CHA
tournerent
la
chofe en plaifanterie.
Le
roí rédm.t
.a
ailfimuler' confentit
a
l'entiere aliénation de la fe–
conde
L
yonnoife
,
qui depuis
prit
le nom de
Norma'!–
áie
qu'elle conferve encere aujourd'hui, avec
les
lo1x
du conquérant. Une obfervation importante fur ce
fameax traité, c'eft que le nom de
Robert
y
fut
e~primé
&
placé immédiatement apres celu1 du ro1,
chofe inouie jufqu'alor
s
,
c'étoit un honneur anquel
jamais fujet n'avoit prétendu;
~
l'on peut dire qu'il
y
affifta moins a la cérémome comme va!fal de
Charles,
que comme garant
~u
traité. Lorfque tout
eut été réglé fans retour, tl pafia l'Epte
&
alla a
Ro uen avec Rollon, qui re<;ut en fa préfence l'hom–
mage de Berenger, comte de Rennes,
&
d'Alain,
comte de Dol. Ces deux comtés , les plus confidé–
rables de la Bretagne , ne furent dans la fuite que des
arrieres-fiefs de la couronne.
Depuis ce traité
Charles
ne ceífa d'&tre traverfé
par le perfide Robert; il fe crut oblig€ a tant de mé–
nagemens, qu'il n'eut point aífez de confiance pour
terminer .un différend quí s'étoit élevé entre les ha–
bitans d'Auxerre
&
ceux de Tours, au fujet de la
chaífe de faint Martín ; il leur répondit que les uns
&
les atltres lui étoient également chers,
&
qu'il
feroit au défefpoir de les mécontenter. Ce monar–
-que étoit d'autant plus fenfible aux procédés injufies
-de fes fujets ' que s'il eut été fecondé'
il
luí auroit
été facile de réunir fous fa puiírance tous les états
de l'ancienne fucceffion de Charlemagne.
11
ne reftoit
.a.ucun rejetton de la tige de ce grand homme en
Allemagne,
&
fon fang ne fe foutenoit plus en Itp.lie
que par des defcendans de femmes, que la loi avoit
toujours rejettés : il fit cependant quelques tentatí–
ves pour jufiifier fes droits , mais elles ne fervirent
qn'a faire connoitre fa foibleífe; il ne put s'oppofer
a
l'éleél:ion de Conrad, que les Germains placerent
íur le trone, fans autre droit que leur fuffrage.
Charles
fut cependant s'attacher les Lorrains, lorf–
qu'ils délibéroient poU:r fe donner au nouveau
roi
de
Germanie;
&
ce qui fait fon éloge, c'eft qu'il n'eut
qu'a fe montrer meme fans armée : mais les feigneurs
avoient juré fa perte;
&
pour avoir un prétexte,
ils
hti
firent un crime de paírer trop de tems avec
Haganon : préfidés par Robert , ils le fommerent de
déclarer s'il entendoit continuer fa faveur
a
ce che–
valier qui étoit fon minifire;
&
fur ce qu'il répondit
qu'il
fe ferviroit de fes droits pour fe défendre-, ils
prirent chacun une paille, la rompirent
&
la jette–
rent
a
fes pieds ' pour marque qu'ils refufoient de le
reconnoitre déformais pour leur fouverain; ils fe
retirerent auffi-tot
a
l'extrémité du champ Oll ils te–
DOÍent cette aífemblée féditieufe. Le roí étoit des-lors
dépofé, fans un comte, appellé
Hugues;
ce comte
1.1fa d'un firatageme qui fait aífez connoitre quelle
étoit la difpofition des feigneurs ; il feignit d'approu–
ver leurs deífeins,
&
ne les blama que de leur mo–
dération. Quoi , leur dit-il, le roi vous déplait
&
vous le laiífez vivre
?
ne vaut-il pas mieux le tuer
que d'expofer le royaume
a
une guerre civile
?
il
pouífe auili-tot fon cheval vers le roi , comme
ft
vraiment il avoit voulu le frapper; des
qu~
Hugues
put fe faire entendre du roi, il lui dit que le feul
moyen de conjurer l'orage étoit de confentir
a
fa
démiffion dans unan' s'il donnoit lieu
a
fes fujers de
fe plaindre de fa conduite;
&
fur ce ·que
Ch.arles
y
confentit' le comte retourna
a
l'aíremblée ou
¡¡
prit
ouvertement fa défenfe : on avoit d'autant plus de
confiance en fes paroles qu'on le regardoit comme
le plus cruel ennemi du roí. Les feigneurs corrom–
pus par Robert, refterent cependant dans l'irréfo–
lution,
&
ne parlerent ni de fa démiffion,
ni
de
fon rétabli!fement. Hervé , archeveque de Reims,
le feul qui eut réfifté
a
la contagien
&
aux brignes
de Robert, offrit un
afyle
a
l'infortuné momtrque,
&
CHA
le conduiút
a
Cruni,hameau d 'penclant de fon dio
eefe.
Charles
confiné dans cette retraite, fit agir tous
les
reíforts qui pouvoient relever fon partí :
il
conclut
un traité d'alliance avec Henri, fucc ífeur de Con–
rad.
n
ne devoit pas en attendre de grancls fecours :
la politique d'un roi de Germanie ne demandoit pas
que
1'
on fortifiat un defcendant de Charlemagne; auffi
le roi en fut-il bientot abandonné. Henri embraífa le
parti de Robert qui, ne jugeant plus
a
propos de:
feindre , fe fit facrer
&
couronner
a
Reims.
C{1arles
errant
&
profcrit, fe retira en Aquitaine,
ou
quel–
ques feigneurs, émus par le fpeétacle de fes infortu–
nes' confentirent
a
le fuivre centre l'ufurpateur qui
campoit fur l'Aine aux environs de Soi:ífons, un peu
au-deífous de cette ville. Ce fut le
24
juin que fe
livra la bataille qui devoit décider du defiin du roi.
Robert avoit des forces infiniment fupérieures.
Il
ne
fit cependant aucun mouvement pour attaqueP..
Char–
Les
voyant qu'il reftoit fur la défenfive, paífe la
ri–
viere ,
&
marchant en ordre de combat, il mene fon
armée jufques centre les lignes de l'ennemi. Robert
ne pouvant plus reculer, s'avance armé de toute
piece,
&
met hors de fon cafque fa barbe longue
&
blanche pour etre reconnu des úens pendant la char–
ge. Le combar fut long
&
opiniatre , l'ufurpateur
périt d'un coup de lance que lui porta le ro1, ou,
felon d'autres, d'un coup de {abre que le comteFul–
bert luí déchargea fur la tete. La mort du chef don
na
une nouvel1e ardeur aux rebelles. Rugues, fon fiis,
fe meta leur tete' défait
&
taille en piece l'armée
roy~le.
Gharles,
accablé par tant de revers, recoú–
rut a
~a négoci~tion; ma~s
Rugues, qui en craignoit
les fuues , en mterromp1t le cours ,
&
fit procéder
a
une nonvelle éleB:ion. Ce comte, qui eut mérité
le nom de
Grand
que luí déféra fon íiecle , s'il eut
combattu pour u
meilleure caufe , panlt plus
ja–
loux de difpofer de la couronne que de la porter.
U
envoya demander a Emme fa freur , femme de
Raoul, duc de Bourgogne, lequel elle aimoit mieux
voir roi ,de lui ou de fon mari? Et fur ce qu'elle répon..
dit qu'elle aimoit mieux ernbraífer les genoux d'un
époux que d'un frere , Raoul fut couronné
&
facré
dans l'églife de faint Médard de Soiífons. Le roi paífa
auffi-tot la Meufe; il fe retiroit en Aquitaine, lorf–
qu'un traitre vint lui porter le dernier coup. Herbert
tel étoit le nom du pedide, lui députa quelques
fei~
_ gneurs,
&
lui fit dire qu'il pouvoit encore
lui
faire
r~ndre
la couronne.
11
le prioit de venir a Saint–
Quentin dans le
V
ermandois.
Charles
avoit été trahi
tant de fois' qu'on eut peine
a
lE:
perfuader; mais
réduit
a
Ce point Oll la mort lui fembloit un bienfait,
il fe laiífa conduire par-tout ou on jugea
a
propos de
le mener. Herbert ne l'eut pas plutot en fa puiffance,
qu'il feignit de lui rendre tous les devoirs de fujet.
11
fe jette a fes pieds' embraífe fes genoux;
&
fur ce
que fon fils recevoit debQut le baifer du toi, il luí
donne un grand coup fur l'épaule:
Apprene{
lui dit·
il,
que ce n'ejl
pas
ainfl que
t'
on re9oit Le baife; de fon
fouverain, de fon feigneur.
Ces témoignages de ref–
peél: firent renaitre
1
'efpérance dans le creur du roi.
J:Ierb~rt
n'en ufoit de la for'te que
po~tr
l'engager
a
hcenc1er~s
gardes ;
Charles
y
confentit volontiers ;
mais au lieu d'un royaume, on ne lui donna qu'une
obfcure prifon. Le traitre le conduifit au
Ch~heau
Thierry, d'ott
il
ne fortit daos 1a fui te que pour con–
firmer l'ufurpation du duc de Bourgogne. Raoul, qui
vouloit un titre plus légitime que le fuffrage des
feigneurs, l'engagea
a
renoncer
a
tous fes droits en
fa faveur,
&
lui donna, par une condition du traité,
le bourg d'Attigny en échange de la couronne. Flo–
doart ne fait aucune mention de ce traité. Suivant
cet auteur, le roi ne fortic de fa prifon que par un
mécontentement de Herbert ,
&
y
rentra pref–
~Uffi·t9t,
l'ufurpateur ayant défarmé le
comte en