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CHA

juíl:e bienfaifant

&

dévot jufqu'a la foibleffe : il fut

malh~ureux,

paree que pour fe fourenir fur un treme

agité par tant d'orages , il falloit plus de talent que

de bonté , plus ld'efprit que de vertu. Il ne laiífa

point d'enfans légitimes , chofe , dit un moderne , la

plus eífentielle au repos des fouverains.

La mort de ce prince eft la véritable époque de

la

chflte de la famille des Pepin ; ce fut des débris de

fon trone que fe formerent ces principautés, connues

fous différens noms. En France

&

en [ralie, les du–

chés

&

les comtés; en Allemagne les margraviats,

les lanrgraviats, récompenfes amovibles juíqu'alors,

devinrent des états indépendans, que s'arrogerent

les complices de la dégradation de l'infortuné

Char–

les.

Si dans la fuite leur propre néceffité les

for~a.

de

fe réunir fous un chef, ce ne fut plus un fouveram,

mais un égal qui' revetu d'u..'1 titre pompeux' n

'avo.it

aucun .dr.oit

a

leur obéiífance. L'ltalie , la Ger

mame

&

la France, unis depuis pluíieurs íiecles, forme–

rent des états féparés

~ o~

régnerent une

f~ule.

de

petits tyrans ' acharnes 1un l'autre

a

fe detruxre.

(

T-N.)

CHARLESIV,fumommé

LE SIMPLE, (

Hift. de

'France.)

xxxe.

roi de France, fils de Louis-le-begue

&

d'Adélaide, naquit l'an 88o; les orages qui l'a–

voient écarté du trone, apres la mort de Louis

&

Carloman fes freres, ne luí permirent pas d'y mon–

ter apres celle de Charles-le· gros;

í1

touchoit a peine

a

fa huritieme année,

&

les

Fran~ois

avoient fenti le

befoin' non d'un enfant ' dont la foible main eut

pu

augmen'ter les défordres ' mais d'un homme mur '

dont la fageífe

&

le bras fl'tt les conduire

&

les dé–

fendre. Privés de tout efpoir du coté de la famille

roya le, dont il ne reftoit que ce rejetton, ils avoient

jetté les yeux fur Eudes, comte de Paris, feigneur

également diftingué par la fupé

rité de fon génie

que par fon courage héroi:que. Eudes jufrifia par les

fucces les plus éclatans, le choix de fes compatrio–

tes; mais quelques fublimes que fuífent fes talens,

le confeil du jeune prince voyoit avec une douleur

amere qu'il en abufoit. Les plus fages auroient deíiré

qu'il fe fllt. contenté de diriger le fcept!e fans

f~

l'ap–

proprier; 1ls parlerent en faveur du 1eune pnnce ,

mais leur réclamation n'opéra aucun effet :

CharLes,

oblia ' de s'enfuir en Angleterre, ne put monter fut

le ttone de fes peres , qu'apres la mort de cet heu–

reux ufurpateur. Eudes, en mourant, reconnut fes

fautes ;

&

lorfqu'il pouvoit tranfmettre le diademe

a

fa pofrérité ( quelques auteurs prétendent' mais

a

tort, qu' Arnould.,. fils d'Eudes luí fuccéda )

?

ille

remit entre les mams des nobles, en les conJurant

de le rendre

a

leur fouverain légitime; mais en re–

conrioiífant les droits de

Charles,

il ne lui étoit pas

facile de réparer le mal qu'avoit fait fon ambition.

Les

Fran~ois

étoient aífez éclairés fur leur devoir,

pour favoir qu'ils n'étoient

pa~

libres de leur fuffra–

ge , lorfque le trone avoit des héritiers. Depuis !'ori–

gine de la monarchie ils n'avoient eu d'autre droit

que celui de fe choifir un maitre erttre plufteurs pré–

tendans, égaux en naiífance: l'age des princes n'avoit

jamais été un obfrade

a

leur élévation; feulement

on leur nommoit un confeil de régence. Eudes ,

comme le plus capable, el'tt pu fe contenter d'y oc–

cuper la premiere place ; il ne put déroger

a

ces

príncipes fans s'engager a de grands facrifices : auffi

Charles,

en montant fur le trone , ne vit plus que

l'ombre de la monarchie; les feigneurs avoient at–

teint leur buten fe rendant propriétaires héréditaires

de leurs gouvernemens; o\1 comme nous l'avons

d 'ja fait connoitre, ils exer9oient, en qualité de

ducs, de comtes ou de marquis, toute l'autorité ci–

vile

&

militaire. La royauté ne coníiftoit plus que

rlans un vain hommage;

&

CharLeJ

n'avoit plus 'rien

a

propofer

a

leur émulation. Ce prince leur parloit

Tom' 11.

CHA

347

bien

d~honneur

&

de patrie , mais ces cris autrefoi

fi

puiífans fur eux ne les touchoient plus ; flattés de

l'obéiífance

f~rvile

qu'ils erigoient des peuples , de–

venus leurs fujets ou plurot leurs viélime , ils éroient

infenGbles

a

la gloire de les défendre.

Charles

a force

de prieres les engagea cependant

a

le fuivre en Auf–

t raíie , nommée alors

Lotharingie,

&

depuis

Lorrai–

ne

par adouciífement. Il médiroit cett cooqüete ,

moins pour illuftrer fon regne que pour fe mettre

plus en état de retirer les privileges que les vaífau"

s'étoienr arrogés :un <;_oup d'autorité qu'il porta trop

tot, a l'infrigation de Foulque, fon principal minif–

tre, fit malheureufementéchouer fes deífeins. Ayant

oté la ville d'Arras

a

Baudouin , comte de Flandre ;,

fucceífeur de celui dont j'ai parlé fous Charles-le–

chauve, celui-ci fonna l'alarme

&

réveilla

l'inquié~

tude des feigneurs. Robert-le-fort, le plus coníidé–

rable d'entr'eux, joignit auffi-tot fon mécontente–

ment a celui du comte : Robert ambitionnoit la

COU•

ronne,

&

fes efpérances étoient d'autant mieux:

fondées , qu'ill'avoit déja vue fur la tete d'Eudes

fon frere : les moyens qn'il prétendoit mettre en

reuvre ponr y parvenir, le rendirent doublement

coupable; il fit une ligue fecrette avet les Normands

qui avoient envahi la feconde Lyonnoife, dont ils

P<?ífédoient une partie.

Charles

fe voyant dans l'im–

puiífance de conjurer cet orage, eut recours

a

ces

memes ennemis que lui fufciroit le perfide Roberr.

Francon, archeveque de Rouen, fe chargea de la

négociation,

&

fut engager Raule ou Rolon a préférer

l'alliance d'un roi acelle d'un fu jet. Raule étoitle chef

des Normands,

&

c'étoit le capitaine le plus intrépi–

de qui eut jamais mis le pied fur les terres de France;

il avoit fait abattre les murs de Rouen, d'oi1 il voloit

tantot en Angleterre, tantot de l'une

a

l'autre extré–

mité du royaume.

Charles

confentit

a

lui donner Gi–

felle, fa filie, avec tout le pays compris entre l'Epte

&

la Bretagne, n'exigeant des barbares que l'adop–

tion du Chriftianifme. Raule accepta

ces

condítions,

apres avoir pris confeil de fon armée ;

mais

ce chef

politique rte rompit pas pour cela avec Robert, il

le préféra meme

a

CharLes

pour fon parrain : en les

ménageant ainfi l'un

&

l'autre,

ille~

enchainoit par

une crainte refp<iélive,

&

fe tenoit toujours en état

de fe déclarer pour celui gui lui offriroit de plus

grands avanrages ; auffi ne tarda-t-il pas

a

faire de

nouvelles demandes, meme avant de conclure le

traité. Il envoya une députatioh

a

Charles

,

lui dire

que les tetres qu'on lui cédoit étant dépourvues de

· bétail, on devoit lui en procurer d'autres o1t fes

gens puífent trouver une exifrence plus commode;

le roi fut encore obligé

a

ce facrifice, voyant bien

que s'il refufoit quelque chofe, Robert qui étoit

préfent ne balanceroit pasa tout accorder. Le terri–

toire des villes de Rennes

&

de

Dol

ayant été cédé

a Raule; il fe fit donner des otages ,

&

paífa l'Epte

pour confommer le traité. Cependant

CharLes

exi–

geoit l'hommage,

&

le fier Normand n'en vouloit

pas rendre ; il trouvoit íinguli'er qu'un roi qui lui

demandoit grace, prétendit le voir s'humilier devant

lui. Ce r.efus alloit occaíionner une rupture, Iorfqwe

des courtifans faiíiífant le moment

,

lui prirent les

mains

&

les porrerent avec pr 'cipitation dans celles

du roi. Ce

fut

en vam qu'on voulut en exiger davan–

tage,,

~~jura

qu'il. ne

r~c?nooi~oi~ p~mr

maitre que

fon epee,

&

que Jamms

1l

ne flechtrolt devant aucun

prioce. Les francrois défefpérant de vaincre fon opi..

niatreté' engagerent un de fes lieutenans a achever

la cérémome, mais celui-ci non moins fier que le

duc, prit le pied du roi,

&

au lieu de le lui baifer

avec refpeé.l:, il le leva jufqu'a fa bouche

&

le

fit

tomber

a

la renverfe. Cet outrage manqua d'occa–

f:onner un grand défordre ; mais les courtifans

voyant bien que

Charles

n'étoit pas le plus fort,

Xx

ij