LE CONCILE. -
MARs
18H.
fort é!Cgante, mais lnféricure alors
a
celle de
l'Angletcrrc sous le rappoi·t des aciers , avait
profité commc les nutres de l'cxclusion des
Anglais. De notables bénéficcs avaient encou–
ragé et multiplié ces essais hors de toute por–
portion.
Ce n'étail pas seulcment vcrs la fabrication de
ces clivers produits que s'était dirigéc l'ardeur du
mornent, mais vcrs l'introduction des matiCrcs
prcmieres qui servaient
a
les erécr.
On courait sur tous les mai·chés ou l'on savait
quc dcvaicut se vendre des sueres, des cafés, des
colons,
des indig:os, des bois, des
cuirs; on s'cn
disputait les moindres quantités introduitcssur le
conlincnt, et on spéculait avec fureur sur ces
quantités. Les íonds publics était délaissé>, parce
qu'ilsétaientpcu abondantset presqucinvariablcs
daos leur valcur, depuis que Napoléon mainte–
nait la rente cinq pourcenia 80 francs par l'intcr–
vcntion secrete du trésor extraordinaire. Les
aetions de la banque, scul cffct public prenant
place
a
coté des rentes sur l'Etat., oscillaicnt entre
·l ,225 el
f
,275 francs, pour un rCl'enu de50
a
60
francs, el ne dépassaicntjarnais ces termes extre–
mes.
JI
u'y avait pas la de quoi tenter les spéeu·
latcurs, parce qu'il leur faut de grandes chances
de gain , rnéme au prix de grandes chances de
pcrte, et ils s'étaient jetés sur les dcnrées colo–
niales, qui présentaient ces conditions au plus
haut <legré. On spéculait done avee passion sur
le sucrc, le café, le cotan, J'indigo; on courait
a
Anvers,
a
Mayence,
a
Fraucfort, a Milan, oi1 le
gouvernernent faisait vendrc les marclrnndiscs
arrivéessur les chariots de l'artillerie,qui avaient
porté des bornbes et des boulets aux rives de
l'Elbe, eten avaient rapporté du suere etdu café.
Les bois eux-mcmes, qu'on savait indispensables
a
Napoléon pour les nornbreux vaisseaux qu'il
avnit en construetion dans tous les chantiers de
l'Empire, étaient devcnus l'objet d'un agiotage
effréné, el sur la base mobile el dangercuse de
ces spéeulations on créait de brillants édifices de
fortune , paraissant et disparaissant toul
a
tour
aux yeux d'un publie surpris, érnervcillé et
jaloux.
Dans un si grand essor, la prudence avait été
uaturc11cmcnt la vertu la moins obscl'\'éc, eton
ª''ail spéeulé non-seulement au dela des bcsoins
a saLisfaire, mais au dela des rnoyens de payer.
Tandis que !'industrie produisait beaucoup plus
qu'elle ne pouvait vendre, les agioteurs sur les
matiercs premiercs chcrehaient
a
en acheter
beaueoup plus que !'industrie n'aurait pu en em–
ployer , et, par une eonséquence inévilable, en
faisaicnt montcr la valcur
a
des prix cxagérés.
Pour solder tous ces marches imprudents, on
avait créé des moyens arlificiels de erédit. Ainsi
une maison de Paris, se livrant au commcrcc des
bois de conslruetion et des denrécs coloniales ,
lirait jusqu'a quinze cent mille franes par rnois
sur une maison d'Amstcrdam qui lui ¡nCtait son
crédit; cclle-ci tirait sur d'autres, et ces dernie–
rcs
a
leur tour tirant sur Paris pour so rembour–
scr, on avait créé de la sortc des rcssourccs
fictivcs, quedaos lalangucJamiliCrcdu commercc
on appellc
pa.pier de circulation.
La poliee,
épianl tout, mais ne comprenant pas tout, avait
cru voir dans cct :i.rtificc commcrcial une trame
des partis qu'elle s'élait hátée de dénoncer
a
l'Empereur. Celui-ci, offusqué d'abord, avait fini
par se rassurer en apprenant par le ministro du
trésor le seeret ele eetlc prétcndue conspira–
tion
1
•
On n'avait pas mis plus de réservc daos la ma–
niere de jouir de ses profits que daos les moyens
de se les proeurer. Les nouveaux enrichis s'é–
taicnl cmpressés d'étaler lcurs fortunes rapide–
ment acquises, et d'achetcr de la caisse d'amor–
tisscment les hótels, les eh,\leaux de l'aneicnnc
noblcsse, dont l'Etat avait hét-ité sous le litre de
biens nationaux. On ne les achelait plus, eomme
autrcfois,
i1
vil prix et avcc des assignats, mnis
contrc argent, contrc bcnucoup d'argent, et sans
répugnnnce, parce que vingt unsécoulc\sdcpuisla
confiscationavaienl fait perdre le souvenir dcl'in–
justiee de l'Etal etdu malhcurdesanciensproprié–
taires. C'était la eetle ressource des aliénations
de biens clont Napoléon se servait de ternps en
ternps pour eompléter ses budgets, surlout dans
les pays conquis, et que la caissc d'amortisscment
lui avait ménagée, en vendan!
a
propos, pcu ;,
pcu, et avec laprudenee convenable, les irnmcu–
blcs qu'on lui livrait. 11 y avait a Paris des ma–
nufacturiersjustement enriehis par leur travail ,
des spéeulaleurs sur denrées coloniales cnrichis
d'une maniere moins honorable, qui possé–
daient les plus bcaux domaincs, et les mieux
qualifiés '·