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DISCOURS PRELIMINAIRE
ordre que l'illuItre Chancelier d'Angleterre avoit peut-etre en vúe jufqu'a un eer–
taÍn point, lorfqu'il faifoit, eomme ille dit, le eens
&
le dénombrement des con–
noiíf.'1nces humaines . D'ailleurs, le plan de Bacon étant ditférent du notre,
&
les
Sciel1ces ayant fait depuis de grands progres, on ne doit pas etre furpri que nous
ayons pris que\quefois une route diflerente.
-
Ainli, outre les changémens que nous avons faits dans l'ol'dre de la difl:ribu–
tion géí1érale, & dOllt nous avons déja expofé les raifons, nous avons
a
certains
égards pouffé les divifions plus loin, fur-tout dans la partie de Mathématique
&
de Phylique particulicre; d'un aut1:e coté, nous nous fommes abfl:enus d 'étendre
au meme point que lui,
la
divifion de certaines Sciences dont
il
fuit jufqu'aux
derniers rameaux. Ces rameaux gui doivent proprement entrer dans le corps de
notre Encyclopédie, n'auroient fait,
a
ce que nous croyons, que charger alfez
inurilement le Syfl:eme général . On trouvera immédiatement apres notJ'e Arbre
encyclopédique celui du Philofophe Anglois
i
c'eIt
le moyen le plus court
&
le
plus facHe de faire difl:inguer ce qui nouS appartient d'avec ce que nous avons
emprunté de lui.
Au Chal1celier Bacon fuccéda l'illufue DESCARTES. Cet homme rare dont la
fortune a tant varié en moins d'un fieele, avoit tout ce qu'il falloit pour chan–
ger la [,lce de la Philofophie; une imagination forte, un efprit tres-conféquent ,
<les connoiflances puifées dans lui-méme plus que dans les Livl'es, beaucoup de
courage pour combattre les préjugés les plus généralcment refus,
&
aucune ef–
pece de dépendance qui le [orfat
a
les ménager. Auffi éprouva-t-il de fon vi–
vant meme ce qui arrive pou!' l'ordinaire
a
tout homme qui prend un afcendant
trap marqué fur les autres.
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fit quelques entboufiafl:es,
&
eut beaucoup d 'enne–
mis . Soit qu'il connut fa nation ou qu'il s'en défiat feuIement,
il
s'étoit refugié
dans un pays entierement libre pour y méditer plus
a
fon aife. Quoiqu'il pensat
beaucoup moins
a
faire des difciples qu'i\ les mériter, la perfécution aIla le cher–
cher dans fa retraite;
&
la vie cachée qu'il menoit ne put l'y fouftraire. Mal.
gré toute la fagacjté qu'il avoit employée pour prouvel' l'exifrence de Dieu,
il
fut accufé de la nier par des MiniHres quí peut-etre
ne
la croyoient pas. Tour–
menté
&
calomnié par des étrangers,
8[
aílez mal accueilli de fes,compatriotes,
il alla mourir en Suede, bien éloigné fans doure de s'attendre au fucces brillant
que fes opinioos auroient un jour .
•
On peut confidérer Defcartes comme Géométre ou comme Pbilofophe. Les
Mathématiques, dont
il
femble avoir fait affez peu de cas, font néanmoins au–
jourd'hui la partie la plus folide
&
la moios contefrée de fa gloire. L'Algebre créée
en quelgue maniere par les Italiens,
&
prodigieufement augmentée par notre
il–
luItre VIETE, a refu entre les mains de Defcanes de nouveaux accroiífeIl}ens.
Un
des plus confidérables efl: fa méthode des Indéterminées, artífice
tres-in~~oieux
&
tres-fubtil, qu'on a
fU
appliquer depuis
a
un grand nombre de rechercbes. Mais
ce qui a fur-tout immortalifé le nom de ce grand homme, c'efr l'application qu'
il
a
fü
faire de
l'
Algebre
a
la Géom,étrie; idée des plus vaHes
&
des plus heu–
reufes que l'efprit humain ait jamaís eues,
&
quí fera toújonrs la dé des plus
profondes recherches, non-feulement dans la Géométrie fublime, mais dans tou–
tes les Sciences phyfico-mathématiques.
Comme Philofophe, il a peut-etre été auffi grand, mais
il
n'a pas été
ti
heu–
reux. La Géométrie qui par la oature de fon objet doit toüjours gagner fans per..
dre, ne pouvoi:t manqué', étant maniéc par un auffi grand génie, de faire des
progres tres-fenfibles
&
apparens pour tout le monde. La Philofophie fe trouvoit
dans un état bien différent; tout y étoit
a
commeflcer:
&
que ne coutent point
les premiers pas en tout genre? le mérite de les faire difpenfe de celui d'en
fai–
re de grands. Si Defcartes qui n011S a ouvert la route, n'y a pas été
9uffi
loin
que fes Seétateurs le croyent, iI s'en faut beaucoup que les Sciences lui doivent
auffi peu que le prétendent fes adverfaires.
Sa
Méthode feule aUl'oit fuffi pour
le rendre immortel; fa Dioptlique efl: la plus grande
&
la plus belle applicatioo
qu'on eut faite encore de
la
Géométrie
a
la Phyfique; on voit enfin dans fes ou–
V'rages, meme les moias lús maintenant, briHer par-tout le génie inventeur. Si
on juge fans partialité ces Tourbillons dcvenus aujourd 'hui prefque ridicules,
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conviendra, j'ofe le dire, qu'on ne pouvoit alors imaginer mieux: les obferva–
tions afl:ronomiques qui out fervi
a
les détruire étoient encore imparfaites, ou peu
confl:atées; rien n'étoit plus narnrel que de fuppofer
1!l11
fluíde qui tranfportat les
planetes; il n'y avoit qu'une longue !uire de phénomenes, de raifonnemens
&
de
calculs,
&
pa-r eonféquent une 10Rgue fuite d'allftées, qui pút faire renoneer
a
une
..