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502

L!VRE QUARANTE-QUATR!EME.

plusicurs hcurcs de jou1', et bien qu'il ne s'olfrit

plus, commc deux fois dans la journéc, de

1110-

nreuvrc décisivc

n

cxécuter, on pouvait en nbor·

dant \'arméc russc une dcrniCrc fois, In droit.e

rn nvant, avcc une massc de troupes frnichcs, on

pouvait, disons-nous, la refoulcr vers la Mos–

kowo, el lui foire subir un vérilablc désast1·c.

Un le! résultat mérilait ccrtaincmcnt de nou–

vcaux sncrif1ccs, qucls qu'ils dusscnt Clre, car,

dcvant une vicloirc cornplétcmcnl dcstruclivc

poui· l'arméc russc, la conslancc d'Alcxandrc

cut proLablcmcnt fléchi. Mais pour cela

i1

fallait

foirc donncr lagardc impérialc loul enlicrc, la–

r¡ucllc complait enviran ·18 millc hornmcs d'in–

fontcric

et

de cavalcric, qui n'avaicnl pas

c.om–

lrnttu. 11

rcslait

a

gauchc dans la division

Dclzons, au centre dans les divisions Broussicr,

Morand et Gudin, 11 droilc dans la division Dcs–

saix, des troupes qui, quoiquc ayant déji1corn–

battu, élaicnt capablcs cncorc d'un grand clforl,

surlout s'il dcvait clrc décisif. Les troupes r¡ui

n'étaicnt qu

1

i1

dcmi fatiguécs auraicnt valu des

troupes fraichcs pour ce momcnt suprémc.

Quanl

¡,

la garde, clic cut fait des prodigcs, et

dcmandait

ii

les fairc. Napoléon, pour qui la

lrnuleur du solcil sur l'horizon était un motif

tout aussi prcssant que les instanccsde ses licu–

tcnanls, et pour ainsidirc un reproche, monta ;\

eheval afin d'examincr lui·méme le clrnmp de

Lalaillc. Le rhumc dont il était atteint l'incom–

modait fort, mais pas de maniére 1 paralyscr sa

puissanlc inlclligcnec. Ccpcndant leshorrcurs de

eetlc alfrcusc balaillc sans cxemplc encore poui·

Jui, quoiqu

1

il

en ct'1t vu

de bien

sangluntcs,

araicnt commc élonnéson génic. 11 ne s'élait pas

écoulé un instant sans qu:on vlnL lui annonccr

que c¡uclqucs-uns des prcmicrs officicrs de l'ar–

rnéc étaicnt frappés. C'étaicnt les généraux eL

officicrs supérieurs Plauzonnc, i\lonlbrun, Cau–

laincourL, Romcuf, Chastcl, Lnmbcrt, Compcre,

llcssiercs, Dumas, Canouville, tués; c'étaient le

trniréchal Davoust, les généraux Morand, Friant,

Compans, Happ, Bclliard, Nansouty, Grouchy,

Saint-Germain, Bruycrc, Pajol, Dcfrancc, Bo–

m1my,

Teste, Guillcminot, blessés griCvement.

L'opiniatreté des Husscs, quoiqu'cllc n'eut l'ien

cl'inattendu,

n\'ait

un

caraclCrc sinist1·e et ter–

rible, qui luí inspirail desérieuscs réflexions:car,

pour l'honneur de la nalurehumainc, il y a dans

le palriolismcrnincu mais ruricux, quclquc chose

qui imposcmémc i1l'agrcsscur leplusaudacicux.

Aussi Napoléon, dans ccl état d'irrésolution si

nouvean cl1ez lui, parut-il incxplicnlile

a

ceux

qui l'cnlouraient,

a

ce point qu'ils chcrchaicnt

¡,

se l'expliqucr en disont qu'il était maladc. Sans

s'occupcr de

~e

qu'ils pcnsaicnt, il parcourut au

galop la lignc des positions cnlevées, vit les

Russcs acculés

1

mais serrés en mnssc et immo–

bilcs, n'ofTrant nullc part une prise facilc, pou–

vant nénnmoins par un dcrnicr choc, donné

obliqucmcnt. etre rcjctés en désordre vcrs la

i\loskowa. Pourlant on ne savait, aprcs toul, si

ledéscspoir ne triomphcrail pasdes dix·huit milie

hommes

de

Ja garde, si par conséqucnt on ne

la

sacrificrait pas inutilcmcnl pour égórger qucl–

qucs millicrs d'cnncmis de.plus jet

a

cctlc dis–

lancc de sa base d'opéralion, ne pas gardcr cnlicr

le scul co1·ps qui ftit cncorc intact, parut

a

Na–

poléon une témérité <lonl les avantages ne corn–

pensaicnt pas le dangcr. Se lournant ve1·s ses

principaux officicrs: " Je ne fcrai pas démolir ma

gardc, lcur dil·il. Ahuil cents licues de France,

on ne risque pas sa dcrniCrc réscrrc'.

11

11

avnit

raison sansdoute;mais, enjusLifümt sn résolution

du momcnt, il condamnail ccltc gucrrc, et, pour

la dcuxicmc ou lroisicmc fois dcpuis lepassagc <lu

Niémcn, il cxpiait, par un cxccs de prudencc <¡ui

ne lui était pas ordinairc, la faulcde sa téméril.é.

En dépassanl la grande roul.c de Moscou, et en

s'approchant de Borodino, on apcrcevait Gorki,

scule position un pcu avancéc conscrvée par les

Husscs. Napoléon se demanda s'il fallait l'en–

lcrcr. 11 y

rcnon~a,

car le résultat n'cn valail pas

la peine.

.\u fond dn champ de balaillc, les Russes,

scrrés

en

masse, offraient une lnrge prisc au

canon, et scmblaient nous défier. " Puisqu'ils

en vculcntcncore, dit Napoléonavcc lacrucllc

fa–

rniliarilé du eharnp de bataillc, donncz-lcur-cn. "

11 prcscrivit de mctlrc en battcric lout ce qui

rcstail d'arlillcrie non cmployéc, et

a

partir de

ce rnorncnt'on fit agir pres de quatrc ccnls bou ·

ches

a

fcu. On tira ainsi pcndant plusicurs

heurcs sur les mosscs russcs, qui persistCrcnt.

3.

se tcnir en

lignc

sous cctle épouvantablc canon–

nade, pcrdant des millicrs d'hommes sans s'é–

branlcr. On tuait done au licu de fairc des pri–

sonnicrs

!

nous perdionsaussides hornmcs, mais

~crlai1~cment

pas le sixiCmc de

e~

que

nous

1mmol1ons.

Le soleil s'abaissa cnfin sur ccllc sccnc alrocc,

sans égale clans lesannalcs humaincs : la canon–

nadc finit par se ralcnlir succcssivcmcnt, et cha–

cun épuisé de fatigue s'cn alla prcndrc quclquc

rcpos. Nos généraux rnmcnCrcnt un pcu en ar–

rierc leurs divisions, de nrnnicrc

a

les garantir