DRESDE ET VITTOHIA . --
AOUT
1815.
t8ts
pour regagner
la
ehaussée de Péterswalde, tandis
que Philippon et Mouton-Duvernet se replient
Ientement. A cette vue , les soixante batail–
lons russes que nous avions devant nous
a
notre
droite et
a
notre ceotre' poussent des cris de
joie, et nous suivent. l\fouton-Du vernet et Phi–
lippon les contiennent, Baltus au centre les mi–
traille des hauteurs de Kulm ; mais
a
gauche
dans la plaine, ou ne reste plus que
In
hrigade
Dunesme, une masse formidable d'ennemis fo od
sur eette brave brigade qui se défcnd vaillam–
ment. En arriere, les brigades Quyot et de Reuss
essayant de regagner la ehaussée de Péterswalde
en eolonne serrée, chargent les Prussiens avec
violence. Ce mouvement produit un affreux re–
foulement dains les troupes du général Kleist, et
il
en résulte un conftit impossible
a
décrire, daos
lequel les hommes se prennent corps
a
cor ps,
s'étouffent, s'égorgent
a
coups de sabres et de
ba!onnet.tes. Au meme mom ent une brigade de
eavalerie, celle de Montmarie, suivie de beau–
coup de soldats du train, se jette sur l'artillerie
des Prussiens et l'enleve. Le général de Fezen–
sac amené sur ce point par Vandamme avec les
débris de sa brigade, contribue
a
l'effort com–
mun. On parvient ainsi
a
rouvrir la r ou te en
r enversant la premiere ligne de Kleist, et
il
y a
chance encore de se sauver si l\fouton-Duvernet
et Philippon, se repliant
a
temps et en bon or–
dre, peuvent aider
a
forcer la seconde ligne des
Prussiens. l\fais
UN
étrange accident survient et
déjoue tous les calculs de l'infortuné Vandamme.
Notre cavalerie cb-argée
a
outrance sur la gauche
de la route, et rcjetée sur la droite, s'y pr écipite
suivie d'une multitude de soldats du train qui
étaient séparés de leurs pieces. Dans leur course
désordonnée, cavaliers et canonnicrs se ruent
sur Mouton-Duvernet et Philippon , mettent le
trou.ble dans leurs rangs, et y décident par leur
exemple un mouvement général de retraite vers
les bois. Alors tout prend cette direction
!
Le
général Baltus, apres avoir criblé les Russes de
mitraille, se retire du meme coté avec ses atte–
lages et la brigade Doucet. Dans la plaine
il
ne
reste que la brigade Dunesme, assaillie de toutes
parts, se
~éfendant
héro1quement, mais fiaissant
par succomber. Une partie des soldats de cette
brjgade
~ont
tués ou pris, les autres tachent de
gagner !'asile des rnontagnes. Vandamme, Ha:x:o,
blessés, et demeurés les deraiers au milieu du
péril, sont faits prisonniers. Le généralKreu tzer,
placé
a
Aussig, etapercevant de loin cetle écbauf–
fourée, prend le parti de se retirer, et se sauve
par miracle avec quelques bataillons. A rexcep–
tion d'un petit nombre de colonnes se repliant
avec ordre, on ne voit bientót de to us cotés
qu'une nuée d'hommes s'échappant comme ils
peuvent, et réussissant en effet
a
se dérober a
l'ennemi' grace
a
ces montagncs boisées ou
il
est impossible de les poursuivre.
Telle fut cette malbeureuse journée de Kulm,
qui nous couta
oa
6 mille morts ou blessés,
7 mille prisonniers, 48 bouches
a
feu, deux gé–
néraux bien diversement illustres, et qui, bien
qu'elle cotitat 6 mille hommes aux coalisés, les
reteva de leur défaite, leur rendit l'espérance de
la victoire, et effac;a en un moment de leur
souvenir les éclatan tes journées du 26 et du
27 aout.
Quelle raison donner de cette singuliere ca–
tastrophe? Comment expliquer que tant de corps
franc;ais entourant l'armée coalisée, a ce point
que l'un de ces corps, celui de Vandamme, se
trouvait déja sur sa ligoe de retraite, qu'ellc–
meme étant embarrassée
d~ms
les gorges du
Geyersberg, et y ayant un de ses détachemen ts
telJement enfermé qu'on ne pouvait imaginer de
quelle maniere il s'échapperait, comment expli–
quer que la face des cboses change tout
a
coup,
que le corps franc;ais destiné
a
assurer la perle
de l'ennemi soit perdu lui-meme, et que l'auteur
du désastre soit pr écisément le détachemeut
prussien supposé sans ressource, que la victoire
passe ainsi des uns aux autres en un instant, avec
toutes ses conséquences militaires, politiques et
morales? Est-ce la fau te de Vandamme, qui se
ser::iit trop engagé, de Mortier, de Saint-Cyr qui
ne l'auraient pas secouru
a
temps, de Napotéon ,
qui aurait trop abandonné les événements a eux–
memes? Ou bien serait-ce le génie militaire
qu'auraient déployé les généraux ennemis en
cette circonstance?... _Les fa its , exposés dans
toute Ieur vérité, ont presque déja répondu
a
ces
questions, et expliquent a eux seuls ce change–
ment de fortune, l'un des plus prodigieux dont
I'histoire fasse mention.
Vandamme, avec beaucoup de vices contre-ba–
laocés par de grandes qualités, n'eut dans ces
journées presque aucun tort. 11 était placé des
l'origine au camp de Pirna, avec mission essen–
tiellc de se porter sur les derriercs de l'ennemi ,
et devait avoir sans cesse !'esprit tourné vers
cette seule pensée. Le 28 aotit, voyant plusieurs
colonoes russes défiler devant lui, il rec;ut l'ordre
forme! de les suivre l'épée daos les reins, de
marcher apres elles en Bohéme, et d'aller jusqu'a