Table of Contents Table of Contents
Previous Page  356 / 960 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 356 / 960 Next Page
Page Background

CHA

Normands étoient daos la Saintonge , d'ol.t ils infe{–

toient les pays voifins: ils étoient d'autant pLus redou–

tables, que Pepin facrifiant toutau defir de fe rendre

..indépendant, étoit bien éloigné de s'oppofer aux em–

barras El.e fon oncle. Ce fut pendant ces troubles qu.e

les Bretons, conduits par Nomenon, auquel Loms

le D ébonnaire a voit donné leu.r gou

vernem~nt,

leve–

rent l'érendart de la r

1

olte. Ces peup1cs Jaloux de

leur indéper.dance , av0ient d.éja ter:t '

plu~enrs [<?i~

d e fecouer le j

oug d

es

Fr<~n<;,:OIS

;. ma1s leur mdoclllte

leur avoit ron

jou.rs

été funeíle jufqu'alors. Charle-

1:n.agne

&

Lou

is le

Débonnaire, avoient épuifé fur

eux tous les traits de la plus terrible vengeance: plus

heureux fous

Charles Le Clzauve

,

ils

remportere.nr

fur ce prince une viét:oire éclarante ,·

&le forcerent

a

demander la paix ,

Of'\

ne fait

a

quelles conditions;

mais un roi qui confent

a

demander grace

a

fes (u- .

jets, renonce fans doute

a

s'en faire obéir. Nome–

non eut peine a confentir au rraité; il efi meme pro–

bable qu'il

s'y

feroit refuíil , fans une defcente que

firent les Normands fur fes terres: en effet, des

qu~il

les eut défarmés par un traité, il recommen<;;a la

guerre avec une ardeur nouvelle,

&

s'empara du

territoire de Rennes, ainíi que de celui de Nantes;

alors ne s'amufant point

a

feindre' il ptit le diade–

me, & fe fit facrer par les

év~ques

dans une aífem–

blée natiQnale.

Ch.arles

réclama contre l¡ufurpatenr;

ille fit excommunier, mais ces foudres furent auffi

vaines que fes armes 5il ne toucha plus dans la fui te an

fceptre des Bretons, que pour le remettre a ec plus

.d'éclat entre les mains d'Erefpoge, fils dn rebelle; non

feulement

Charles

couronna Erefpoge de fes propres

mains , il ajouta encore le territoire de Raiz an

royaume que fon pere venoit d'ufurper,

&

dont il

lui confirmoit la poífeffion.

Ce fut au milieu de ces difcordes étrcmgeres

&

civiles que

Charles

implora le fecours de fes fre–

res; chancelant fur un treme agité par mille fac–

tions domeítiques , non moins terribles que les

guerres que lui faifoient

a

l'envi les Bretons

&

les

' Normands, il leur demanda une conférence pour

remédier aux maux qui défoloient fes malheureux

états. L'empereur & le roi de Germanie, cédant

a

fes prieres' fe rendirent

a

Merfen'

Olt

fe tint l'aífem–

blée générale. Les trois princes y parurent dans la

plus grande intimité; on n'apper<;;ut aucune de ces

diviíions qui avoient íignalé le commencement de

leur regne. (( Sachez, dirent-ils , aux éveques

&

.aux feigneurs' que chacun de nous efi pret a voler

a u fecours de fon frere'

a

l'aider de fes confeils

.&

ae fes armes' tant an-dedans qu'au dehors du royau–

~e

>>.

C'étoit une menace indireéte de les punir,

s'ils abufoient davantage de leur autorité; on ne

pouvoit uC r d'une plus grande modération : la fierté

des nobl es en fut cependant offenfée ; & l'on s'ap–

perc;ut dans cette aífemblée-la meme

~

que leut puif–

íance étoit bien mieux affermie que celle des rois.

Gifalbert, l'un d'cux, avoit enlevé la fille de l'empe–

reur,

&

avoit ofé l'époufer publiquement malgré

fa réc1amation. Quoique ce rapt bleífat également

l'honneur de fes freres , il ne put en obtenir ven–

geance; on fut obligé de diffimuler leurs autres exces.

Mais ce qui montre l'état de foibleífe oil la monar–

chie étoit ·réduite , ce fut un article qui déclaroit

que'

ú

l'un des princes dérogeoit

a

fes promeífes'

les éveques

&

les feigneurs pourroient l'en avenir .

conj<;>intement,

&

ordonner contre luí c.e qn'ils ju–

_gerOient

a

propos ' s'il refufoit de fe rendr(i!

a

leurs

remontrances. C'étoit rendre les fujets

juges de

leurs

fouverains : les pUiífances

intermédiaires

avoient faít un aífez cruel abus de leur autorité ,

pour montrer les conféquences d'un femhlable

décret.

'

L'aífemblée

de

Merfen fervit

a

reíferrer l'union

des princes , fans remédier aux défordres dont

Char.;

Les

avoit efpéré la fin;

&

cela devoit erre, puifque

l'on en laiíloit fubíifler le germe. On n'entendoit

parler que de révoltes , d'incuríions

&

de briganda–

ges. Ce fut dans ce tems

-la

meme que

Charles

le

Chauve

remit entre les mains d'Erefpoge le fceptre

des Bretons. Les Normands continuoient de faire de

la France le théatre d'une fureur que rien ne pouvoit

aífouvir. Nous allons raífembler

ici

le tableau des

défordres qu'ils commirent fous le regne de

Charles

le Chauve

;

&

fi ces trifles objets ainíi réunis nous

font gémir fur la foibleífe du gouvernement de ce

prince ' ils ferviront au moins

a

nous faire admirer

la vigueur de celui de Charlemagne, qui fut les con–

tenir dans leurs limites , dans un tems o1t il fondoit

un nouvel état, & oú il avoit fur les bras la moitié

de l'Europe. lls avoient déja pris

&

pillé Nantes,

Touloufe, ravagé la Saintonge,

&

brulé Bordeaux

&

Périgueux. Devenus plus fiers

ptif

la fuite de leurs

profpérit

1

s, ils forcerent

Charles:,

apres l'aífemblée

de Merfen,

a

les admettre, difent les annalifies , au

partage de fon royaume. On ne fait

a

quoi fe rédui·

foit ce partage ; on croit que la

il!e de

R

ouen leur

fut des -lors abandonn

1

e. Quoi qu'il en foit, la

portion qu'ov leur accorda' ne fuffifant pas

a

leur

cupidité, ils prirent ou faccagerent, en díff, lrentes

époques, Angers, Blois, Saint-Valery, Amiens ,

Noyon, Beauvais, Orléans

~

Poitiers, pillerent le

'Mans , détru.iíirent la citadelle de Pifies, & défi–

rent une armée que commandoient les comtes Eudes

&

Robert, qui paífoient pour les deux héros de

leur fiecle ; ils forcerent enfin le foib-le monarque

a

conclure avec eux un traité, dont on chercheroit en

vain le pareil dans les archives des aL1tres nations.

Apres avoir exigé quatre mille livres pefant d'ar–

gent' ils lui prétenterent deux roles' l'un des pri–

íonniers qu'ils avoient faits, l'autre des foldats qu'ils

avoient perdus depuis le commencement de la guer–

re. Ils demanderent une nouvelle fo1pme pour les

récompenfer de la liberté qu'ils accorderent attx

uns ,

&

pour les dédommager de la perte des au–

tres. Jamais vainquem·s n'avoient impofé uné fem–

blable loi : la conféquence en étoit finguliere ; faire

payer

a

des peuples la vie de ceux qui venoient les

attaquer dans leurs foyers , c'étoit les déclarer ef–

claves,

&

les priver dll plus précieux droit que la

nature prefcrit

a

l'homme ' celui de fa propre con–

fervation. Il fallut obéir ; on leva des impots qui

fi–

re,nt murmurer le peuple : il fe plaignoit de ce que

le roi le dépouilloit, au lieu de le défendre.

Tandis que le feu des guerres confumoit le crenr

de la France , le clergé donnoit des décrets

&

dif–

putoit fur la grace : il

fit

fuftiger Godefcalque , moi-

1

ne Ecoífois. Ce religieux, plus célebre par les perfé–

cution~

qu'on lui fit e:ífuyer, que par la fupériorité

de fon génie, agitoit des queft.ions impénétrables fur

la liberté. Ces queftions fe font renou vellées de nos

jours,

&

ont caufé de {emblables défordres. C'étoient

les memes fur lefquelles les cfnciens philofophes dif–

putoioot avec tant de modération,

&

quileudirent

inventer le dogme du defiin.

Charles,

au lieu de

pourfuivre les ennemis de 1

1

tat,

s'occupa de ces dif–

putes;

&

la flétriífure du moine, qui fut regardée

comme fon ouvrage, augmenta le nombre des mé·

contens. Trop foible pour faire agir les loix ,

Charles

av:oit fait périr un feigneur appellé

Jaushert,

avant

de l'avoir convaincu du crime dont on fe plaignoit.

L'empire qu'il s'arrogea fur les confciences, le firent

accufer d'exercer une double tyrannie. Les Aquitains

mécontensde Pepin, lui avoient livré ceprince,

&

~é­

toient volontairement foumis. Ces peuples faa.ieux

prétendirent rompre cesnouveaux liens,& dépurerent

vers le roi de Germanie , qui confentit, apres bien

de fo.llicitations,

a

recevoir leur couronne: Ce prince