MOSCOU. -
mm1nnr.
1812.
;;03
eles boukts cnncmis, et se placcrent. au piccl eles
hautcurs conquiscs, hien com
1
nincus que les
Russes n'essayeraicnl pas ele les rrprcndrc. Nos
solclals,qui n'élaicnt gucre pourvus ele virrcs, se
mircnt au !Jirnc
;1
dévorcr ce qu'ils :l\'nient, et
se clélasscrent en se racontant les ho1·rcurs élon–
nanles que chneun d'cux avait vur.s. Napoléon
victoricux rcntra dans sa tente cntouré de ses
lieutcnnnts, les uns méeontcnts de ce qu'il n'n–
vnit pas foil, les nutres disant qu'on avait cu
rnison de s'cn tcnir au résultat obtcnu, que les
Husses apres tout étaient détruits. et que les
pol'lcs deMoscou étnienl ouvertcs. Mais pendant
cellc soiréc les témoignngcs de joic, d'ndmirn–
tion, qui n\
1
aicnt éclalé jadis
a
Austcrlitz,
a
léna,
11
Friccllancl, ne se fircnt pas enlcnclre clans la
lente clu conquérant.
Russcs et Fl'nncais couchCrcnt les uns
ii
cóté
des aulrcs sur le
~liamp
ele bataille. Au point du
jour, on ful témoin d'un spcctnclc horrible, et on
pul se fairc une icléc de l'épouvantablc sacrificc
cl'ctrcs humains qui avait été consommé la vcille.
Le clrnmp ele bataillc était couvert ele morts et
de motmrnts, commc jnmnis on ne l'nvnit
v1r.
Chose cruclle ;, dirc, nombre cffrayant ;, pro–
noncer, quatrc-vingt-dix mille hommes enviran,
e'est-ii·clire In population cntiere rl'une grande
cité, étaicnt étemlus sur la tcrrc, morts ou
hlcssés. Quinzc Uvingt millc chcl'nux rcnvcrsés
ou crrants, et poussant d'afl'reux hennissemcnts,
trois ou quatre ccnts voiturcs d'artillcrie démon–
técs, millc débris de lout gcnrc eomplétaicnt ce
spcclaclc,qui soulcvait lccreur,surtout cn appro–
chant des ravins, 0[1par une sorlc d'instinct les
blcssés s'étaicnt portés nfin de se mcttrc
á
l'abri
de nouveauxcoups.
U.,
ils étaicnt accumulés les
unssur les autres, sans distinction de nation.
Hcurcusement, si le palriotismc pcrmct <le
prononccr ce moL inhumain, hcurcuscmcnt le
pai·tage dansccttc liste funcbrc était fort inégal:
Nous comptions cnviron 9
i1
1
O mil le morts,
20
ou
21
mi/le blessés, c'csl-a-dirc
50
millc
hommcs hors de combat, et les Husscs, d'aprcs
leur avcu, pres de
60
mi lle 1 ! Nous avions t11é
tout ce qu'autrcfois nous prcnions par de sa–
vantcs rnnnreuvrcs. La foux de In morl
scmblait
ninsiavoir remplacé clans les mnins deNapoléon
l'rpéc mcrl'cilleusc quijndis désnrmait plus d'cn–
ncmis qu'elle n'cn détruisait. Ce qu'on ne croi–
rnit pas, si des documcnts authcntiqucs ne l'al-
tcstaicnt, nouEnvions c¡uarantc·scpt générnux et
trcnt-sept coloncls tués ou blcssés, les Russcs
ii
pcu presautant, pre11l'Cdcl'éncrgic que les chefs
al'aicnl déployéc des dcux cotés,
et
de la pclite
clislancc;, laqucllc 011 al'ait combatt.11. Apres cct
affrcux ducl, il nous rcstait cent millc hommcs,
car ce qui pouvait manqucr
ii
ce chifl're élait
remplacé par la division itnlicnnc Pino, ct.¡rnr la
clivisionDelaborde de lajcuncgardc, 1'1111cet l'au–
trcnrrivécs aprCslabatnille.Lcs Russcs
n'aur:1icnt
pns pu mctlrc cinqu:rntc millc hommcs en lignc,
nrnis ils étnicnt chcz cux, et nous étions
n
hui!.
ccnts licu'cs de notrc capitalc! lis fnisaicnt une
guerrc néccssairc, et nous faisions une gucrrc
d'ambition' Et
i1
chnquc pns en al'ant, quand
l'élou1·disscmcnt ele la gloirc lni>snit chc1, 11ous
place
¡,
la réílcxion, nous condamnions nu fond
du creur lechefcntrainant clont nous suivions la
fortunc éblouissanle !
Kutusof, mcntcur autantque rusé, sntisfoit <le
1ú!tre pas détruit, cut l':wclacc
<l'~crirc
l1
son
maitrc qu'il avait résisté loulc unejournéc :wx
nssnuts de l'nrméc frnngnisc, ct. lui nvait tné :rn–
tn11t d'homrncs qu'il en avnit pcl'du;que s'ilquil–
tait le champde bataille, ce n'était pas qu'il f1H
vaincu, mais c'cst
qu'il
prcnait
les
dcvnnts
pour
allcr couvrir Moscou. Plus qu'aucun l1ommc au
monde, il savait
it
qucl point on pcut mentir aux
passions, surtoul aux passions des pcuplcs pc11
éclairés, el cxccpté de se dirc victoricux,
il
osa
écrirc tout ce qui approchait le plus de ce mcn–
songe.
11
manda au gouvcrncur
de
l\loscou,
le
comtcHostopchin, destiné bientul
i1
une clTroya–
blc
immortalité,
qu'il
vcnnil.
de
lin cr
une
snn–
glantc bataillc polll' défcndrc 1\loscou, qu'il ét.nit
loinde l'avoir.pcrduc, qu'il nllnit en livrcr cl'au–
t.rcs cncorc, qu'il promcttait bien que l'cnncmi
n'cntrcrnit point dnns In ville sncrCc. mnis qu'il
était urgcnt ele lui cnvoycr tous les hornmcs ca–
pablcs de portcr les armes, Sllrlout les miliciens
de Moscou,<lont on avnit prornis
ªº
millc, et dont
il arnit
rc~u
15 millc nu plus.
JI
Ol'donnn In rc–
trailc pour le 8 scptcrnbrc au rnatin, en prcscri–
Yant de clispuler Mojnisk !out le lcmps néccssairc
pour évncucr les vivrcs, les munitions, les
blessés lranspo1·tablcs.
11
donna au g1'néral Mi–
loradovilch le cornmnndcmcnt de son arrierc–
gardc.
Nnpoléon,
qui
n'nvnit. pas les mCmcs raisons de
dissimulcr, cnr il étniL vicloricux d'unc mnniCrc
incontestable, éprouvait ccpcndant une sorle
d'cmlJarras :\ rncontcr son triomplic. Aulrcfois
il avait
it
annonccr po11r quclq11cs rnillc morts