Table of Contents Table of Contents
Previous Page  260 / 570 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 260 / 570 Next Page
Page Background

Lll'flE QUAflANTE-QUATRIEME.

avait pas un soldat qui ne ful cerlain de la faii·c

victorieusc.

Ces idées élaienl justes assurémcnt, et pour–

lant elles soulcvaicnLde fortcs objcctions. Aussi

Napoléon, qui voyait lout, qui savait louL, éprou–

vait·il unesorlcd'impaticncc

a

cnlcndre les pro–

pos d'hornmes sensés, ayant en grande pat·lie

raison, nrnis négligcant un cóté irnportant de

la

vérité. Condarnné dans ces pays dépcuplés par

la naturc et par la gucri·c 11 vivre en tCtc-u-tClc

avec ses licutcnanls,

y

meltant memo plus de

condesccndancc que de eoutumc

il

cause ele

l'anxiélé dont il les voyait saisis, il réponelait

a

lcurs opinions, dont il ne méconnaissait pas la

justcsse, par les grnves réflcxions qui suivcnt.

D'abord ces canlonnements, disaiL·il, n'élaient

passi facilcs

a

établirqu'on lepcnsaiL. Le Dniépcr

el la Dwina, qui dans le morncnL scmblaicnL eles

frontiercs, n'cn scraicut plus dans trois mois. La

gclée et la ncige en fcraicnt eles plaincs, sur lcs–

quclles une légcrc cavilé marqucrait !outau plus

le cours des ficuvcs. Que scraicnt alors quclqucs

poinls tcls que Dunabourg, Polotsk, Wilcbsk,

Smolensk, Orscha, Moliilcw, elislants de trente

ou quaranlc licues les uns des autrcs, et trcs–

légeremcnt forlifiés? Cornment défendrc, conlrc

des troupes que l'hiver scrait loin de paralyscr,

conlre la facilité du lrainage, une parcillc lignc

de cantonncmenls?

Et

ces soldats

fran~ais,

si

prompls par naturc, dcvcnus plus prompls cn–

corc par l'habitudc eles dcrnicrcs gucrrcs, com–

mcnt les rclenir, el lcur fairc prendre paliencc,

sous le plus triste climat du monde, pcndant

ncuf rnois enlicrs, dcpuis aout de la présenlc

annéc jusqu';\ juin de l'annéc suivnnte, sans Ctrc

rncmcassuré de les bien nourrir pcndant ce long

inlcrvalle de temps? Intcrromprc en aoút une

carnpaguc commcncée i1 la fi n de juin! ... Com–

mcnt lcur cxpliqucr une !elle timidité, commcnt

la fairc comprcndre

il

l'Europc? EL cclle-ci, ha–

biluéc 1 nos coups de foudrc, en nous voy:1nt

hésilcr, t:ilonncr, nous arrctcr aprcs quelqucs

combats, brillanIs mais sans résultat, n'allait-cllc

pas nous rcgarder d'un mil rnoins humblc, dou–

tcr de nous, et peut-clre s'agilcr sur nos dcr–

riercs? L'Espagne (dans laqucllc de f:\chcux évé–

ncmcnts

commcn~aicnt

il

se produirc, ainsi qu'on

le vcrra bicnlót), l'Espagnc n'allait-clle pns nous

crécr des crnbal'!'ns, qui, pcu inquiét<111ls lorsr¡uc

la grande arméc était placée

c~t1·c

l'Elbc cL Je

Rhin,devicndraicnt graves lors11u'ellcscrait nvcc

son chef confinéc pour un temps indétcrminé

cnlrc le Niémcn et le Ilorysthcnc? Avait·on me-

suré toulcs ces difficultés, et beaucoup d'autrcs

auxqucllcs on devrait songcr, quand on était si

prornpt

a

conscillcr de s'arretcr?-

'fclles étaicnt les objcctions que Napoléon

adrcssait

il

ceux qui considéraicnt l'établisscmcnt

sur le Dniépcr et la Dwina comme un résullat

suffisant de lacampagnc, et il y avait bien <l'au–

lres objcctions cncorc qu'i\ taisait, quoiqu'i\ les

SUl bien,

COI'

s'i\ Ólait plus prompt que personnc,

par caraclcre, par habitude, pa1· ambilion,

il

se

jcter dans d'incxtricables difficultés, il était plus

prompl aussi que pcrsonnc

a

<lécouvrir ces diffi–

cultés, quand il s'y était jeté, et s'il les niait, ce

n'était pas par ignorance, mais par répugnancc

a

s'avoucr ses fautcs, par calcul, et un pcu aussi

par ce besoind'illusions qui porte a se nier

il

soi–

rncmc des choses qu'on sait clre vraies, commc

si en les niant on en diminuait la réalité. 11 sa–

vait, par cxemple, sans en convenir, que les cs–

prits

commcn~aicnt

it

s'éloigner de lui, mCmc

en Franco, qu'enEurope ilsétaient profondémcnt

cxaspérés, quedaos l'armée, qui composait sa vé–

rilable clientelc, Ja fatigue avait déja produit le

rcfroidissemcnt, la critique, la méfiancc, et que,

dansccttc situation, il ne pouvait se soutenir qu'a

force de coups d'éclat.

Du reste, l'idée de ne point dépasscr les limites

de la Pologne, qui se répandait autour de Jui, il

n'cn méconnaissait pas Ie méritc; il était mCmc

prCt

a

y adhércr, et i1 en faire le principe de sa

conduitc, maisaprcs avoir cxéculé cerlaincs opé–

rations qu'il méditait cncorc, aprcs avoir rem–

porté c¡uelque Lriompbc signalé, car il ne déscs–

pérait pas, apres ce second rcpos d'unequinzaine,

defrapper quelqu-egrand coup,qui mainticndrait

tout cnticr le prcstigc de ses armes, el Jui per–

mclll'aitdes'arrctcraux frontiercs dela Moscovic,

sans que le monde ni Ja Frunce doulassent <le lui,

point imporlant

a

ne jamais oublicr. Au surplus

les divcrgenccs sur ce sujct

n'aYaicnt

cncore au–

cune g1·avité; car, malgré quelqucs doutes sur–

gissanL

~¡,

cL 13, la confiance en lui élait enticre

parrni ses soldats

el

ses généraux, et si Ja fatigue

inspil'Oil parfois des momcnls de tristesse, elle ne

suggérait

il

pcrsonnc l'idéc d'un désastre.

Napoléon, nounissant le projct de nouvellcs et

décisivcs opéraLions, dirigcail dans ce sens les

mouvcmcutsdes corps d'arméc qui actucllcmcnt

ne prcnaicnt point parl au reposde Witebsk, On

a vu que sur la Dwina il avail ordonné au maré–

chalOudinotde marchcr l'épéc haule sur lecomte

de Wittgenstein, de le pousser sur Sebcj, roulc

de Saint-Pétersbourg par Pskow, afin de elégager