54-
2
ENe
qú~i l
fcroit toajOllrS impoflible de développer fans 11
grammairc raiConnée, l'analogi'e
&
l'étymologie que fap–
pellerai les ailes de l' Art de parler, comme on a dlt de
la Chronologie
&
de la Géographie, que ce font les
¡CUX
de I'Hifloire.
N ous ne fi nirons pas nos obCervations fur
I~ I.ang~e,
f.'1llS avoir parlé des Cynonymes. On les mulupllerolt
~
I'infi ni, ti on ne commcns: oit par chercher quelque
1m
<jui en fidt le nombre.
11 Y
:l
dan s routes les langues
des expreflions qui ne dift'erent que par.
~es,
nuances
t~cS<dél icates. Ces nuances n'échappent
111
a lorateur
ni
au
poete qui connoiffent leur la.ngue; mais
~Is
les néglígen!
a
tout moment, I'un contratot par la dlfficulté de fOrJ
,:lrt I'autre entrainé par J'harmonie du lien . C'efl de cet–
(e
~onfidérntion
qn'oll peut déduire la loi générale dont
on
a beCoin.
11
lle faudra traiter comme Cynon ymes que
les termes que la P oélie prend pour tels; afin de remé–
dier
a
la confufion qui s'introduiroit dam la lailgue par
I'indulgence que I'on
a
pour la rigueur des lois de la
verlificatioll,
11
ne faudra traiter comme Cynonymes que
les termes que I'art oratoire Cubflitue indiflinaement les
\Ins aux autres; afin de remédier
a
la confulion qui s'in–
troduiroit dans la langue, par le charme de l'harmollie
oratoire qui tal\tÓt préfere
&
tantÓt Cacrifie le mot pro–
pte, abandonnant le jugcment du bon fens
&
de la rai–
fon, pour Ce (o Omeltre
a
celui de I'areille; abandon qui
paro! t d'abord I'ex travagance la plus manifelle
&
la plus
contraire
a
I'cxaaitude
&
a
la vérité; mais qui devient,
qunn d on y refl échit, le fond ement de la fineffe, du bon
gout, de la mélodie du flylc, de fon nnité
&
des au–
tres qualités
de
I'élocution, qui feules affurent l'immor–
talité aux produaions littéraires,
Le
facrifice du mot
proprc ne fe faifant jamais que dans les occafions ou
l'dprit n'en efl pas trop écarté pat l'expreffion mélodieu–
fe, alors I'entendement le fupplée; le diCcours fe reai–
tie; la période demeure harmoniel2fe; je vois la chofe
commc elle en; je vois de plus le caraaere de I'auteur,
le-
prix qu'il
a
3ltaché lui-meme aux objets dont il m'en–
tretient, la paffion qui · I'anime; le fpeaacle fe compli–
que, fe multiplie,
&
en m eme proportion, l'enchante–
meut s'accrolt dal1s mOJI efprit; I'oreille efl contente,
&
la vérité u'en point oflenCée , Lorfque (les avantages
De pourront fe réunir, I'écrivaio le plus harmonieux,
s'il ,a de la jufleife
&
du goOt, ne fe réfoudra jamais a
~bandonner
le mot propre pour fon fynonyme,
11
en for–
tífiera ou aftoiblira la mélodie
a
l'aide d'un correaif;
¡.¡
variera les tems, ou il doonera le change a I'oreille
par quelque aorre tineffe, lndépendammeot de I'harmo–
nie, il faut cnco re laiffer le mot propre pour un au–
tre, toures les fois que le premier réveille des idées pe–
tites, baffes, obfcenes,
00
rappelle des fenCat ions defa–
gréables, Mais dans les autres circonnanees , ne feroit–
JI
pus plus a-propos, dira-t-on, de laiITer au leaeur le
foin de fuppléer le mot
harmoo i~ux
que cctlui de fuppléer
le mOl propre? N on; quand il feroit au fli facile
ii
1'0-
reille, le m or propre étam donné, d'entendre le mot har–
monieux , qu'¡' l'efprit, le mot harmonieux étam don–
né, de trouver le mot proprc.
II
faur, pour que I'eftet
.de la m uliq ue Coir produit, que la mufique
Coit
enten–
.<lue: el le ne fe fuppofe point; elle n'efl rien, fi l'oreil–
Je n'en eH pas réellement att"eaée.
On recueil lera toutes les expreffions que nos grands
poetes
&
nos meilleurs orateurs auront employées
&
pour–
l"Otlt
employer indíflinaement, C'ea fur-tout la poné–
r ité qu' íl faut avoir en vOe . C'en encore une mefure
invariable. JI en inutile de nuancer les mots qu'on ne
fera poiO! tenté de coofondre, quand la langue fera
m orte . Au-delil de cette limite, I'art de faire des
f.J–
nonymes dev iell! un tra"ail auffi étendu que pué rile , e
" oudrois <Ju'ou eat deux autres attentions dans la difiin–
a ion des mots fynonymes, L'une de ne pas marquer
feulement les idées qui différentient, mais celJes encore
qu i font communes , M, I'abbé Girard ne s'efi aITervi
qo'ii la prem icre partie de cette loi; cependant celle qu'il
a négligée n'efl ni moins effentielJe, ni moins d'ifficil e
¡,
remplir, L'au tre , dc choifi r fes exemples de maniere
qu'en expliquam la d i\'erlité des acceptions, on exponh
en memc tems les ufages de la nation, fes coutumes,
fon .caraaerc, fes vices, fes vertus, fes principales tran–
faalons,
&c.
&
que la mémoire de fes grands hommes,
de fes Il"lalheurs,
&
de
C~s
proCpérités, y fUt rappell ée .
1
¡
n'en. colitera pas plus de rendre un fynonyme utile,
fenfé, IOn ruaif
&
vertueux que de le faire contraire
a
I'honneteté
011
vu ide de
f~ns.
Ajoutons
11
ces obrervatiollS, un moyén timple
&
rai–
foonable d'abréger la nomcnc1ature
&
d'éviter les redi–
~s.
L '
Académie
fran~oire
I'avoit prati\jucf
daos
la pre-
ENe
miere édition de fon diaionnaire;
&
je ne pení'e pas
qu'clle y eut renoncé en faveur des leaeurs bornés,
Ii
ell~
eut conlidéré combien
il
étoit facile de les Cécou–
rir, Ce moyen d'abréger la nomenclature, c'cn de ne
pas diClribuer en plufi eurs articles féparés, ce qui doit
na–
turellement
~tre
renfermé (ous un Ceul , Faut-il qu'un
diaionnaire contienne autant de fois un mot, <ju'il
y
a
de difterences dans les vues de I'efprit? I'ouvrage devient
infin i,
&
ce fera f écelTairement un cahos de répétitions ,
J
e ue ferois done de
prlcipitable, prlcipiter, prlcipi–
tant, précipitation, prEcipité, précipice,
&
de toute au–
tre expreílion femblable, qu'un article auquel je renver–
roís dans tous les endroits ou I'ordre alphabétique m'of–
friroit des expreffions liées par une meme idée générale
&
commune, Quant aux différences, le fubflantif défi–
gne ou la choCe, ou la perfonne, ou l'aaion, ou la
(enCatioo, ou la qualité, ou le tems, ou le lieu; le par–
ticipe, I':laion, confidérée ou comme poffible, ou com–
me préCente, ou comme paffée; l'in6nitif, I'aaiou
rc\a~
ti vement
a
un agent,
a
un ¡¡eu,
&
a
un tems q ue\con–
que indéterminé, Multiplier les définitions felon toutes
ces faces, ce n'ea pas définir les termes; c'en revenir
fur les mémes notions achaque face nouvelle qu'un
terme préCente, N'ea-il pas évident que ce qui con vient
a
une expreffion confidérée une fois fous ces points de
"ue différens, convient
a
toutes celles qui admettront
daos la langue la meme variété? Je remarquerai que
pour la perfeaion d'un idiome, il feroit a Couhaiter que
les termes y euDent toute la variété dont i1s COfl! fofce–
ptiblcs,
J
e
dis
dont
;/$
font fr/fceptibles,
parce qu'il
y
a des verbes, tels que les neutres, qui excluent certai–
nes muances; aiDfi
aller
ne peut avoir I'adjea if
illlablr •
Mais combien d'autres dont il n'en efl pas ainti,
&
dont le produi! en limité fans miCon, malgré le beCoin
journalier,
&
les embarras d'une
difett~
qui
Ce
fait p'lr<Ícu–
lierement fentir aUK écrivains exaas
&
laconiques?
NOUi
difons
accufateur,
accfljel',
aCcltfation, acclIfant, aCClt–
fI,
&
nous De difons pas
aHufable, quoiqu'in excuftlble
foit d'ufage , Combien d'adleaif qui De Ce m euvent point
vers le Cubflantif,
&
de fubflamif qui ne fe meuvent
point vers I'adjeaif? Voila une fource féconde ou íl re–
ne encore
a
notre langue bien des ricbeffes
a
puiCer.
JI
feroit bon de remarquer achaque eIpreflioll les muan–
ces qui lui manquent, a6n qu'on osar les fuppléer de
notre tems, ou de crainte q oe trompé daos la fuite par
I'analogie, on ne les regardat comme des manieres do
dire, en ufage dal15 le bon liecle ,
Voila ce que j'avois
a
expoCer fur la langue, Plu¡
cet objet avoit été négligé dans Dotre ouvrage,
pl~
il
étoit important relativemellt au but d'une
Eneye/opédie;
plus il convenoit d'en traiter ici avec étendue; ne fOt–
ce, comme ' nous Pavons dit, que pour indiquer les mo–
yens de réparer la faute que nous avons commiCe, Je
n'ai point parlé de la Syntaxe, ni des autres parties du
rudimsnt
frau~ois ;
celui qui s'en efl chargé, n'a rien
laiffé
a
delirer la-delTus;
&
notre DiaionDaire efi com–
plet de ce cóté,
Mais apres avoir traité de
la
langue, ou du moyen de
tranCmettre les connoiffallces, cherchoDs le meilleur en–
chainement qu'on puiíle leur donner .
JI
Y
a d'abord un ordre général, celui qui diflitlgue ce
D iaionllaire de tout autre ouvrage ou les matieres Cont
pareillement fO\lm ifes a l'ordre alphabétíque; l'ordre qui
I'a fait appeller
Encyc/opédie.
Nous ne dirons qu'une
choCe de cet enchainement conlidéré par rappor!
11
tOU–
te la matiere encyc\opédique, c'efl qu'il u'efl pas pof–
fible
a
)'architeae du génie le plus fécond d'introd uire
autant de variété dans
la
conarua ion d'un grand édi–
fice, dans la décorJtion de fes
fa~ades,
dans la combi–
nai fon de fes ordres,
en
un mot, dans tootes les part iei
de fa diaribution, que I'o¡dre encyc\opédique en admet,
.1\
peut etre formé ,foit en rapportant nos différentes con–
noilfances aux diverCes facultés de notre ame, (c'ea ce
Cyfl8me que nous avons fuivi), Coit en les rapportant
aux etres u'elles ont pour obJet;
&
cet objet ea ou
de pure curio fité, ou de luxe, ou de néceffité , On peut
diviCer la fcience générale, ou en fcience des choCes
&
en fcience des tigties, ou
en Ccience
des concrets ou en
fcience des abflraits. Les deux cauCes les plus généralcs ,
I' A rt
&
la N ature, donDent aufli une belle
&
grande
diflribution, On en rencontrera d'amres dans la diflin–
a ion ou du pbyfique
&
du moral;
de
I'ex inant
&
du
poffi ble; du matériel
&
du fpir ituel; du réel
&
de l'iD–
telligible, Tout ce que noos favons ne découle-t-il pas
de ruCage de nos fens
&
de celui de notre raiCon? N'efl–
il pas ou uaturel ou révélé?
N
e fom-ce pas o u de'
rnots. ou
d~
chofes, ou
des
f;¡its?
II en
dOlle
impof~
Gblc.