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nou

de fu ívre les imprer¡¡ons de la nature,

que de !le

pnl

s'y conformc r, S'il fuívoie fes principes, il devroie de-

11Ieurer dans une perpétue lle indoleoce, fans boire, fa.n s

manger, fans voir fes amis, fans fe confo rmer aux 10ls.

nUI ufages

&

aux coutumes, en un mot fe péerifier

&

elre 'immobile comme une {Iatue. Si un chien eu –

ragé fe

jcu'c

Cur lui, il ne doit pas faire un Ras p04r

le fu ir: que fa maiCon menaee ruine,

&

qu' elle foit

prét~

il

s'écrouler

&

3

l'eng loutir

Cous

fes ruines, il

n 'en doie poinc fortir; qu' il foi t dé"faillane de faim ou

de foif, il ne doit manger ni boire: pourquoi? paree

qu'on ne

f~it

jamais une aélion qu'en cOllféquence de

quelques jugemens illlérieurs, par leCquels on fe dit qu 'i l

y

a du danger, qu'¡¡ e{l bon de I'évitcr; que pour I'é–

viter il faut faire eelle ou telle chofe , Si on ne le fnit

NS, c'e{l que l'c Cprie demeure dans I'inas:tion, fans Ce

~~terminer,

Heureufement pour les Pyrrhoniens, l'il1-

ílin.:t Cupplée al'ec uCure

11

ce qui lellr manque du cl)té

de la conviélion, ou ph1tllt

il

corrige l'

extrav~gance

de leur

dollte .

. M ais il Cuffie, diront-ils, que le danger paroilfe pro–

bable, pour qu'on fo ie obligé de le fu ir: or nous ne

nions pas les

~pparences;

nous diCons feulement que

nous ne Cavons pas que les chofes foient eelles en ef–

fet qu'elles nous paroi(fent .

Mai~

ceue réponCe n' ell

qu'un vnin Cubeerfuge, par leq ue! ils ne pourrolll échap–

per

a

la difficulté qu'on \eur faie. Je veux qUe le dan–

ger lem paroilfe prqbable; mais quelle raifon on e- ils

pour s'y Cou{lraire? Le dangcr qu'ils redoutent e{l peut–

~tre

pour eux un tres-grand bien. D 'ai lleurs je vou–

drois bien (.woic s'ils on t idée de danger, de

do"te ,

de

próbabilité; s'ils en Ollt ¡Me , ils connoiaent dOllc quel–

que cho[e, favoi r qu '¡¡ y a des dangers, des

do"teJ,

des probabilieés : voila donc pour eux une premiere

m arque de vériré,

C 'e{l

un point fixe

&

con{lant chez

eux. qu'il fau t vivee comme les autres,

&

ne point

fe linguhriCer ; qu'il faur Ce laifler aller au x ill1preffions

qu'inlpire

la

oature; qu'ij faue fe conformer aUi lois

&

aUl\

coíltumes. Mais ou ont-ils pris touS ces prin–

c ipes? Sceptiques daos leur fayon de penfer, commwt

peuv ent-ils étre dogmat iques dans k ur maoiere d'agir ?

Ce feul poine qu'ils accordenr, e rt un

écue.il

ou vien–

neo t fe brifcr toUtes leurs vaines fubtilités.

Pyrrhon agilToit quelqucfois

en

GonCéqueqce de fon

principe . PerCuadé qu'il n' y aVQit rien de cenain,

iI

pon oit fon indifférence en certaines chofes auffi loin

que ron fy fH:me le compor.toit. O.n dit de luí qu',.l n'ai–

moit ricn,

& .

oe fe tacholt de rlen; que quand

11

pilr-–

loit,

iI

[e '11ettoie peu en peine fi

011

I'écoutoir OU fi

on ne l' éeoutoie pas;

&

qu' e¡Jcore que fes auditeurs

s'cn alblTent il ne lai{1oie

pas

de coulinuer. Si tous

les hommes 'élOiem de ce cara.:tere, que deviendroit

alors par'11i eUK la Cociété? O üi , rien ne lui

C;11

plus

cootraire que ce

doute.

En eITet, il détruie

&

renver–

fe touees les lois , foie naturelles, [oie divines, 'foit hu–

maines; ¡¡ ouvre un va{le champ ¡¡ tous les deCordres,

&

autorife les plus grands fQrfaits. De ce principe qu'¡¡

faue

dO/lter

de tout, ¡¡ s' enCuie qu' il e{l incertain s'il

y

a un que Cupremc , s' il y a unc religion, s'¡¡ y

a,

un

culre qui nous Coit néce(fairement commandé. De ce

principe qu'il fau e

dOl/ter

de eout, ¡¡ s'enCoit que tou–

ees les

a~ions

[ont indifférentes ,

&

que les gornes fa–

cfées qui COOl poCécs entre le bieo

&

le mal, entre le

vice

&

la verto, font renverfées.

O r qui

~e

voie cQmbien ces cOl)féquen,ces fon\ per–

nicieuCc;s a la Cociété?

J

ugez-en par Pyrrhon lui-meme,

qui voyant Anaxarque fon maitre eomQé

d~ns

un pré–

cipice, pa(fa outre, Cans daigner lui tendre la main pour

l'en retirer : Anaxarque qui élOie imbu des memes prin–

cipes , loin de I'en bUmer, parut lui en fa voir bon gré;

facritiant aiufi

a

I'honneor de fon

fy{l~me,

le reacnti–

men r qu'il devoie avoir cOlme ron diCciple,

Ce

d""te

n'e{l pas moins comraire a la recherche de

la vérité ; car ce

doute

une fois admis, tous les che–

mins pour arriver

a

la

v ~rité

fooe fe. més, on ne peur

s'a(fOrer d'auc;une regle de vérité : rieo ne paroit affC"?

évident pour n'avoir pas beCoi,n de preuve ; ainfi dans

Eee abfurde [y{lcme il faudroit

rem.on

,eer ju[qu'a I'iofi–

ni, pour y trouver un principe fur I.equel on pat af–

feoir fa croyance.

Je

v~is

plus loio: ce

doltte

crt extra,vagaoe,

&

in–

digne d'un hQmme qui penfe ; quiconque s'y confor- ,

meroit dans la pratique, donDeroie affurémem des mar –

qu.es

de la plus infigne folie: car cet hommc

do"te–

rOtt

s'il faue manger pour vivre, s' il faue fuir quand

0 11,

en menacé d 'uQ danger preITaD[: eoue doie lui pa–

H?!rre

~galemene

avanlageux ou defavantageuI, C e

do,,-

T ome

V.

.

DOU

75

t e

c{l

ene ore indigne d' un homme qui penfe, il l'a–

bai(fc

au.de

(fous des betes memes; car en quoi I'hnm–

me diffcre-t-il des betes' fi ce n'e{l en ceq u'outre les im–

pre ffions des fens qu i lui viennent des obJets extérieurs ,

&

qui lui fom peut-etre communes avec elles, il a en–

Gore

la

faculté de juger

&

de vouloir: e'e{l le plus no–

ble exercice de fa raiCon, la plus noble opération de

fon efprit; or le

fc~pticiCrne

rend ces deux facultés inu–

tiles. L'homme ne jugerá point,

iI

s'c{l

faie une loi

de s'abllel1ir de juger,

&

ils appellent cela

épo'!"e.

Or

fi I'homme ne Juge point, vous concevez que fa vo–

lonté n'a plus aucun exerciq: , qu'eIlc demeure dans

l' ina&ion,

&

comme afloupie ou engourdie; car la

1'0-

lonté ne peut ríen choifir, que I'el!"it D'ait connu au–

paravant ce qu i

~rt

pon ou mauvais; or un eCprit im–

bu des príncipes pyrrhoniens e{l plongé dans les eéne–

pres. Mais il peue juger, dira-t-on , ql1'une chofe lui

paroi e plus aimable que les autres. Cela ne doie poine

eue dans leur fyflcme; néanmoins en leur accordane

ce point, qn ne Ic;ur accorde pas en meme tcms qu'il

'Y

ait une rairon fuffiCante pour fe déterminer

11

pour–

(iJivre un eel obje!; cette rairon ne (.1uroit etre que la

ferme eonviélion ou l' on feroir, qll'il faut fuivre les

objets les plus aimables.

Que conclure de tout ceci? finon qu'un pyrrhonien

réel

4

Parfaie parmi les hommes, e{l dan s 110rdre des

intelli~ences

un mon{lre qu'il faue plaindre, Le pyr–

rhoniJ"rne parfai e

e{l

le Mlire de la raiCon,

&

la pro–

dué1:ion la plus ridícule de I'.Cprie humain. On pour–

roir

do"ter

avec raifon s'¡¡ y a de verit.nbles Scepti<Jues;

quelques effortS 4U' ils faITent pour le faire croire aux

au tres, ¡¡ efl des momens,

&

ces momens font fré–

quens, ou il

C!e

leur

~{1

pas poffibile de fufpendre leur

jugemen¡ ; ils reviennent

a

la condi/ion des au tres hom–

mes ; ils

Ce

fyrprenn cnt

it

touS momens, auffi décid6s

que les plus fiers dogmatiques; témoin Pyrrhon lui–

mé:me, qui fe fftcha Ull jour contre fa freur, parce

qu 'il avoi t été contraint d'acheter les chofes dont el–

le eut beCoin pour offrir un Cacrifice. Quelqu' un lui

remOlltra que Ion chagrin ne s'accordoie pus avec I'in–

dolence dont il faiCoit profeffion . PenCez-vous, répon–

dit-il,

qu~

je veuille meme en pratique pour une fem–

me cctte venu? N'allez pas vous imaginer qu'i l vou–

loie dire qu'il ne

renon~oir

pas

a

l' amour, ce n' éroit

poim ra penfée;

iI

vouloie dire que toutes forte s de

fUJets ne méríroient pos I'exerciee de Con dogme, de

ne Ce facher de rien.

Voyez

P

y

~

R H

o

N

t

S M E ,

S

e

E–

PT I QUE .

D o

U TE (

13

el/eJ-lettfeJ

)

figure de rhé!orique par

/aquelle I'ora.eur paroit en Cufpens

&

indéterminé fur

ce qu'¡¡ doit dire

&

fai re; par exemple:

f2.!te

jera; -;e?

.aurat-jf! re&ourJ

ti

ce;

am;s 'lIte j'a; nlglig/J? YI1'adref ...

ferai-je

ti

&e"X 'lui m'ont a-pri{ent 01lbld?

JI

n'y a peut-eue jamais eu do;

doltte

li marqué

&

en meme tems li fingulier, que ce

commencem~nt

d'u–

ue !eme de T ibere au Cénae, rapporté par Tacite

li–

'lJre

l/l.

de f eJ annaleJ,

nO. 6.

Qzúd

!cribam 'lJobiJ

P .

C.

allt 'l"omodo f",ibam, artt 'l,,;d omn;no non

fcr;~

bam hoc

temp'~re,

di; me dete'l"' pejllJ. p.rdant, ,!uara

pertre 'lltotldle fentlo , ji feto.

Ce n'éeOlt pas néanmoins.

pour falre une figure de rhétorique de propos délibéré

que ce prince écrivoit de

la

{orte ; ces expreffions

é~

taient la vive image de la perple¡¡;ité , de I'agitation

&

des remards do ne il étoit alors troublé;

A deo,

ajoilre

I'hiltorien, ' dollt les paroles

&

la 'réflexiOIl '[ont troJ>

belles pour ue mériter pas place ici;

adeo fac;tJora at"–

'l"e flag itia fr,a ipji

1"°'!'"

in ft'pplicillm 'furterant :

nt'l"e frlif1ra prtejlantijJiml/J fapientite firmare (olitus

.jI,

S I 7I."J¡Cf..UD.A NT'll7l." TT7I..A NN07l.,,'llM MENTE S ,

POSSE .ASP l CI

L.ANI.AT'

llS ET l CT'llS,

'litando

11&

t orpora verb"ribl/J, ita ftev itia , libidine , maliJ confr'/tú

anim"J dilocer.tttr, · 0tippe Tiberi"m,

ajoa te-t-il,

non

f ort"n"

,

non folitl"ünCJ protegebant '1";n torment"

1'0-

floriJ f"a{que ;pfe pamaJ f ateretl/T. .

L e

doltte

&

In per–

plexilé

(OIH

incontellablemelH le langage de la nature

<;Jans une conCcience ainfi bou rrelée.

(G )

DO UTE U X, I NCE R T AIN, IRRE'SO–

L

U,

fynon.

( Gramm.) D 01lteIIX

ne

Ce

dit que des

chafes ;

;n&erta;n

Ce di! des chofes

&

des perfonnes .

ir–

rifol"

ne re dir que des p'erfonnes, il marque de 'plus

une difpofition habituell.e

&

eiem au caraélere. E'Xem–

pie: le (.1ge doit erre

;ncertfl;n

11

I'égard des opinions

d01ltettfeJ,

&

tle doie jamais erre

;rréfol1l

dans Ca con–

duite . On die d' un faie légeremenc avancé, qu'il efl:

dotlce1/':;

&

9'UD.

bonhe~r

légeremene efpéré, qu'il eft

",artflzn.

A1Ilfi

tn&erta}/t

fe rap'poree

¡¡

l' avenir,

&

dOllteHx

au pa([é ou au préfent .

(O)

K

2i

Deu-