A MADAME DU CHATELET.
9.
~ui-contemple de loin les ·mort~ls insensés,
, De leur joug·volontáire esclaves empressés,
Jnqniets, ·_incertains du' chemin qu'il f~ut suivre,
Sans penser, san,s joui~ ,-ig1~orant l'art de' vivre,
Da.nsl'agitatíon consumant leurs beaux jours,
Poursuivant la ·fortnne, et rampan
t
da_ns'les cours
!
O vanité .de l'h0mme
!
o
faibless·e !,
o
misere !
Je n'ajouterai rien
a
cette )ongue épitre tou–
chant
l~
tragédie que j'ai l'honneur de vous dédie_r.:
Comw,ent en parler, madáme, apres avoir parlé
de vous? Tout ce que je pnis dire, c'est que je l'ai
composéé dans votre maison et sous vos yeu~! J'ai
voulu la rendre moins indigne de vous, y mettant
-de
la nouveauté, de la vérité ·et de la vertu. J'ai
essayé de pei~dre
(_1)
ce · sentiment généreux,
cette humanité' cette 'grandeur d'ame qui fait le
bien et quj ,pardonne le mal; ces séntiments tant
recommandés par les,sages de l'antiquité, et épurés
dans .rtotre, religion; ces vraies lois de la nature,
Despicere unde queas alios, passimque videre
Errare, atque ,;;iam palanteis qucerere vitce,
Certare ingenio, contendere nobilitate;
Noctes atque dies niti prcestante lábore,
Ad
summas emergere opes, rerumque potiri.
O
miseras hominu1:1' mentes!
ó
pectora cceca-!
(1)
Tout cela n'était pas un vain compliment, comn~e la plupart
des éphres·dédicatoíres. L'auteur passa en effet vingt ans de sa vie
a
c!!ltiver, avec cette dame illustre , les belles-'lettres et la philo–
sophie; et tant qu'elle vécut,_il ~efusa constamment de venir au–
pres d'un soµverain qui le demandait, comme on le voü p~r plu-·
sie1.1rs lettres.insérées dans cette collection.