LE'I'TRES
salades; e'étoit un homme fort simple , et je fus bien
aise de le trouver de ce caractere , pour savoir plus
au
vrai les choses dont je voulois étre informé.
J'eus
le
temps de le questionner, car le vent retarda notre
départ
~e
plus de quinze jours.
Quoig:ne je ne fusse pas
fort
a
mon aise dans lapo–
sition que je viens
de
vous dépeindre,. mes réflexions
n'étoient cependant pas toujours tournées sur moi–
rneme; je m'attendrissois sur la triste situation de
nos
p~ssagers
de Pathmos. lis n'en étoientqu'aquinze
lieues , et ils ne trouvoient aucune c©mmodité pour
s'y rendre; leur patience. et leur résignation
a
lavo–
lonté de Dieu étoient admirables; j'en étois
é<lifié,
et c'étoit pour moi une le9on que fétudiai dans ma
solitnde, et dont je tachai de profiter. Ils m'invi–
toient fort
a
les suivre jusqu'a leur lle' pour avoir la
consolation d'y visiter la grotte ou saint
J
ean l'évan–
géliste a écrit son apocalypse: j'aurois été fort cu–
rieux de voir
un
monument si respectahle, mais je ne
pouvois désempru:er. Hors cette grotte et le monas–
tere des caloyers, il n'y a ríen
a
voir
a
Pathmos; ce
n 'est qu'un grand rocher habité par ces religieux, et
})ar quelques familles chrétiennes : le terroir est in–
grat, et l'on n'y peut rien recueillir pour les néces–
sités de la vie; les hahitans vont chercher tout en
terre ferme; ils se loueut pour mariniers
a
des pilotes,
et
a
leur retour ils rap11orten
t
de quoi vivre : mes
compagnons de voyage é toien
t
dans ce cas:
Ces bonnes gens se plaignoient
fort
des corsaires
chrétiens , qui , sans aucun respect pour un lieu
si
saint , et en qnelque sorte consacré par le séjour
d'un
Evangélist~,
étoient venus
pille.r
le1ir lle, n'épargnant
pas meme les autels, et traitant les rel1gieux
('!t
les ha–
bitans avec la plus barbare cruauté. Ils eurent
un
nouveau sujet de s'en plainclre
a
Samos.
Ils
avoient
loué une petite barque pour les porter
a
Pathmos,
mais
un
incident rornpit leur yoyage.
Les
corsaires