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7'

E' U R S.

xxxv

pour ainíi dire l'exifrence de ces caufes, en déterminaht exaétement les effets

,qu 'elles peuvent produire,

&

en comparant ces eftets avec ceux que 1'expérience

nous découvre. TOllte hypothHe dénuée d 'un tel fecours acqui ert rarement ce

degré de certitude, qll'on doir toujours cherchcr dans les Sciences naturelles,

&

qui néal'lmoins fe truove íi peu dans ces conjeétures frivoles qu'on honore du

'nom de Syíl:emes . S'il ne pouvoit

y

en avoir que de cette efpece, le principal

mérite du Phyl.icien feroit,

a

proprement parler, d'avoir l'efprit de Syíl:eme,

&

de n'en faire jamais . A l'égard de 1'ufage des

Sy.íl

:emes dans les autres Sciences,

mille expériences prouvent combien il efr dangereux.

La Phyfique eíl: donc uniquemcnt bornée aux obfervatiollS

&

aux calculs; la

Médeeine a 1'hiíl:oire du corps hUl1lain, de fes maladies,

&

de leurs remedes;

l'Hiíl:oire Naturelle

a

la defcription détailIée des végétaux, des anil1laux,

&

des

minéraux; la Chimie

a

la compofition

&-

a· la décompofition expérimentale des

corps ; en un mot toutes les Seiences, renfermées dans les faits autant qui leur

eíl: poffible ,

&

dans les conséquences CJ,u'on en peut déduire, n'aceordent riep

a

l'opinion, que quand elles y font foreees. ]e ne parle point de la Géol1létrie,

de

l'

Afitonomie,

&

de la ,Méchanique, defi.inées par leur nature

a

aller toújours

en fe perfeaionnant de plus en plus.

On abufe des meilleurs chofes. Cet efprit philofophique, fi

a

la mode au–

jourd'hui, qui veut tout voir

&

ne ricn fuppofer, s'eíl: répandu jufque dans les

Belles-Lettres; on prétend meme qu'il eíl: nuifible

a

leur progres,

&

il eíl: dif–

ficile de fe le diffimuler. Notre fiecle porté

a

la eombinaifon

&

a

1'analyfe, fem–

ble vouloir int1'oduire les difcuffions froides

&

didaaiques dans les chofes de fen–

timent. Ce fl'eíl: pas que les paffions

&

le gout n'ayent u,ne Logique qui leur

appartient: mais cette Logique a des príneipes tout diftérens de ceux de la Lo–

gique ordinaire: ee font ces príncipes qu'il faut démeler en nous,

&

e'eíl:, il

faut l'avoüer, dequoi une Philofophie eommune eíl: peu capable. Livrée tout

entiere

a

1'examen des pereeptions tranquilles de l'ame, il lui eíl: bien plus

fa~

eile d 'en démeIer les nuanees que eeHes de nos paffions, ou en $énéral des fen–

timens vifs qui nous afteéient.

H~

eomment eette efpece de tentimens ne [e–

roir-eHe Jllas diffieile

a

analy[er avee jufieffe? Si d'un coté il faut fe livrer

a

eux

pour les connoltre, de l'autre, le tems Ol! l'ame en eíl: affeétée, eíl: celui ou elle

peut les étudier le moins.

11

faut pourtant convenir , que cet efprit de difeu1Iion

a cOntri1lUé

a

affranehir notre littérature de 1'admiration aveugle des Aneiens;

il nous a appris

a

n'efrimer en eux que les beautés que nons ferions contraints

d'admirer dans les Modernes . Mais e'eíl: peut-etre auffi

a

la meme fource que

nous devons je ne fais quelle Métaphyfique du ca:'ur, qui s'eíl: emparée de nos

théatres

j'

s'{l

ne faIloit pas J'en bannir entierement, eneore moins falloit-il 1'y

lailrer rcgner . Cette anatomie de l'ame s'eíl: glifsée jufque dans nos eonverfa–

tions; on y differte, on n'y parle plus;

&

nos fociétés ont perdu leurs prinei–

paux agrémens, la ehaleur

& '

la gaieté.

Ne toyons done pas étonnés que nos Ouvrages d'efprit foient en général in–

férieurs

a

eeux du {¡eele préeédent. On peut meme en trouver la raiíon daos

les

e~orts

que nous faifolls pour furpaffer nos prédéceíIeurs. Le {l:out

&

l'art

d 'écnre

font

en

pcu de tems

des progres rapides, des qu'une fois la véritable.

ro~te

eíl: ouverte :

11 ,

peine un gra!,ld .gé?-ie a-t-il entrevú le beau, qu'il

1'apper~

~Olt

dans toure ron etendue;

&

1

ImltatIOn de la belle Nature [emJ)le b0rnee a

de eertaines limiEes qu'une génération, ou deux tout au plus, out bien-tot at–

teintes: il ne reíl:e

a

fa .génération [ui,vante que d'imiter: mais elle ne

[<;

contente,

pas.

de ee partage ; . l:s ric,hefles <J,u'eUe a aoquifes al1torifent le defir de les ac–

erOItre; elle veut aJouteF

a

ee .qu elle a reyu,

&

manque le but en cherehanr

a

le p.ffer: On a donc tout

a

la fois plus de príncipes pour bien juger, un plus

g:-and . fond, de

l~mieres~.

plus de bons juges,

8;

moíns. de bons Ouvrages; on ne

dlt pomt d un Llvre qu

11

ea bon, rpalS que e ea

le

Llvre d'un homme d'efprit ,

C'eíl: ain{i que le fieele de Démétrius de Phalere a [uceédé immédiatement

a

ee–

de Démofihene, le fiecle de Lueain

&

de Séneque

a

eelui de Cieéron

&

de

Virgile ,

&

I

le norre

a

eelui de Lonis

XIV.

.

Je ne parle iei que du fieele en général: eal' je fuis bien éloigné de faire la

[~tyre

de quelques hommes d'un mérite rare avee qui nous vivons. La eonfritu–

tl on phyfiqult du monde litteraire entralne, eomme eeHe du monde marérie1 des

révol~tions fOl:c~es,

dont il feroit auffi ínjufie de fe plaindre que du ehangem.ent

des [mfons. D ailleurs eomme nous devons au fieele de Pline les ouvrages adl;rma–

bles de Quintilien

&

de. Tacire, que la génération précédente n'auroit

peut-e~re

E

2,

pas