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ABS

Les

~tre5

rc!els qui nous environnem (ont

m~s

&

t;ouvernc!s d'une maniere qui lI'e{l eonnue que de D ieu

feul & felon les loís qu'i1 luj

a

plíl d'ét:¡blir 10rfqu'i1

a créé J'uuiven . Ainli

D;o~

eí} un teCllle récl; mais

",,"'re

n'cn qu'un tcrme

m~t3phylique .

Quoiqu'un innrumem de mufiquc dom les cordes

lOut

lOuchées,

~

re,.:oive

en

lui-méme qu'une limpIe modi–

Jication, lorfqu'i l rend le ron du

rl

Ou celui dn

rol,

nous parlons de ces fons comme

ti

c'étoit :tutant d'c–

tres réels:

b.

c'cn :liOli ql4! llOUS parlolls de 1105 fOll–

~es,

de nos

inugillation~,

de nos idécs, de nos plaitirs.

de.

enforre que 110US habi¡ons ,

3 Il

vérité, un pays

réel & phylique: mais nous y parlons,

Ii

j'ofe le dire,

le lan¡;age du pays des

"bftr"E1io""

&

nous difol1s,

j'ai

f aim

,

la;

en'Vi~

1

j'

tri

pi:ié,

lni putr

,

j'

oi

d~ffiin,

&c.

commc nous dilons

j'a; t"le

montre.

Nous

[or1"'" ImiÍ',

110US

[omma ,,/f.E1ts ,

nous

[om–

mes agitls;

ainfi 110US [emons, &

plus ncus nous

appercevolls que 110US Centons ; & c'e{l ce qui nous f:lit

douncr des noms aux différemes efpece ' de fenf:l!ions

particulieres, & enfuite aux fenfatio11s générnle de

plai

r

}ir

&

de

do"",,r.

Mais il n'y

a

poim un

~tre

r<lel qui

foit le

plaijir,

11i un autre qui Coit la

doulsttr.

Pendam que d'un cÓté les hommes

ca

punition du

pécht' font

abandQnn~s

¡¡

l'ignoranlte , d'un autre c6tú

ils veuleut fnvoir

&

connoltre,

&

Ce

tlattent

d'~tre

par–

venus au bur quand ils n'ont fait qu'imaginor ejes noms,

<¡ui

¡¡

la vérité,

arr~tem

leur cllrio(i'té , mais q\li au

fond ne les éclairem point. Ne vaudrOlt-il pas mieux

dcmeurer en chemin que de s'égarer? I'erreur efl pire

qlje l'ig[1orance: celle-ci nous lalOe tels qne nous

Com–

mes;

{j

elle ne nOU5 dODlle rien , du moins elle ne npu5

fait rien perdre; au lieu qlJe I'erreur Cédllit l'cCprit, é–

leim les lumieres naturelles , & influe

Cue

la Gonduite.

L es Poctes om amufé l'imagination en réa lif.1nt des

lermes ap{lraits; le pcuplc payen a ét¿ trompé: mais

Platon luicmeme qui bannilJ'oit les Poeles ele [.1 répu–

blique, n'a-t-i1 pas été féduit par des idies qui n'd oi–

em

que des

nbftrnE1io"s

de Con efprit ? Les PhlloCophes,

les

M

étaphyliciens , & ti je I'ofe dire, les Géometres

mc!me ont été féeluits par des

"bjlraE1io"s;

les UDS par

!les formes

fubn~nticlles ,

par des vertus occultes; Ics

:lUtres par des privatiollS, ou par des auraétions. L e

point métaphytique, par exemple, n'en qu'une pure

ab–

jlraE1ion,

auffi-bien que la longueur . Je puis conlidérer

la diflance qu'il a d'une ville

ii

une autre, & n'etre OG–

cu_pé que de cette diflante; je puis contidlirer aum Je

terme d'ou je [nis parti,

&

celui ou je [uis aerivé ; je

puis de

me

me , par imitation & par compnraiCan, ne

ce~arder

une ligne droite que cOl11me le plus COurt che–

mm

\;ntre deux poims:

m~is

ees

deu 'poims ne fom

que les extrémités de la ligne mome; & par- une

ab–

jlraE1io"

de mon eCprit, je ne regacde ces e:nrémités

que comme

t .rmu ,

j'en fépare tour ce qui n'e{l pas

cela : l'un e{l te terme ou la Iigne commeoce; I'autre,

celui

mI

elle tinit. es termes Je les appelle

poi"ts,

&

je n'attache

a

ce concept que l'idée précife

óe

trrm,;

j'en écarte toute autre idlOe : il n'y a ici ni folidité, lIi

lougueur, ni profoodeur; 11 n'y

a

que l'idée nbflraite

de

lerme .

Les noms des objets réels font les premiers noms;

ce fom, pour ainli dire, les ainés d'entre les 110ms: les

autres qui o'énonceut que des coucepts de notre eCprit,

ne fOl1t noms que par imitation, par adoption; ce fom

les

noms de nos concepts métnphyliques: ain(i les noms

des objets réels, comme

foletl, Irll1e , terrc,

pourroiem

~tre

appcllés

nomI

ph)'ji,l'tcs,

&

les autres ,

lIQmI

wlta–

phyji,/rUJ .

Les Iloms phyfiques fervent done

a

faire cmendre

que nous parlons d'obje¡s réels ,

~u

Ucu qu'un llom

métaphylique marque que 110US ne parlo

ros

qGe de quel–

que

con~ept

panicu líer de notre efprit. Or comme lorf–

que

oou~

difons

le joleil, la 'e,.re, la mer, cet hom–

"U,

ct

cl,uvII/, cete. pie"re,

&c. notre propre expéricn–

ce

&

le concours des motifs les plus légitimes nous per–

fuadent qu'il

y

a húrs de nous un objet réel qui ell

[0-

/til,

un amre qui en

een'"

&c. & qOe

Ii

ces

obje~

"'c!toiem point réels, nos peres n'auroient jamais iuven–

ces

noms, & nous ne les auriollS pas adoplés: de

meme lorfqu'on dit

la ?latltre , la ¡orerme, le bo

"h.ur

la

~,ie,

la ¡;l11tl

,

la maladi" la morf,

&c,

les homme;

'\Iulgaire~

croyem par imitatioll qu'il y a 1I11ffi ind':pcn–

<!amment de leur maniere de penCcr , Je ne fais quel

e–

tre qui en la

"atllr.;

uo autre, qui en la

¡ orelme,

OU

le

ho"h",r ,

Oll la

vi.,

ou la

mort,

&c. car ils n'ima–

ginent P3$ que tops les

homm~s

pui«:ent dire la

"ah/re

la fortl"",

la

vi.,

la,

mort

,

&

qu'H n'y ait

~s

hor;

ABS

de leur e(prit une (orte

d'~tre r~el

qui Coit In nature,

la fonuDe,

& e.

comme li nous oc pouvion

:l

oir de

concept ni des imagination ,f.'lDS qu'il

y

eut de obJets

réels qui en fulJ'cm l'eumplaire.

A

la véril¿ nous ne pouyon avoir de ces eoncepts

ii

moins que quelque choCe de réc1 ne noO& donne

hcu

de nous les fonner: mais le mm qui exprime le coI\–

cept, n'a pas hors de nous un exemplaire propre. Nous

avons v

Q

de I'or, & nous aVOD obCcrvé des moma–

gnes; (i ces deux rapréCéClt!!tions nous donncnt liet: de–

nous

form.cr

l'idée d'une mOl1tagne d'or, il nc s'enfuit

nullemem de ceue image qu'jJ y ait une p:treille mon–

!agne . Un vailfeau fe trouve

arr~té

en plaine mer par

quelque banc de Cable inconnu aUl:: Matelots , ils ima–

~incm

que c'ell un perir poilJ'on qui les

arr~te .

e[te

IInagiuation ne donne aUClllle réalité au prétendu pent

poi/ron, & n

emp~che

ras que tOUt ce que les anciens

om cru du

remora

ne Coit une fable, comme ce qu'ils

[e fom imaginés du

phlnix,

&

ce qu'ils om penCé du

fPhynx,

de la

ehimue,

& du cheval

P lgafe

. Les per–

-{ounes fenfées

om

de

la

peine

iI

croire qu'j\ ait eu des

hommcs alJ'e1. dérai[onuables pour réaliCer leurs

propre~

abftraE1ions:

mais entre autres e. emples, on peut

le~

rcnvoyer

~

¡'hifloire de

V

nlentin hérétiarque du fecond

/iecle da I'Eglife : c'étoit un Philofophe Platoniciell qui

s'éaarta de la limplicité de la foi,

&

qui ima¡pn:t des

Cl'ons ,

c'e{l-a-dice des ctres abllraits, qu'il rofahfoit; lo

filmee,

la

vlriel, I'i"e./Iigon"

,

le

lirop:ator,

ou

pri,,';p• .

Il

commcll!j:a

3

enCei!íner fe erreuis en Egyptc, pal:

fa cnCuite 3 R ome ou il

[e

tit des difciples appdlés

1/".

I~ntiniens.

Tertullien <!crivit COIItCC

ces

hé...

!tiques .

Voya. l'hifloire de l'Egli(e.

Ainfi de les premicrs lem

les

abftrllE1io"I

om donué lien

a

des difputes, qui , pour

Clre frivoles, n'eo om poim été moins vives.

Au rene

fi

I'on vouloit évitcr les termes abflraits, 011

[eroit obligé d'avoir recour

iI

des ciraon locutiaus

& i

des périphrafes qui énerveroiem le difeours. D 'aillellrs

ces termes

fixcm

l'eCprit;

ils

nous ferveot

iI

meme de

l'ordre & de la précifion dans nos

pel~Cées ;

ils donncnt

plus de grace & de force

RU

diCcours; ils le rendent

plus vif, plus ferré, & plus éllergique: mais

00

doit

en conooltre la jufle valeur. L es

abftraE1:o",

[úor

daDs le di 'fours oe que certaius lignes fom en A–

rithmétique, en Algebre

&

eu Anrou'omic: mais qualld

011 n'a pas ¡'attention de les apprécier, de ne

le

don–

Der & de ne les prendre que pOllr

c~

qu' Iles valem,

elles écnrtem l'eCprit de la réalité des chofes, & dc–

viennellt ainti la iource de bien des errcues.

Je voudrois done que dans le flyle didaé1:ique, c'c{l–

a-dire 10rC<Ju'il s'agit d'enCeigner, on uf:lt avec benu–

coup de Olrconfpeé!:ioD des termes abnraits

&

des ex–

preffions tigurées : .par exemple, Je ne voudrois pas que

l'on dit en L ogique

"idle renferme,

ni 10rCquc 1'011

juge ou compare des idées, qu'on

les

Imie ,

ou qu'oll

les

(lpar.;

cae

idle

n'etl qu'un terme abflrair. On dit

3UIÍJ

que

le fujet aetire a [oi /'aetribltl,

co

110

Com-ti

que

d~s

mélaphores qui n'amuCem que I'imnginntion.

Je n'aime pas non plus que I'on diCe en grammaire que

le verbe gouverue, veut, demande, tégit,

&c.

Voyez

R ÉGIME .

eF)

A

B S

T RA

1

RE, v. aét . c'en faire une abnraétion;

c'en ne conlidérer qu'un attribut QU une propriété de

quelque erre, fans faire auention aux autres attributs 0\1

qualitc.'s; par exemple, quand on ne conildere dans le

corps que l'c!tendue , ou qu'on ne fait attennon qu'iI a

quantiré ou au nombre,

Ce verbe n'e{l pas ulité en tous les tems, ni meme

en toutes les pcrlOnnes du préCcm; on dit Ceu lemem

j'

akftrais , tll abftraitI, il abftrait:

mais au licu de dire

"01'"

abftraions ,

&

e.

on dit

"OIU

¡aif"nI abjlraE1ion .

Le parfait

&

le prétérit limpie ne Com pas ulités, '

mais on dit

j'ai abftroit , tu

as

abftraie,

&c.

j'

avoi, ab–

flraje ,

&c.

j'erlJ abflrait ,

&c.

Le préfcm du fubjonétif n'e{l poim en uCage;

011

dit

j'abflrairoiI ,

&c.

on dit auffi quej'aie

abflrlllt,

&c.

(F)

As

TRAIT ,

abftrait.,

adjeét~

participe: jI fe dit de,

pprCollnes & des chofes.

V

n cfprir

rbflraie,

c'cn un

eCpr;t in3ttcmif , occupé uniquenwm de fes

ropr~s

pen–

[¿es, qui ne pellCc 3 rien de ce qu'on lui dlt .

~

Auteur,

un Géometre, Com fouvent

abftrailJ.

Une Ilouvclle paf–

(ion rend

"bflrait:

' ainli nos propres idées nous rendcnt

abftraifJ;

au lien que

diflraie

fe dit de celu; qui

a

I'oc–

calion de quelque nouvcl objet cxt¿rieur, détournc [00

atremion de

la

perCoone

a

qui il I'avoit d'abord donllée,

ou

¡¡

qni il devolt la donner . On Ce fen all<.'1. iodiffé–

remm.:nt de ces denx mots eo plulieurs rencontres.

/lb,

ftra¡e

marque une plus grande inattention que

díjlrait.

11