ECO
miere en le gOl'!t ridicule
&
barbare de la nation pour
les magots de poreelaine
&
les ligures enropiées de la
C hine . CommelH avec un pareil goat aimera- t- on' les
fujets nobles, vanes
&
bien unités ? Auffi les grands
ouvrages de Peimure fe fom-ils aujourd'hui réfugiés dans
nos églifes, 011 meme on trouve raremen t les oeenfions
de travailler en ce gcnre. U 'ne feeonde raifon non
moins réelle que la premiere,
&
qui mérite benucoup
plus d'attemion, paree qu'elle peut s'appliquer au. Let–
Ires comme aux Ans, c'en la vie différente que me–
neot les Peintres
&
les Seulpteurs . L'ouvrage de eeux–
ci
demandant plus de tems, plus de foias, plus d'affi–
duité, les force a erre moins répandus : ils COnt done
moios fujers
a
fe eorrompre le goat par le eommeree
les vaes
&
les eonCeils d' une foule de prétendus
eon~
noilTeurs, auffi ignorans que préComptueux. Ce Ceroit
une queman bien digne d'etre prapoCée par une de nos
aeadémies, que d'examiner
ji
/e commerce des gens dI<
monde a fait
pltu
de bien
'{tle
de tort al<x gens de
L ettreJ
&
al<x artiftes.
Un de nos plus grands feul–
ptcurs ne va jamais au. fpeaacles que nous appellons
{érieux
&
nobla, .
de crainre qué la maniere érrange
dont les héros
&
les dieux y fOD! fouveD! habillés ne
dérange les idées vraies, majenueufes
&
fimples qu'
iI
s'en formées fur ce fujet . II ne
cr~iot
pas la méme
choCe des [peaacles de faree, ou les habillemens gro–
teCques ne lailTent dans ron ame aucune uaee nuilible.
C'e/l a-peu-pres par la meme raiCon que le P. Male–
!-ranche ne fe délalToit qu' avee des jeux d'enfant. Or
Je dis que le commerce d' un grand Dombre de faux
Juges ell auffi dangereux
a
uo artifle, que la fréquenta–
tion de nos graods Cpeaacles le feroit
a
I'anifle donr
on viem de parler. N orre
Icole
de Peinture fe pordra
totalement, Ci les amateurs qui ne fonr qu'amateurs (
&
combien peu y en a-t-iI qui foienl autre choCe? ) pré–
telldent
y
donner le ton par leues difeours
&
par leurs
c!"crilS , Tomes leors diITertations n'a'¡¡ooriront qu'a faire
de nos artines de beau! efprirs manqués
&
de mauvais
peio tres. R aphael n'avoit guere la d'écrits fur fon art,
encare moios de diITenarions; mais
iI
éludia la nalure
&
I'antique . Jules
11.
&
Léon
X.
laiIToíent faire ce
grand homme,
&
le réeompenfoient eD fooverains, Cans
le confeiller en imbéeilles. Les
Fran~ois
00(
peur-erre
heaueoup plus
&
beaueoup mieux éerit que les Iraliens
fur la Peinture, les Iraliens n'en fom pas moins leurs
m altres en ce genre. On peut fe rappeller
a
eerte oc–
carian I'hinúire de
~es
deux arehileaeS qui fe préCeo–
lerent aux Arhéniens pour exéeurer un grand ouvrage
que la république vouloit faire. L'un d'eux parla ucs–
long-Iems
&
rres-dirertement Cur fún art,
&
I'aurre Ce
conrenta de dire apres un long fileoce:
ce '{u'i/ a dit,
je le f erai.
On auroit lort de conclure de ce que je viens d' a–
vance!', quc les Peintres,
&
en général les artin es, ne
do iv erit point écrire fur leur art ; je fuis perfuadé au
eoorraire qu'eux Ceuls en font vraiment capables: ma'is
il y a un lems pour faire des ouvrages de génie,
&
un
lems pour en éerire: ce dernier rcms en arrivé, quand
le feu de l' imaginarion 'commenee ;\ l!tre rallenti par
l' age; c'en alars que l' expérienee aequife par un long
travail, a fourni une maliere abondante de réflexions ,
&
l'on n'a rien de mieu!
a
faire que de les meltre el1
ordre. Mais un peimre qui dans Ca vigueur abandonne
la palelte
&
les pineeau x . pour la plume, me paro; t
f~mblable
a
un poere qui s' adooneroit
a
l' élude des
langues orienlales; des ce moment la nullité ou la mé–
diocriré du talem de l'un
&
de l'aulre en déeidée. On
ne fonge guere a éerire fur la poélique, quand 011 en
en état de faire 1'lIiade .
La fupériorité généralement reeonnue, ce me Cem–
ble , de
I'lcole
ancienne d' lralie fur
I'école
fran~oiCe
an–
cienne
&
q:loderne, en fait de peinrure, me fournit une
autre réBexion que je crois devoir préfemer
a
mes le–
aeurs, Si quelqu'un vouloit perfuader que nos peintres
effaeeot eeul de l' Iralie,
il
pourroir raiConner en eetle
fone: Raphael
&
un grand nombre de deffinalcurs íta–
liens, om manqué de caloris; la plltpart des colorines
001 péehé dans le delfein: M iehe"l - Ange, Paul Vero–
nefe,
&
les plus grands maltres de
l'lcole
italienne, 00!
mis dans leurs ouvrages des abfurdit6s groffieres. N os
P eintres fran90is au eomraire Ont élé Caos comparaiCon
plus raiConaables
&
plus fages dans leurs compofitions .
On ne voit point dans les tábleaux de le Sueur, du
P ouffin, & de le Brun, des comre - Cens & des ana–
chroni[mes ridieules;
&
dans les ouvrages de ces
grands hommes la fageiTe n'a point nui ;\' la beauré:
donc nO!re
Icole
en forr fupérieurfl
a
ceUe d'Iralie. Voi-
T.meV.
ECO
28r
n.
un raiConnemcnt rres-faux, dont
pourt~nt
to ut e(l
vrai, exeeplé la eonfequenee. C'en <¡u'il faut juger
les ouvrages de génie, non par les faules qu i s'y ren–
contrent, mais par les beamés qui s'y trouvenr . L e la–
blean de la famille de D arius en le chef-d' CEuvre de
le Brun ;
c~t
.ouvrage el! tri:s-en im ab le par la compo–
firion, l'ordollnance,
&
I'e xpreffion meme: cependanr,
de I'avis des eonnoiiTelírs,
iI
fe [oBtient
a
peine aupres
du rableau de Paul VeroneCe, qu'on voir
a
'eÓré de lui
dans les apparremens de Verr:,illes,
&
qui repréCente
les pélerins d'Emmaüs , paree que ce
de~nier
lableau a
les beaulés fuperieutes , qui fOIll aublier les fautes groC–
fieres de fa eompo(ilion . La
¡>ucelle,
fi j'en crois eeulC
qui onl eu la patienee de la !ire, en mieux conduite
que l'
:¡!;.,éide,
&
cela n'e(l pas difficile
¡¡
eroire; mais
vingt beaux vers de Virgile éeraCem toute l'ordonnan–
ce de la
Pucelle.
Les pieees de ShakeCpear 0111 des
groffiererés barbares; mais ¡Hravers celle épaiITe fumée
brillent des uails de génie que lui feul y pouvoit met–
rre, c'en d'aprcs ces uaits qu'on doit le juger, com–
me c'e(l d'apres
Cinna
&
Polieulle,
&
non d' apres
Tite
&
Bldni.. ,
qu'on doit juger Corneille.
L'école
d'ltalie, malgré tous fes défauts, en Cupérieure
a
1'1-
cole
frall~oife,
paree que les grands ma;ues d '!talie [ont
fans comparaifon en plus grand nombre que les grands
malrres de Franee,
&
parce qu'il y a dans les rableaux
d'Ilalie des beautés que les
Fran~ois
n'ont poinl anein–
tes . Qu'on ne m'aeeufe point (ci de rabailrer ma na–
lion, perConne n'en plus admirateur que moi des ex–
eelens ouvrages qui en font forlis ; mais
il
me Cemble
qu'il feroil .uffi ridicule de lui aeeorder la fupéríoriré
dans tous les genees, qu'injune de la lui refuCer dans
plurieurs.
Sans !l0us écarrer de notre filjet (car il s'agit ici des
holes
des beaux Arrs en général), nous pouvons ap–
p!iquer
a
la Mufique une partie
de
ce que nous venons
de dire. Ceux de nos écrivains qui dans ces derniers
lems onr allaqué la Mufique ita!ienne,
&
donr la plt1-
pan, tres-féconds en injures, n'avoient pas la plus lé–
gere connoifiilOce de l'an, ont fail comr'ellc un rai–
ionnemenl préciCément Cembl able
a
eelui qui vient d'e–
Ire réfulé. Ce raiConnemenr tranCporté de la Mufique
a
la Peinture, eúr été, ce me Cemble, la meilleure ré–
ponfe qu 'on pett oppofer au! advafaires de la Mufi–
que ilalienne.
Il
ne s'agil pas de favoir fi les Iraliens
001
beaucoup de mauvaife MuCique, cela doit etre,
eomme ils ont fans doure beaueoup de mauvais tableaux ;
s'íls ont fair fouvem des conrre-fens; cela doit e tre en–
ca re
( voy.
C o
N T R E-S E N 8) ;
ti leurs points d'orgue
fom déplaeés ou non
(voy.z
POI
N T
D'O
R G U I! ) ;
s'ils ont prodigué ou non les ornemens mal-a-propos
(voy.z
G
o
U T ) :
il s'agit de favoir fi dans l'expreC–
Cion du femiment
&
des paffions ,
&
dans la peinturc
des objels de loute efpece, leur MulÍque en fu périeu–
re
a
la n6tre, foit par le nombre, foir par la qualité
des morceaux, foit par rous les deux egfemble . Voi–
U,
s'il m'ell permis de parler aintj, I'énoncé du pro–
bleme ;\ réCoucre pllur juger la quen ion, L' Europe
Cemble avoir jugé en faveur des Iraliens,
&
ce juge–
ment m érile d'autanr plus d'attenrion, qu'elle
a
toUI-a–
la-fois adopré généralemcl1t notre langl1e
_&
nos pieec.
de rhéatre,
&
proferit ¡¡énéralemenl norre MU/ique.
S'en-elle trompée, ou non? c'en ce que nOrre poné–
riré décidera .
11
me paro;t feulement que la din in élion
Ci commune entre la Mufique
fran~oife
&
l'itali'enne,
en frivole ou faulTe.
Il
n'y
a
qu'un genre de Muti–
que: c'cn la bonne. A -r-on jamais parlé de la P'ein–
ture
fran~oi fe
&
de la Peinlure italienne? La nature
en la m eme par-tour, ainfi les arlS qui l'imireOl , doi–
vent auffi etre par-tout Cemblables .
Comme
iI
y
a
en Peinrure différentes
<coleJ ,
iI
Y
en a auffi en Seulpture, en ArehiteéJ:ure , eo MuCique,
&
en général dans tous les be.aux,
~rrs.
En
~ufique,
par ex emple 10US eeux qui 001 fUlvt le fiyle d un grand
maltre (ear' la Mufiquc a fon n yle, comme le di–
fcours) font ou peuveot erre regardés comme de
1'.–
cole
de 'ce maltre . L'illunre Pergolefe en le Raphael
de la Mufique ilalienne ; fon nyle en celui qui mé–
rite le plus d'elre fuivi ' .
&
qui en cltet I'a élé le
pl.uspar les artincs ,de fa natlon :
peUI-~tre
commeneenr,¡ls
a
s'éearler un peu Irop du ton vrai neble
&
fimple,
que ce grand homme avoit donné.
JI
femble qup la
Mu/ique en Italie commenee a approcher al1jourd'hui
du n yle de Seneque; l'art
&
l'eCprit s'y montrent quel–
quefois un peu trap, quoiqu'on
y
remarque enca re des
beautés vraies, fupérieuees,
&
en grand nombre.
Le~ Fran~ois
o'oot
eu
jufqu'ici que deul:
écoleJ
de
Nn
M~
/