ENe
bu
de bons cfprils reconnurenl qu'clle /lvoil avec
Is
fcieoce des chofes plus de liaifon gu'ils n'en avoient
d'abord fcupc;onné ,
&
gu'on pOUVOil rega:de: celle fpé–
culalion co¡n me n'élanl poilll dU-IOUI mdlglle de la
P hilofophie . Voil a prdciíémenl 011 nous enJommes;
&
c'en en recueillalll aino des mOls échappés par hafard,
&
él rangcrs
11
la maliere Hailée
fpécial~melll
dans un
aUleur oú iJs ne caraélériíenc que fes lumleres, fon
cu–
,:eilllde
&
fon indéci lion, qu'on parviendroie
a
éclaircir
I'hilloire des progres de I'elprit humain dans les liecles
parrés .
Les auleurs ne s'apperc;oivent pas quelquefois eUI–
memes de l'imprdJion des chofes qui
f~
palfenc aU-lO llr
d'euI; mais ceHe imprelfi on n'en
eCl
paso moins réel–
le . Les Mu fi ciens , les Peilllres, les A rehiteaes, les
Philofophes ,
&e.
ne peuvent avoir des eonleftatioos ,
fa ns que I'homme de lemes n'en foit inllruit;
&
réei–
proq uemem, il ne s'agitera dans
h
littérature aueune
quell ion-, qu'il o'cn paroirre des veft iges dims eeux qui
tcriront ou de la Mufique, ou de la Peinture, ou de
j'
Architeaure, ou de la Philofnphie. Ce font comme
les re6ets d'une lumiere générale qui tOl}lbe fur les
Arl illes
&
les Lettrés,
&
dont i1s confervent une
• luel1r. Je fai que l'abus qu'ils font quelquefois d'ex–
prelfions donl la force leur eH ineonnllc, déccle qu'ils
n'éloienl pas 3U cOllrant <)e la philoCophie de leur tems;
m ais le bon efprit qui recueille
ces
expreffions, qui íai–
til ici une mélaphore, la un lerme nouveau , ailleurs
un mOl relalif a un phénomene,
a
une obfcrvation,
il
une expérience ;
a
un fyftcme, enlrevoil I'élac des opi–
Ilions dominantes, le mouvemenl général que
I~s
e-
• fprils
commen~ oil
a
en recevoir,
~
la leinle qu'etles
pon oient dans la
l~ngue
col11munc. El c'ell la, pour
le dire en paITant, ce qui rend les aneiens aUleurs li
diffieiles
i\
jllger en maliere de gollc. L a perfuafion
générale d'un fenciment, d'un
fyft~me,
un ufage re-
1;0 ,
I'infliwcion d'une loi, I'habilude d'un exercice,
cre.
leur fourn ilfenl des manieres de dire , de
penfe~,
de rendre, des comparaifons, des expreffi ons, des fi–
gnres uont coure la beauré n'a pO durer qu'auranl que la
chofe méme qui leur íervoic de bafe. La chofe a palfé,
&.
l'éclac du difeoQrs
:¡vec
elle . .D '011 il s'enfuit qu'un
é crivaio qui veul afsOrer
a
fes ouvrages un charme
é–
ternel, ne pOllrr:¡ emprunrer avee Irop de réferve fa ma–
n iere de dire des idées du jour, des opinions couran–
tes , des fyftemes regnan5, des arls en vogue
i
tous ces
m odeles font en vici ffitu de: il s'auaehera de préferen–
ce aUl etreS permancns , aUI phénomenes des eaux, de
¡a lerre
&
de l'air, au fpeaacle de l'Uoivers,
&
au~
p alfiolls de l'homme , qu i fom toíljours les memes;
&
t etle fera la vérilé, la force ,
&
I'immulabililé de fon
c:oloris , qlle fes ou v, ages faoO! I'érounement des lie–
eles, malgré le defordre des macieres, rabfurdilé des
norions ,
Il¡
tous les défauts qu'on pnurrQil leur repro–
~her
. .Ses idées particulieres , fes comparaifons, íes m é-'
taphorC5,
f~s
exprcffi ons , fes ima"es ramenant
fan~
cef–
fe
a
la nature qu'on ne fe larre poi nt d'admirer, feront
autam de vérjtés partielles par lefquelles il fe folltien–
dra. On ne le lira pas pour apprendre
¡¡
penfer; mais
jour
&
nuil on I'aura dans les m¡Vns pour en appren–
dr!!
a
bien dire. T el fera fon fon, tandis que lanl d'ou–
vrages qui ne feron! appuyés G4e fur un froid bon fens
'&.
íur une peíame
r~ifofl,
íeronl peUI-elre fml efti¡nés,
mais Ipeu IlIs ,
&
lomberont enfin dans l'oubli , lorfqu'
un hornme doüé d'un beau génie
&
d'une grande élo–
~uencc
les aura dépouillés,
&
qu'¡¡ aura reproduil aux
yeux des ho mmes des
v~rilés,
auparavant d'uoe aufté–
riré feche
&
rebulanle, fous un véltement plus noble,
plus élégant, p(us riche
&
plus fédu ifaol .
Ces révQlutions rapides qui fe fonl dan s les choíes
~'infti[Ution
hu maine ,
&
qui auronl lant d'in6uenee fm
la
maniere dont la pofl éricé jugera des produaions qui
l ui feron l Iranfmiíes, font un puilfalH motif pour s'aua-'
cher dans un ouvrage, lel que le nÓtre, 011 il elt fou–
v enl '-propos de cilcr des exemples, :\ des m oreeau!
doO! la beaUlé fnit fondée [ur des modeles perq¡anens :
fans celte précaulion les modeles palferont ; la vérilé de
J'imitalion ne fera plus fentie,
&
les exemples cilés ceITe–
conl
de parojere beaux •
. V an de Iranfmettre les idées par la peinlure des ob–
Jels , a
dil
nalurelIemenl fe pré[emcr le premier : celui
de les Iranfmeltre en fiXa nl les voix par dcs caraaeres,
e,~
rr<?p
délié ;
il
dnl effrayer I'homme de géuie qui
l lm~g,oa .
Ce n:- fUI qu'apres de longs ellais qu'iI en–
rrev'l que les VOIX fenoblement différealcs n'éloieol pas
en auffi grand nombre qu'ellcs paroirroiem,
&
qu'il ofa
fe r rolfiCltre de les rendre lourcs avec un petit nombre
ENe
ele fignes . Cepenelant le premier moyen n'éloit pas fan,
quelque avamage, ainli que le feeond n'ell pas refló
fans quelque défaut .
La
peinlure n' aneioc poim aur 0-
péralions ,de l'efpril; I'on ne difl ingueroil poilll entre
des objels fenobles di/lribués fur une lOile, eomme ils
feroiem énoneés dans un diícours, les liaifons qui for–
Illenl le jugemem
&
le fyl1ogifme; ce qui conflilue un
de ces elres fujel d'une propolilion;
ce
qui conftilue
une quslilé de , ces elres, atlribOt; ce qui el)ehatne la
propo(jlion
a
une aUlre pour en faire un raifonnement,
&
ce raifonnemel1l
a
un autre pour en compofer nn' di–
fcours; en un mOl iI
y
a uoe infinité de choles
~e
cet–
le nalure que la pe inture nc peut figurer; mals elle
monrre du rooios loOtes celtes <ju'etle fi gure;
&
li au
comraire le difcours écril les déligne tomes,
i1 .
n'en
monlre aueune. Les reialures des 2rres font IOOJours
tres-incomp1cle~ ;
mais ' e lles n'onl rien d' équivoquc,
paree que ce font les portrails mémes d'objels que nous
al'ons fous les yeux . Les caraa eres de I'éerilure s'é–
lendenl a 10UI, mais ils fOil I d'inll ilUlion;
iI
oe lig ni–
fi em rien par eux-memes . La cié des lableaux eft dans
la nalure,
&
s'of!re
~
lOut le rr.onde: cetle des cara–
aeres alphabéliql1e s
&
de leur combinaifon ell un pa–
ae d¡'11I il faul que le myflere foil revélé;
&
il ne
peul jamais I'élre complelement, paree qu'il y a dans les
expreffi ons des nuanees délicates qui rrflem néedlaire–
ment indélerminées . D ' un aUlre cólé la peimure étanc
permaneme, elle n'efl que d' un élal inllamanée . Se pro–
pofe-t-ctle
d'exprim~r
le mouvement le plus limpIe,
el–
le devient obfcure. Que dans un Irophée 00 voye une
Renommée les ailes déployées. lenant fa lrompene d'u–
ne main,
&
de l'aulre une couronne élevée au-delIus
de la lele d'iJn héros, on ne fait ti elle la doillle 00
fi elle l'enleve; c'eft
¡¡
I'Hiftoire
a
lever I'équivoque .
Quetle que f0il au conrraire la variélé d'uoe aaion, i
Y
a toujours une cereaine collea ion de termes qui la
repréfenre; ce qu'on ne peul dire de que Ique fu ite ou
grouppe de figures que ce foit . Muhipliez lam qu'¡¡
vous
plair~
ces figures, il
Y
aura de I'imerrupt¡on : I'a–
aion eft conlinoe,
&
les fi gures n'en donnerom que
des inflans féparés, laillaO!
a
la fagacicé du I"peaateur
3
en remplir les vu ides.
11 Y
a la m eme incommen–
furabiliré enlre 10US les mouvemens phyfiques
&
IOU–
les les répréCemations réelles, 'lu'entre cenaines ligues
&
des fuiles de nombres . On a beau augmenter les
lermes entre un terme donné
&
un aUlre; ces lermes
reftanl InOjours ifolés , ne fe louchan! poim. lailJ"ant en–
Ire chaeun d'cux un inlerval)e, ils ne peuvent jamais.
correípondre
a
cerraioes quantilés continues. Comment
rpefurer toote quantilé comioue ·par uoe 'luaolilé diCere-.
le? Pareillemem, comment repréfemer une aaion du–
rable par des imnges d'in fl ans féparcj"s ? Mais ces ter–
mes qui demeurent dans une langue nécellairement ill–
e xpliqués, les rad ieallx, ne correfpondem-ils pas
alfe~
exaélement a ces iollans iOlermédiaires que la. peinture
ne peol repréíenler ?
&
n'efl-ee pas a-peu -prcs le meme
défaut de pan
&
d'aucre? Nous voil!! donc ar.rclés dans
norre proj el de Ir3n fmettre les
cOnn();naIlCe~ ,
par I'im–
po ffibililé de rendre toure la langue intelligible . Com–
PlCIlI
recueiltir les raeines grsmmalicales ? qua"nd on les
aura recuill ies, comrnem les expliqucr ? Eft-ee la peine
d'écrire pour les fieeles
a
venir,
(j
nous ne fommes
pas en état de nous en faire entendre ? Ré(olvoDS ces
diffi cullés .
Voici premierement ce que je penre fur
la
maniere
de difeern er les rad icauI. Pcut- erre y a - t - il quel'lue
mélhode, quelque fyfleme phitoíophique,
11
I'aide du–
quel nn en trouveroir un grand nombre: mais ce fy–
lH:me me femble diffieile
a
inventer;
&
quel qu'il foit,
1'6pplieation m'en paroil fojeue
¡¡
erreur, par l'habilu–
de bien fonMe que j'ai de fuípeaer lOute loi généra–
le en maliere de langue. j'aimerois mieux fu ivre un
moyeo lechlliqne, d'aulant plus que ce moyen teehni–
que ell une fu ile nécerraire de la formalion d'ulI Di–
~ionnaire
Eney(lopidi'lt/c .
1I
fanl d'abord' que ceul qui
coop~reronl
a
Ce!
ou–
vrage, s'impofent. la loi de tout défioir, tout, fans au–
cune exception-. Ce\:¡ fa ie, il ne refiera plus
a
l'édileur
que le foin de féparer les termes ou un· meme mot
fera pris pQur genre daos une défioilion,
&
pour diffé–
rence dans une aUlre :
it
eft évideDI que c'eft la né–
ce!Iicé de ce dooble emploi qui conflilue le cercle vi–
lieuK,
&
''lu'elle eft la limile des définilions . Quand on
aura ralfemblé IOUS. ces mOIS, on trouvera, en les e–
Iaminant, que des deux termes qui fom défiois l'UD
par l'aulre, c'ell tantÓt le plus général , lant61 le moins
génér~1
'luí e(l &enre oy différence;
&
il ell évident
que
.'