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LIVRE QUARANTE-NEUVIEi\fE.
Treplitz pour fermer aux coalisés leur principal
débouché. Il savait qu'il était entouré de corps
frarn:;ais sur ses flanes et ses derrieres, prets a
survenir
it
tout moment. 11 courut done,
il
sui–
vit les Russes, et ce fut miracle si dans son ardeur
il
n'alla pas jusqu'a Treplitz , car
il
en avait l'or–
dre, et
il
était certain de n'obtenir qu'a T replitz
les grands r ésultats queNapoléon se promettait
de sa présence en Bobóme. Pourtant apres avoir
essayé de pousser l'ennemi au dela de Pri esten,
et avoir eu le tort, fort excusable d'ailleurs, et
qui n'eut aucune gravité pour la suite des évéoe–
ments, d'attaquer sans ensemble, il sut s'arretcr
a
Kulm, bien qu'il cut Treplitz deva nt tui T re–
plitz que ses iostructions et son légilime dési.r
luí assignaient comme but.
A
pres s'etr e arreté il
s'établit dans une position tres-for te, garantie de
tous cotés , un seul excepr.é, celui par lequel de–
vait venir Morlier, et
il
attendit, demandant du
secours et des ordres. Que) autre par tí aurait-il
pu prendre? Rétrograder sur Péterswalde et
Pirna? mais c'eut été abandonner et son poste et
sa rnission, et contrevenir noo-seulement au texl e,
mais a la pensée de ses inslructions car il était
chargé de barrer le cbemin a l'enncmi' et
il
le
lui eut ouvert. Tou t ce qu'on pouvait donn er a
la prudence
il
l'avait donné en s'abstenant d'allcr
a
Treplitz, et en s'al'retant
a
Kulm. Si dans cette
position de Kulm, de Jaqu elle il eu t le bon esprit
de ne pas sor tir, ce fut le général Kleist au li eu
du maréchal l\forticr qui paru t sur ses dcrriercs,
ce fut la un
ac~iden t
extraordinaire, dont
lJ
y
aurait une criante injustice a le r endre respon–
sable. Quant a ce qui suivit, Vandamrne au
moment de la catastrophe conser va toute sa pré–
sence d'esprit, et prit la seule résolution possi–
ble, celle de rcbrousser chemin en passant sur Je
corps des Prussiens, résolution qui devint inexé–
cutable par l'inévitable confusion d'une situation
pareille. 11 n'y avait done rien
a
lu i r epr ocher
a
lui, et la supposition qu'il se perdit en courant
trop vite apres le baton de mar échal , qu'il avait
micux mérité que d'autres par ses services mili–
taires, et pas plus démérité par ses violences, es t
une calomnie
a
l'égard d'un infortuné plus
a
plaindre ici qu'a blamer.
Si Vandamme ne fut pas coupable, si tout son
malheur vint de ce qu'au lieu d'un corps fran¡;ais
il apparut sur ses derrieres un corps pr ussien,
faut-il s'en prendre aux divers commandants de
troupes fran¡;aises qui auraient pu
survenit:~
et
notamment au mar échal l\fortier , au mar échal
Saint-Cyr, les seuls placés a portéc de Kulm? ,Le
maréchal Mortier établi
a
Pirna comme en cas,
avec l'allernative d'etr e ramené
a
Dresde ou en–
voyé
a
Treplilz, aurait du se tenir entre deux, et
avec plus de spontanéité et de vigilance
il
aurait
p u accourir de Jui-memc au secours de Van–
damme. 1\fais daos
la
stricte observation de ses
devoirs, destiné
a
etre dirigé sur un point ou
sur un au tre,
il
était naturel qu' il atlendit daos
une compl ete immobililé l'expression des volontés
de Napoléon , et, quant a l'ordre précis de secou–
r ir Vandamme avec deux divisions, cet ordre ne
tui arriva que dans le courant de la journée
d u 50, c'est-a-dir e
a
une heure ou' la catastrophe
était déja accomplie. Il cst done absolument im–
pos ible de s'en prcndre
a
ce maréchal.
On vo udrait pouvoir en dire autant du maré–
chal Saint-C r · mais ce mar éch al est certaine–
ment Je plus sujet
a
reproches, et il y a peu
d'excu es
1t
fair e valoir en a faveur. Placé direc–
tement a la suite du cor ps de Kl eist,
il
aurait du
etre toujours sur ses traces , ne pas le perdre de
vue un instant, et s'il eu t rempli ce devoir posi–
tif, le corps de Kleist suivi
a
la piste, au moment
ou il tombait sur Vandamme, aurait vu
a
son
tour un corps fran¡;ais tomber sur ses derrieres,
et aurait probablemen t été pris et détruit , au
lieu de contribuer
a
prendre et a détruire Van–
damme. l'\Ialheureusemeot Je maréchal Saint–
Cyr , esprit éminent mais frondeur , n'ayant de
zele que pour les opérations dont
il
é tait di–
r cclcrncnt chal'gé, ne sachant, hors du feu, que
critiqu er ses voisins et son maitrc, ayant en
toutc circonstance plaisir a chercher des diffi–
cultés au lieu de chercher
a
les vaincre, ernploya–
la journée du 28
a
e porter
a
l\faxen, le lende–
main 29 ne 'ava n¡;a que j usqu'a Reinbards–
Grimme, ne
fit
ainsi qu' une licue et demie dans
cette jo urnée décisive pour la poursuite, em–
ploya ce temps si précieux a faire demander
a
1état-major s'il devait suivre l'\Iarmont sur la
r oute d'A ltenberg, et tandis qu'il avait l'ordre
positif de suivre l'ennemi
a
outrance dans toutes
les dir·ections, laissa it Kleist disparaitre , et
s'acbemi ner sur les derrier es de Vandamme. Puis
le lendemain 50 , lorsque l'ordre de chercher
a
r ejoindre Va ndamme par une route latérale lui
par venait, ordre tellement indiqué que Berthicr
sur la carte seule le lui envoyait de Dresde, il
s'ébranlait cnfi n, et par le chemin qui avait mené
Kleist sur les derricres de Vandamme, et qui
l'aurait mené lui-meme sur les derrieres de
Klcist , il arrivait pour enlendre le canon qui
armon<;ait
not.redésastre. Ainsi avait été perdue