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CHA
état ne fauroit fubíifter fans trouble avec plufieurs
maitres égaux en autorité. Charlemagne, en parta–
feant fes états entre fes fils' leur don na bien
a
tous
la qualité de roi; mais ce titre fublime ne les affran–
chiífoic pas de fon obéiífance,
&
fon intention avoit
été de les foumettre
a
Charles
fon ainé , qu'une mort
prématurée enleva
a
fes efpérances. Louis le Pieux
s'étoit gouverné par les memes príncipes'
il
avoit
exi<Yé l'hommage de Bernard , roí d'Italie,
arriere–
fils
t>
de
harlemagne. Un auteur impartial e.fr done
dans l'impuiífance de jufiifier les prétentions de
Charles le Chauve :
nous ne fanrions etre trop fobres
fur les défordres qu'occafionna fon refus de recon–
noitre la fupériorité de l.:othaire, vn qu'i ls
ap~ar
tiennent en partie au regne de ce prince.
CharLes
fe
vit fur le point d'etre la viétime de fon ambition :
attaqué dans le centre de fes états, il figne un traité
quien le póvant de fes plus nobles
prérogati~es,
le
réduit
a
la jouiifance de
1'
Aquitaine
&
de quelques
comtés entre la Loire
&
la Seine. 11 eft vrai que eet
humiliant traité n'étoit que fubfidiaire ; les deux
princes étant convenus de s'en rapporter
a
la décifion
des feigneurs, daos une affembl 'e générale ; une des
condirions fait connoitre que
CharLes Le Chauve.,
ou
{on
confeil, ne manquoit pas de politique ; il eut le
íecret d'intéreífer Louis de Baviere , dont la fierté
étoit 'galement mécontente de s'abaiífer fous un
maitre ; il protefta qu'il retireroit fa parole ,
fi
.Lothaire faifoit quelque entrcprife fur les états de ce
prince, leur fi·ere commun ; ,mais
n~
l'un ni l'autre
n'avoit envíe de fuivre les loix du traité ; chacun
cherchoit
~
recommencer la guerre avec p·lus d'a–
vanrage.
Charles
ayant eu une entrevue avec Louis
de Baviere, ces deux princes s'unirent par des fer–
mens d'autant moins fufpeéts, que l'un
&
l'imtre
avoient le meme intéret
a
ne les pas violer; ils né–
gocierent , firent des levées d'hommes
&
d'argent,
chacun dans fes états;
&
lotfqu'ils eurent réuni leurs
troupes, ils envoyerent leurs ambaifadeurs déclarer
a
Lothaire que s'il ne rentroit auffi-tot dans fes états,
dont les limites devoient etre déformais m quées
par le cours du Rhin (le roi de Baviere réclamoit
tout ce qui étoit au-dela de ce fleuve), ils fauroient
l'y contraindre le fer
a
la main. Lothaire déclara qu'il
conferveroit tout ce qu'il tenoit fous fa puiífance,
&
que ríen ne pourroir le faire renoncer
a
une autorité
qu'il tenoit de la loi. Rome jaloufe de fe faire valoir
dans une occafion de cette importance, offrit en vain
fa ·médiation. Lorhaire retint les députés du pontife,
&
fe rendit
a
Fontenay, bourg de l'Auxerrois: ce
fm .la qu'apres plufieurs démarches inutiles pour ob–
tenir la paix , fes freres lui livrerent une bataille qui
fut des plus longues
&
des plus meurtieres : des
écrivains modernes, on ne fait d'apres quel témoi–
gnage, ont prétendu qu'il périt cent mille nobles
dans cette fameufe journée ; c'eft une exag ration
détruite par le file-nc-e .des autcwrs contemporains: la
viétoire fe déclara pour les princes confédérés qui ,
dans une caufe injuíle, ne pouvoient en ufer avec
1.1ne plus grande modération: au lieu de pourfuivre
les débris de l'armée vaincue, ils s'arreterent fur le
champ de bataille,
&
pleurerent au milieu du dé–
faíl:re que leur ambirion avoit occafionné. Apres
avoir fait enfévelir les morts, fans ditlinaion d'amis
ou d'ennemis, ils
envo~rentdemander
la paix, fans
autres conditions que celles qu'ils avoient exigées
avant la guerre. Lothaire, foic par ambition, foit par
intéret d'état, r efufa de confentir au démembrement
de la monarchie ; mais il fut forcé de s'y réfoudre:
atraqué une feconde fois par fes freres rénnis, il
abandonna fes états d'en des;a des Alpes,
&
fe r éfugia
dans fon royaume d'Italie: ce fut alors que l'on vit
toute rinconféquence de l'ambition.
Charles
&
Louis
verfoíent
a
l'envile fang des peuples
l
&
s'expofoient
CHA
eux~memes
au danger des batailles, pour ne point
reconnoitre de fupérieur daos un frere, cependant ils
fe,
courbere~t
de leur
propr~ g~é
fous le joug du cler–
ge. Ayant fatt aífembler les veques, ils leur deman.
derent s'ils pouvoient jouir de leur conqu "te
en
'
d
.
'
s
~mparant
es provmces que Lothaire laiffoit fans
defi nfe. Les éveques , flatt
' s
de fe voir les arbitres
de leurs rois , les difpenfateurs de leur couronne
fire~t
une réponfe conforme
a
la haute id 'e que
1
o~
élVOit
?~ ~eur
caraétere; ils _d ' pouillerent le poífef–
feur legttune,
&
firent val01r les droits de la guerre
dans toute leur étendue. La maniere dont il rendi–
rent leur oracle , efi trop importante pour en priver
le leéteur: ''Nous déclarons, de la pan de Dieu di't
'l
'
un pre at au nom de toute l'aífembl' e, Lothaire
?échu de tous fes
droi~s
; promettez-vous , ajouta-t·
d , de gouverner fmvant les pernicieux exemples
de l'empereur votre frere, ou fuivant la volonté de
Diet~?
,; Et_ fur ce q_u'ils répondire_nt qu'ils gouver·
~er<?1entfmvant. la
íag~ife
qtle le c1el pourroir leur
mfp1r.er:''Eh b1en, aJo uta le fin prélat, nous vous
avert1ífons , nous vous exhortons au nom de tous
les ' veques,
&
nous vous ordonnons par l'autoriuS
divine , de recevoir le royaume de votre frere ,
&
d~
le go\1verner fuivant la volonté de Dieu, ( c'eft-a
d1re, fmvant la leur
"·)Charles
&
Louis nommerent
auffi-tot des commiífaires pour régler le partage de
leur conquete, ou plutot de la donation du clergé.
N~tard
, dont nous empruntons une partie de ces dé–
tails, fut au nombre de ces commiífaires ; mais le
partage reíl:a fans exécution. La tempete n'avoit pas
été aífez violente pour priver l'empereur de toute
efpérance. Les débris de fon naufrage étoient encere
~ap~bles ~e
relever fon parti; fon royaume d'ltalie
etOit flonífant ,
&
n'avoit fouffert aucun dom–
mage ; au.
ffi
des qn'il fit
les premieres ouvertu..
res de pa1x , on l'entendit volontiers. Le traité fut
conclu fans retour :
Charles
poíféda fes états com–
me roi
&
comme fouverain,
&
fans aucune marque
de dépendance envers l'empereur; mais ce prince
en affranchiífant fes états , conferva toujours une
ame
é~roite
;
&
fi
d~ns t~ut
le
cour~
de fa vie on ap–
per<;Ol~
quelque
aaio~
d1gne _du t,rone , la gloire en
ap_parttent
toute ennere
a
l'tmperatrice fa mere ,
pr_m_ceífe d'un rare mérite_, qui lui fe;vit de premier
m1mftre ,
&
fit quelquef01s les fonét10ns de général.
Son palais fervit de théatre
a
mi!le faétions ,
&
lui–
me_me de_vint le_jouet de
~él
cour
&
de fon clergé
qlllle tratta tOUJOurs en fu¡et. Les Bretons fe révol...
terent : ces peuples, fujets de la monarchie Fran–
s:oife depuis le regne de Clovis le conquérant , ofe–
rent réclamer leur ancienne indépendance;
&
le foi–
ble monarque oubliant qu'il étoit du fang glorieux
des Pepin, s'humilia devant ces rebelles: il couron–
na lui-meme Ereípoge, fils de Nomenon, qui avoit
commencé la révolte. Lache
&
timide envers les
étrangers
~
comme envers fes fujets,
i1
fouffrit quo
les Normands ravageaífent impunément fes
cotes~
pillaífent les églifes
&
les villes les plus opulentes.
Tandis que ce peuple défoloit ainfi fon état , ce prin–
ce imbécillement dévot' difputoit
a
des moines le
fiérile honneur de porter fur fes épaules les
relique~
&
les chaífes des faints. Ne valoit-il pas mieux ani–
mer le courage de fes foldats,
&
écarter avec eme
l'ennemi du fanB:uaire de la divinité?
Mais quelle que foit la briéveté que nous nous
fommes propofée, nous ne fanrions nous difpenfer
d'entrer dans quelques détails; retracer la vie de
Charles le Chauve,
c'efi dévoiler la fource de nos
anciennes divifioos,
&
montrer
les
principales fe–
couíres qtú nous ont fait perdre le fceptre que pof–
fedent aujourd'hui les Allemands nos anciens fujets.
Lothaire n'étoit pas le feul ennemi que
Charles
eut
fur les bras; Louis
le
débonnaire , outre Lothítire
&