accoO tume point
a
fu ivre la raifon d'au–
rrui, on peur-.':tre sOr qu'il ne fuil'fa pns la ficnne quand
il
fera plus avaneé en age.
Au licu de nourrir fun orgueil en portanr fes regJrds
fur les avaorages de fa fortune
&
de
(i"¡
rang, fixez–
les fur fon étar préfcnt; faites lui voir qu'il e!\ dépour·
vQ de IOUI ce qui mérite l'ellime des hommes ; qo'iJ
n'a ni
fc ience, ni raifon, ni verrus; qu'il ne peut ricn
pour
lui- méme,
&
que perfonne n'a befoin de lui; ne
lui donnez point de titres
&
ne fooffre'L pas qu'on lui
en donne; s' il en a, il fera tcrns qu'il les connoilfe
quand il enrrera daos
le monde.
Qu'il fo ir anentif
&
poli, qu'il
re~oive
avec recon–
noiitance les bontés qu'on aura pour lui; que perfoo–
ne ne íoir fon complaifnnt ni Con adulateur:
fi
fon
rang ne vous permct pas de le garantir de certains re–
fpeéh' qu'il rache que c'ell
a
fes pareos qu'ils s' a–
drerTent,
&
qu'ils font le prix de leurs bienta;ts Oll ele
leurs venus. Qu'il ne commande
a
perfonne, qu'il de–
mande avec douceur, qu'il remercic avec politelle; s'il
commande, que tout
le monde foit fourd,
&
que le
mnr
jt
veux,
s'il fort de fa bouche, foit un arrét
de
refus prononcé par
lui-m~me.
Qu'il ne foit point, comme tous les enfnns, avide de
recevoir, éloigné de donner: qu' il donne de bonnc
grace, Onon qu'il foit privé de ce qu'il a refufé de don–
ner; qu'il re9oive difficilemenr, qu'il ne demande ja–
mais .
On
ne peut lui apprendte trop rOr •1u'il efi hu–
milianr de recevoir , qu'il el! doux de donner,
&
que
c'eíl un devoir pour ceu x qui font dons
1'
abondance
par rnpport
a
ceux qui font datH le befoin.
S'il rencon tre un pilUVre ou un malheureui , qu'il Iui
donne qnelque fecours: s'
i1
re~oir
un fcrv ice ou un
préfent de gens au-deflous de
lui, qu'il les récompen–
fe ou Icor rende
au-del~
de ce qu'il n
re~u:
>'il bri·
fe quelque chofe qu'on
lui aura confié , qu' il
ré–
pare le dommage par un préfenr qui y fuir fupérieur ·
que tour cela íe
falTe
par fes mains
&
de fon atgenr
~
c'ell ainO qu'on lui en apprendro l'ufage,
&
qu'en
m~me tems on lui infpirera les premiers ft·ntimens d'huma–
nité, de gétl6rofité, de ¡ullice. Puifqu' on dorme de
l'ar-