DISCOURS PRELIMINAIRE
finit par les traiter de plagiaires. Je laiífe.
a
ceux qui trouvent tout
d~ns
.les ou–
vrages des Anciens, le
plaifi~
de
déco~vnr
dans ces
ouv~ages
la gravltatJOn des
planetes , :luand elle n'y ferOlt pas; malS en fuppofallt meme
~ue
les Grecs cn
ayent eu
1
idée, ce qui n'é toit chez eux q?-'un
fyih~l11e
hafarde
&
romanefq~e,
dl:
devenu une démonil:ration dans les ma1l1S de Newton: cette démonil:ratlOn
qui n'appartient gu'a lui fait le mérite réel de fa,
découve~te;
&
l'~ttra~i(:>l1
fans
un tel appui ferOlt une hypothefe comme tant d aun·es. SI
quelq~
Ecnvalll .cé–
lebre s'avieoit de prédire aujourd.'hui Fans
~UCUl1~
preuve qu'on parvlendra un
)o~r
a
faire de 1'or, nos defcendans aurOlent-ils drOlt fous ce pretexte de voulOlr
0-
ter la gloire duogrand ceuvre
a
un Chimiil:e qui en viendroit
a
bout? Et l'in–
vention des lunettes en appartiendroit-elle moins
a
fes
aute~rs,
quand. meme quel–
ques anciens n'auroient pas cru impoffible que nous étendlffions un Jour la fphe–
re de notre vue?
. D'all tres Savans croyent faire a Newton Un repr?che beaucoup plus
fond~
, en
-l'accWant d'avoir ramené dans la PhyGque les
qttfltttés OCC1tktes
des Scholail:lques
&
des anciens Philofophes. Mais les Savans dont n,?us parlons fOJ!t-ils bien fúrs
que ces deux mots, vuides de fens chez les fcholail:Jques,
&
dellinés
a
marquer
un Etre dont ils croyoient avoir l'iMe, fufrent autre chofe chez les anciells Phi–
lofophes que l'exprefIion modeil:e de leur ignorance
?
Newton
~ui
avoit étudié
la Nature, ne fe flattoit pas d'en favoir plus qu'ellx fur la cau1e premiere qui
produit les phénomenes; mais il n'employa
pas
le meme langage, pour ne pas
révolter .des contemporains qui n'auroient pas manqué
d'y
attacher une aun·e
idée que lui .
Il
fe contenta de prouver que les tourbillons de Defcartes ne pou–
voient rendre raifon du mouvement des planetes; que les phénomenes
&
les lois
de la Méchanique s'uniíroient pour les renverfer; qu 'il y a une force par laquel–
le les planetes tendent les unes vers les autres,
&
dont le principe nous
eff
en–
tierement inconnu.
Il
ne rejetta poillt l'
impulG.on;il fe borna
a
demander qu'on
s'en .fervit plus heureufement qu'on n'avoit fait jufqu'alors pour expliquer les
mouvemens des planetes: fes defirs n'ont point encore été remplis,
&
ne le fe–
ront peur-etre ae long-tems. Apres tout, quel mal auroit-il fait
a
la Philofophie,
en nous donnant lieu de penfer que la matiere peur avoir des propriétés que
nous ne lui foups;onnions pas,
&
en nous défabu[ant de la confiance ridieule
011
DOUS [ommes de les conno1tre toures?
A l'égard de la Métaphyfique,
il
parolr que Newton ne l'avoit pas entiere–
ment négligée.
Il
étoit trop grand Philofophe pour ne pas fentir qu'elle eil: la
bafe de 110S connoiífances,
&
qu'il faut chercher dans elle feule des notions net–
tes
&
exaétes de tout:
il
parolt meme par les ouvrages de ce profond Géome–
tre, qu'il étoit parvenu
a
[e faire de telles notions [ur les principaux objets qui
l'avoient occupé. Cependant, foit qu'il rut peu content lui-meme des progres
qu 'il avpit faits a d'autres égards dans la Métaphyfigue, foit qu'il crut difficile
de donner au gel1re humain des lumieres bien fatisfaifantes ou bien étendues fur
une fcience trop fouvent incertaine
&
contentieufe, foit enfin qu'il craigrilt qu'a
l'ombre de fon autorité on abusat de fa Métaphyfique, comme on avoit aoufé
d~
celle de Defcartes, pour foutenir des opinions dangereufes ou erronées, il s'ab–
ilint prefqu'abfolument d'en parler dans ceux de fes écrits qui font le plus con–
DUS;
&.011
ne peut guere apprendre ce qu'il penfoit fm les différens objets de
cette
fCle~ce,
que dans les ouvrages de fes difciples. Ainfi comme il n'a cawé
fur ce pomt aucune révolution, nous n0US abil:iendrons de le confidérer de ce
coté-la .
Ce que Newton n'avoit osé, ou n'auroit 'peut-et-re pú faire,
LOCKE
l'entreprit
&
l'exécura avec fucce s. On peut dire qu'il créa la Métaphyfique
a
peu-pres
c<;>mme.
~ewton
ayoit cré.é .la
P~yfique
. .
Il
cons;ut
q~e le~ abfrra~Hons
&
les que–
ilions ndlc.ules
qu
on aVOlt Jufqu alors agItées ,
&
qUl a'VOJent falt comme la fub–
france de la Philofophie, étoient la partie qu'il faHoit fur-tout profcrire.
11
cher–
cha ¿"ans ces abflraétions
&
dans l'abus des fignes les cauCeS principales de nos
€rreurs,
&
les y trouva. Pour connoitre notre ame, fes idées
&
fes affeélions
il
n'étudia point les livres, parce qu'ils l'auroient mal inil:ruit: il fe contenta
d~
defcendre
prof0.nd~ment
en lui-meme;
&
apres s'etre, pour ainfi dire, contem–
plé long-tems,
1I
~e
.lit dans fon Traité de l'entendement humain que préfenter
aux hommes le mlrOlr dans lequel il s'étoit vu. En un mot il réduifit la Mé–
taphyfique
a
ce qu'elIe d,?it etre en effet, la Phyfique expérimentale de l'ame ;
~fpece ~éPhY[l"que ~res-diffé~ent~
de celle des corps non-reule¡;nent par fon ob–
Jet, malS par la maruere de
1
envlfager, Dans celle-ci on peut découvrir,
&
on
dé-
/"