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LIVRE QUARANTE-NEUVJEME.
fait pour se procurer les plus beaux triomphes.
Malheureusement les temps étaient changés, et
pour achever la ruine de la grande armée de
Bobeme, ce n'eut pas été trop de Napoléon lui·
mcme veillant jusqu'au dernier instant a l'ac–
complissement de ses desseins. Et en toute autre
circonstance il n'aurait pas manqué d'etre aupres
de Vandamme avec sa garde entiere, de conduire
par la main Saint-Cyr et l\farmont et de pour–
suivre la victoire jusqu'a ce qu'il en eut tiré tout
ce qu'elle pouvait donner. Mais il était distrait,
reporté violemment ailleurs, non pas comme ta nt
d'autres héros par le gout de la mollesse ou des
plaisirs, rnais par la passion ordinaire de sa vie,
passion d'obtenir tous les résultats a la fois,–
souvent meme les plus contradictoires et les plus
opposés. Berlin, Dantzig, comme Moscou un an
auparavant, étaient les prismes trompeurs qui
égaraient en ce moment son génie. Pour frapper
a Berlín la Prusse et l'Allemagne, pour etre
toujours fondé
a
dire que sa puissance s'étendait
du golfe de Tarente a la Vistule,
il
avait eu des
le commencement de cette campagne la pensée
d'envoyer un de ses corps
a
Berlin, de conserver
une garnison
a
Dantzig, et pour cette pensée il
avait, comme on l'a vu, laissé s'introduire d:ms
la profonde combinaison de son plan de campa–
gne un vice caché, celui d'élargir singulierement
le cercle de ses opérations dont le centre était
a
Dresde, de placer Macdonald
a
Lowenberg au
Iieu de le placer a Bautzen, de diriger Oudinot
sur Berlin au lieu de l'établir
a
Wittenberg,
grande faute qui l'empechait d'accourir a temps
partout ou il aurait fallu qu'il füt pour achcver
ses propres victoires, et réparer les échecs de ses
général Vandumme sur Gieshübel, le duc de Trévise prendra
position sur Pirna. Du reste, je m'y ren<lrai moi-mtime aus–
sitól que je saurai que le mouvement est commencé. ,,
«
_A
u
major général.
«
Dl'esde, le 29 aollt
t8t5,
a
¡;
heures et demic du matin.
• Donnez ordre au roi de Naples de se porter sur Frauen–
stein et de tomber sor les flanes et les derriercs de l'cnnemi,
et de réanir
a
cet effersa cavalerie, son infanterie et son arl il–
lerie. -
Dom1cz ordre au duc de Raguse de suivre l'em1emi
sur Dippoldiswalde et dans toutes les dircctions qu'il uurait
prises.
-
Dom1ez ordre au maréchal Saint-Cyr de suivre l'en-
11emi sur Maxen et dans toutes les direclions qu'il aurait 7Jriscs.
- lnslruisez ces trois généraux de la position des deux
autres, afin qu'ils sachent quºils se soutienncnt réci proque–
menl.,,
«
Au
roi de Naplcs.
ce Dl'esde, le'.!9 aoót
i8t5,
a
5 heures apres midi.
" Aujourd'bui 29,
a
six heures du matin, le général ".,an–
f.
lieutenants
!
Cette meme cause continuant
a
produire les memes effets, il voulut, en appre–
nant un malheur arrivé a Macdonald, le sccourir
le plus tót possible ; il voulut aussí conduire
lui-meme l'armée d'Oudinot
a
Berlin, et pour ce
double motif se détournant de Pirna et deKulm,
ou
il
aurait du etre de sa personne et avec sa
garde, il laissa ses victoires les plus importantes
inachevées, pour courir a d'autres, et s'exposa
de la sorte
a
manquer tous les buts pour les
vouloir atteindre tous
a
la fois. Ainsi toujours la
meme cause dans les malhcurs de Napoléon,
toujours la meme source d'erreur
!
Et c'est dans le désastre de Kulm la seule part
de reproches qu'on puisse lui adresser, car daos
les détails
i1
ne commit pas une faute. Quant
a
ses ennemis, leur mérite contribua pour peu de
chose au résultat. Leur plan de retraite fut fort
. peu médité; ils se retirerent en bate avec l'idée
d'aller jusqu'au dela de l'Eger, et s'ils s'arrete–
rent devant Kulm, ce fut a l'improviste, ce fut
a
la vue d'un corps dont la position, a la fois hasar–
dée et inquiétante pour eux ,' leur inspira l'idée
de ne point passer sans le contenir; et cependant
ils n'en seraient pas meme venus
a
bout, si le
plus grand des hasards, celui d'un corps prussien
compromis, faisant acte de désespoir pour se
sauver, ne leur eut fourni une combinaison
iiwolontaire, inattendue, et d'immense consé–
quence, combinaison dont oo a voulu attrihuer
le mérite a l'empereur Alexandre, mais qui ne
fut due qu'au scntiment énergique des Prussiens
résolus a se faire jour ou a mourir. Ce n'est done
pas au génie des coalisés, qui toutefois étaient
loin de manquer d'habileté militaire, c'est
a
la
damme a attaqué le prince de Wm·temberg pres de Hollen–
dm·f; il lui a fait
1,500
prisonniers, pris quatre pieces de ca–
non, el l'a mené battant; ·c'élaient
tous Russes.
Le général
Vandamme marchait sur Tceplitz avcc tout son corps. Le gé–
néral prince de Reuss, qui commandait une de nos brigades,
a été
tué. -
Je vous écris cela pour votre gouverne. - Le
général Vandamme me mande que l'épouvante est dans tonte
l'armée russe.
»
"
le
majo1·général
au
maréchal Gouvion Saint-Cyr.
«
Dresde, le 50
a01il i8U.
«
nJONSIEUI\ LE lllARIÍCHAL,
«
Je
re~ois
votre lettre datée de Reinha1·ds-G1·imme, par
laquelle vous me faites connaitre que vous vous trouvez der-
1·iere le
6•
corps. L'intention de
Sa DI
ajesté est que, <lans cet
état de choses, vous appuyiez le 6• corps; mais
il
serait pré–
férahl e que vous pussiez trouver un cbemin sur la gauche,
entre le cluc de Raguse el le corps du générnl Vandamme, qui
a obtenu de g1·ands succcs sur l'enncmi et luí a fait 2 mille
prisonniers. "