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LIVRE QUAllANTE-QUATRIEME. •
débordcr l'ennemi, et recucillait eles informa–
tions, que la languc parléc par les Polonnis et la
moindrc clispnrition des hnbitnnts sur les routcs
lntéralcs, lui pcrmcttaicnt de se procurcr plus
fncilcrncnt.
J,c
princc Eugcnc occupait une scm–
blnblc position sur la gnuche, et marchait
a
clcux
ou trois licues de la grande routc, toujours un
pcuen avant rlu gros de l'arméc, nfinde déborrlcr
les Husscs.
11
était précédé par In ca\'nlcric du
général Grouchy.
Le quarticr générnl suivait nvec les pares d':1r–
tillcric et du génic, nvcc millc voitures d'éqni–
pagcs chargécs de vivrcs. Ces vincs
étaicnt
cJcs–
tinés
a
nourrir la gardc, que Napoléon ne voulait
pas habitucr
a
la nrnraudc, et
ii
fournir Insub–
sistancc de l'arméc clle-mcmclcjouro[1 il faudrait
se conecntrcr pour livrcr bataillc. Sauí le corps
de Davoust qui avait huit jours de rivrcs sur le
dos des soldats, et une réscrrc de trois ou quntrc
sur voiturcs, les autrcs corps dcvaicnt se nourrir
dans le pnys. On s'étnit
apcr~u,
en cfTct, que les
villngcs étaicnt moins dépourvus qu·on ne l'avait
supposé d'abord, et que sur les routcs lntérales
notammcnL ,
oU
les Husscs n'av:licnL pas cu le
tcmpsdc loutdélruirc, il rcstnit uuc asscz grande
massc de subsistanccs. C'était la rcssourcc réser–
véc au princc EugCnc sur la gauchc, au princc
Poniatowski sur la droilc.
L'ar111éc élait done débarrasséc d'unc partic
de ses eharrois. Elle ne portait en quantitc con–
sidérable que des munitions d'artilleric, et en
foil d'équi¡rnges de pont clic sélait restreintcaux
fcrs et aux outils nécessnircs pour jclcr des ponls
de chevnlcls. Sur ce platcau centl'al,
~ui
séparc
la llaltiquc de la 111cr Noirc, les ri1iercs, prcsquc
tout.csit
lcur nniss;rncc, étnicnt lentes et pcu
prorondcs,
d
pour les franchir,
011 11
1
avnit pas
besoin de lrainer des baleaux avcc soi. Sous le
rapport de la qunlité des hommcs, l'armcc étnit
rnmenéc
ii
ce <¡u'cllc avail complé de meillcur
dans ses rnngs. Elle avait pcrdu dcpuis Witebsk
c1wiron
'15
millc hornmes en divers comhats.
not¡¡mmcnt ¡, Smolensk et;, Valoutina; clic en
arnit bien perdu 10 millc par la marche. Elle
nvait laissé une division de la garde
a
Smolcnsk,
une division ilalicnnc, et la carnlc1·ic légCrc du
général Pajo! en obscrvation sur la routc de Wi–
tcbsk, et par loulcs ces causes elle étaiL réduilc
de
·J
75 mi lle hommcs
a
cnviron 11.5 mille. 11 est
vrai qu'on ne pouvait ricn voir de plus bcau.
Le tcmps élait d'unc ¡rnríaitc sérénilé : on rnar–
chait sur une largc et bellc route, bordéc de
plusieurs rangées de bouleaux,
u
trnvcrsderc1·1cs
plnincs, et, quoique !'esprit <les généraux rut
assombri, les soldals se laissaient guidcr super–
stilicusemcnt par l'étoilc de lcur chef. Le bruit
s'était déjit répandu qu'on allait
a
Moscou. - A
Moseou
!
eriaicnt les soldats,
a
Moscou !... et ils
suivnient Napoléon eommc aulrcíois les soldats
macédoniens suivaicut Alexandrc
ii
llabylone.
Le 28, on arriva
a
Wiasma, jolic ville asscz
pcupléc, travcrséc par une rivicrc dont les ponIs
éraient détruits. (Voir la carie n°55.)N'épargnant
pas plus les cités que les hameaux, les Husses
arnicnt mis le fcu
a
ccllc pauvrcvillcdcWiasma;
m:iis, suivnnt lcur coutume, ils l'avaicnt mis
a
1:-i
hntc et au dcrnicr momcnt. Aussi nos soldnls
parvinrcnt-ils
a
l'étcindre, et
11
sauverune partie
des maisons et des vivrcs. lis s'cmprcssCrcnt
égalcmcnt de rétablir les ponts. Les habitants
avaient lous pris la fuite, et l'on n'était rctcnu
ni pnr les égards de l'humanité, ni par ceux de
la poliliquc, dans la maniere de jouir du pays
conquis.Ons'étal.ilissait done d:ms ce qu'on avait
arraché nu fcu, comme dans un bien
a
soi, et
l'on en vivnit sans réscrvc, mCmc sans économic,
dcvnnt partir le lcn<lemain. Malhcurcuscment, si
on élllit prompt
a
se jcler au milicu des ílammes
pour arrCtcr lcur rnvngc, on parYcnait difficilc–
mcnt
h
s'cn 1·cndrc maitrc
a
cause
du
bois,
qui
est en llussic Ja maticrc de la plupart des con–
structions;
et
puis, c¡uand on avait réussi, les
soldats en roulant cuirc du pain dans les fours
1¡uc
chaquc nrnison rcnfcrmait, mcllaicnt par
1u'5ligcncc le fcu que les Husscs avaicnt mis par
c:ilcul, etqu'onaniit élcinl
par
besoin.Pourtnnt,
q11oiq11c avce peine et ¡, travcrs rnillc lrnsards,on
virail,
car !'industrie du soldat
fran~ais
égalail
soncourngc.
D'aprcs les b1·1<its recucillis 1 l'avant- gardc,
bruils vrais d'aillcurs
1
nous aurions dú rcncon–
lre1· les llusses 11 Wiasma, prcts
a
rcccvoir ecttc
terrible bataillc
a
laqucllc ils nvnicnt fini parsc
résoudf'c, et qu'ils élaient décidés
a
oeccptcr des
que le trrrain leu<' paf'ailrail farorablc, Mais les
Husscs, n·ayant pas
jug:é
cclui
de
Wiasma con–
vc1111ble, avaient reporté lcurs vucs sur cclui de
Czarcwo -Zaimitché, situé
!t
dcux journécs au
dcl11, lequcl derait opposer
a
l'assnillant de trr.s–
grnndcs diílicultés. 11 semblait que dcµuis que le
général Barelay de Tolly avait eoncédé aux pas–
sions deson armée la bataillc tant demandéc, on
íut moins impaticnt de Inlivrcr, et plus diílicilc
sur le choix du terrain, Ln multitudc, dans les
camps comme sur la place publique, est toujours
la mcmc : lni aceorder ce qu'ellc désire, est