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L'UNIVERS.
demment. Toutes les peuplades qui
habitaient les bords du lac de Puria,
limite des acquisitions de Mayta Capae,
envoyerent des députés
a
l'empereur
pour lui jurer obéissance. Les pro–
vinces de Cbaycuta et de Charcas (Chu–
guisaca) eurent leur tour , et montre–
rent le meme empressement
a
se
laisser enroler sous la banniere des
rois du Pérou. Les Ineas avaient évi–
demment affaire
a
des populations peu
habituées au rude métier de la g1,1erre,
et d'ailleurs, le prestige de leur puis–
sance fascinait ces nations crédules au
point de leur faire renoncer volontai–
r ement
a
leurs usages'
a
leurs dieux '
et
a
leur gouvernement. /
Nous ne pouvons malheureusement
évi ter la monotonie dans ce récit des
faits et gestes des enfants du so–
leil ; la faute en est aux bistoriens qui
ne nous apprennent, sur l'histoi re de
Ja dynastie des Incas, que des faits
uniformes et quelquefois meme insi–
gnifiants. Il est éi?alement impossil>le
de deviner le véritJable car;1ctere des
empereurs
p~ruviens
au milien des
fl atteries et des éloges emphatiques
que les chronigueurs, et surtou t Gar–
cilasso de la Véga, adresseñt
a
leu r
mémoire. Tol1s les Incas sont des es–
peces de diviÍlités, des etres pleins de
.vertu, de sagesse, de bravoure , de
clémence et de bonté ; on ne saurait
leur reprocher aucun méfait, ni leur
.imputer aucun défaut. En un mot,
c'est un panégyrique sans interrup–
tion' un long discours
a
la louange
exclusive de ces souverains. On con–
coit gu'il est fort difficile d'entrevoir
fa vérité
a
travers cet épais nuage
d'encen s. Aussi sommes-nous réduit
nous-meme
a
paraphraser en quelgue
sorte les assertions des historiens qui
nous servent de guides.
Inca Roca, six1eme monarque péru–
vien ,
commen~a
son regne
p~r
un
voyage de trois ans dans ses Etats,
usage
consacré par ses
prédéces–
seurs; puis
il
conguit les provin–
ces de Chomcas , d'Uramarca , de
Sulla, d'Utumsulla, et plusieurs au–
tres qui, au dire de Garcilasso , ren–
fermaient environ 400,000 familles,
évaluation qu'il est permis de croire
exagérée. Pendant les quelques années
qu'il employa ensuite
a
améliorer les
institutions de son pays,
il
habitua
son fils ainé aux affaires du gouverne–
ment. 11 lui confia la direction d'une
entreprise contre la province d' Anti–
suyu, entreprise qui réussit et annexa
aox domain es des Incas un riche et
vaste territoire. Quelque temps apres,
la conquete des provinces de Charcas
(Chuquisaca), commencée sous le re–
gne précédent, fut consomrnée, et ac–
quit
a
Inca Roca une gloire impéris–
sable. BientOt de nouveaux agranilisse–
ments porterent au loin la réputation
de l'empereur de CuzGo. Quoi qu'il en
soit, le titre le plus légitime et le plus
sérieux de ce monarque
a
la vénéra–
tion de son peuple, ce fut d'avoir
fondé des écoles publiques
a
Cuzco,
et organisé un systeme d'instruction
pour la classe noble. Le bienfait,
comme on le voit, fut exclusif, et ue
s'étendit pas jusgu'aux rangs infimes
de la société, comme la justice l'exi–
geait, mais
i1
détermina un progres
qui
exer~a
une heureuse inlluence sur
Jlesprit général de la nation.
.
On attribue au r egne de Roca une
durée de cinquante ans . 11 n'y a rien
d'impossible
a
cela , et si l'on admet
les assertions de Garcilasso sur la du–
rée des autres regnes , on arri vera
fa–
cilement aux quatre cents ans
d'ant~quité dont se vantent les Incas,
a
partir de la conquete. Reste
a
savoir
s'il est dans l'ordre des choses vra1sem–
blables qu'une
~érie
de douze rois rem–
plisse
a
elle seule une aussi longue pé–
riode, et qu'avec un pareil nombre de
souverains, on trouve une moyenne
de trente-trois ans envi ron par regne.
Nous ne devons pas omettre une as–
sertion importante qui se rapporte au
regne d'lnca Roca. L'historien espa–
gnol Acosta dít qu'il
y
eut deux ligna–
ges ou fomilles d'lncas, et que le se–
cond lignage commence
a
Roca, qui
renouvela les lois et donna de nou–
veaux reglements
a
l'empire. Ce fait
serait digne d'attention, au point de
vue bistorique' s'i l pouvait etre par–
faitement prouvé; mais rien ne nous