LIVRE QUARANTE
ET
UNIEME.
assistants, car jurcr obéissancc au ponlife pri–
sonnier,
a
quelques pas du palais de l'Empercur
qui le lennit en captivité, pouvait paraitre étran–
gement audaeieux.
JI
en est toujours ainsi dans
les asscmblécs: tout ce qui louche indirectemcnt
au sentiment secrct qu'ellcs éprouvcnt, surlout
lorsque ce senliment est comprimé, les fait trcs–
.aillir. On se retira ému, surpris de ce qu'on
avait scnti, et tout hommc cxpérimenté qui au–
rait vu cette assembléc n'aurait pas nrnnqué de
prévoir qu'ellc allait éehappcr
n
ccux qui prétcn–
daient la mcncr, au gom•crnement, et 1 ellc–
meme.
Napoléon, informé par quelques avis de la
maniere dont les choses s'élaient passécs, voulut
eonnaitre le discours de M. de Boulogne ainsi
que le sermcnt prcté, se plaignit vivcment de les
avoir ignorés, ce qui atlcstait chez lui et chcz
ses ministres l'inattention de gens étrangcrs 1 la
conduite des assemblécs délibérantes, répri–
manda lout le monde d'unc incurie dont il était
le plus coupablc, gourmanda particulicrcmcnt le
cardinal Fcseh, qu'il rcspcclait fort pcu, et clont
il
ne pouvait
prcndrc au séricux ni le savoir, ni
la vertu , ni la gravité, et n'écoula que
M.
Du–
voisin, qui lui cxpliqua )'origine et le scns de ce
scrmcnt établi en 11í64, immédialemcnt apres le
concile deTrente, pour répondreaux proteslanls
par une formule solcnnellc d'adhésion 1 l'Église
romainc. On acheva de le calmcr en lui démon–
trant qu'a
la
veille d'unc décision qui pouvait
retranchcr quelque chosc de l'aulorité du saint–
siégc, il fallait que l'Églisc de Francc, en faisant
acle d'indépendancc, fit acle aussi de fidélilé,
pour n'Ctrc ni soup¡;onnéc, ni calomniéc, ni in–
firméc dans son aulorité moralc.
Napoléon, quoiquc apaisé, ful des ce momcnt
un pcu moins coufiant daos le résultat du con–
cilc. 11 voulut que la dircction de l'asscmbléc fUt
confiée i1des mainssur lcsquelles il pt\t complcr,
et il décida par décret que cellc dircction serait
remise
a
un bureou composé du président , de
lrois prélals IÍommés par le concile, et des dcux
ministres des cultcs de France et d'llalie,
MM. Bigotdc Préamencu et llovara. 11 confirma
daos ce décret la résolulion qui avait déféré la
présidence au cardinal Fcsch.
On avait en outre préparé un mcssnge, rédigé
pnr
M.
Daunou en un langagc aussi lilléraire
qu'impolitiquc, fort remanié por Napoléon, mais
.pas asscz pour le rcndre comcnablc, message
daosJeque! loute l'histoirc du conflit avcc !lome
élait longuemcnt el durcmeot cxposée, et la
qucstion
a
résoudre préscntée d'une maniere
bcaucoup trop impérativc. C'cst le jcudi 20 que le
décrct régfont la tenue de l'asscmblée et le mcs–
sagc furcnt apporlés au concilc. Les deux jours
éconlés entre le lundi et le jeudi s'élaient passés
en secretes cntrcvucs, infi nimcnt plusactives du
cólé des méconlcnts que du cótédcsadhércntsau
pouvoir. La liberté, quand elle <iébute quclque
part, trouve toujours le pouvoir novice, gauche,
irritable parce qu'il est gauche, et luí cause au–
lant de désagrément que de trouble. On devait
ici en fairc une nouvelle éprcuvc, et s'irrilcr
maladroilcmcnt contre ce qu'on ne savail pas
prévenir.
Le concile tint doneune séancc générale le 20. ,
Les clcux ministres transportés
a
Nolre-Damc
dans les voitures .de la cour , et cscortés de la
garde impériale, y arrivercnt en grande pompe,
.ayant en main le décrct sur la formation du
bu~
reau, et le mcssage. lis prircnt place 1 cólé du
président, et Jurcnt d'abord le décret, chacun
daos sa langue. Cettc autorilé,qui rappclait eelle
que les cmpereurs romains avaicnt cxcrcéc au–
pres des premicrs conciles, lorsque le christia–
nismcn'avait point encere instiluésongouverne–
mcnl et t1·aité d'égal
¡,
égal avcc les maitrcs de la
tcrrc~
causa une scnsation asscz vive, nrnis qui
ne se manifcsta que sur les visagcs.
011
laissa le
modcrne César confirmer le présidcnl qu'on s'é–
lait donné, élablir ses deux commissaircs impé–
riaux a droitc et
il
gauchc du fauteuil présiden–
tiel, et on se mil 1' jctcr des noms dans une umc
pour désigner les lrois prélals qui dcvaient com–
plétcr le bureau. Dans une assembléc bien diri–
gée,les ''oix se sernicntréparticsendeux masscs,
!'une représcnlant l'opinion dominante, l'autre
représcnlant l'opinion cont1·aire, ce qui cst la
condition indispensable pour que toutc réunion
d'hommcs aboutissc au but pour lequel clic cst
formée. L'asscmblée n'étant pas mcme dirigée,
l'éparpillemcot des voix fut extreme. Sur une
ccnlainc de mcmbres présents,
j]
y
cut
a
peine
trente voix pour le candidat qui en obtint le
plus. Elles furcnt donnécs
n
l'archc1•équc de Ra–
venne, parvcnu
il
réunir ce nombre parce qu'on
voulait faire aux llalicns la polilcsse d'appeler
au burcau !'un de lcurs prélals. Apres luí,
i\I,
d'Aviau, archcvcque deBordcaux, ccclésias–
tiquc respectablc mais tres-pcu éelairé, et ne
prenanl aucun soin de cacher l'indignation que
Jui faisait éprouvcr la captivité du Saint-Pere,
en obtint vingl-scpt. M. l'archcvcque de Tours
(de Barral),
i\I.
l'évcque de Nantes (Duvoisin),