TAU
du ré'cit de M. Gramond , qui étoit alors préíident de
ce parlement.
Prefque dans le meme tems (au mois de Février
161
9,
dit ce préfident ) , fut condamné
a
mort , par
arret de notre cour , Lucilio Vanini, que j'ai tou–
JOurs regardc comme un athée. Ce malheureux fai–
roit le médecin,
&
étoit proprement le féduéteur
'de la jeuneífe imprudente & inconfiderée ;
il
ne con–
noiífoit point de Dieu, attribuoit tout au hafard;
adorant la natme comme une bonne mere,
&
com–
me la caufe de tou/) les etres. C'étoit la fon erreur
principale ,
&
ii avoit la hardieffe de la répandre
i:hez les jeunes gens pour s'en faire autant de feéta–
teurs ; 'il fe moquoit en meme tems de
tOll~
ce qui efr
lacré
&
religieux.
Quand on l'eut
m~s
en pr'jfon, il fe déclara catho–
iique,
&
contrefit ['orthodoxe. Il étoit meme fm le
point d'etre élargi a caule de l'ambiguité des preu–
ves , lorfque Francon, homme de naiílance
&
de pro–
bité, dépofa que
Va~ini
lui avoit fouvent nié l'exi"
fience de bieu ;
&
s'étoit moqué en fa préfence des
myín:res du Chrifiianifme. On confronta le témoin
&
l'accufé, & le témoin foutint fa dépofition.
. Vanini fut conduit}! l'audience,
&
étant fur la fe1-
lette, on l'interrogea fur ce qu'i1 penfoit de,l'exil1en–
ce de Dieu : il répondit ; qu'i1 adoroit avec l'Eglífe;
im Dieu en troís perfonnes,
&
que la nature démon
troit évidemment l'exifience d'une divinité, Ayant
par haú!rd apperc;l! une paille aterre, illa ramaira,
&
étendant
la
main, il parla
a
fes juges en ces ter–
mes:
¡(
cette paille me
forc~
a
croire qu'il y a un
;/ D ieu
>l.
De-la ayant paífé
a
la Providence, il ajou–
la:
1<
Le grain jetté en terre femble d'abord détmit,
" &.
wmmence a blanchir; il devient verd
&
fort de
)/ terre , il erolt lnfen!ibl mel1t;
l~s
rQfées l'aident
el
" fe développer; la pluie lui donne éncore pltis de
,/ force; il fe garnit el'épis, dont les pointes éloi.:
)/ gnent les ojfe.aux, le tuyau s'éleve
&
fe couvre ele
,~feuilles; ~!
jaunit
&
monte plus haut; peu
apr~s
il
,~
commence
a
baiírer, jufqu'a ee qu'il meure; on le
}) bat aans l'aire',
&
la paille ayant été feparée du
" grain, cdui-á fert a la noürriture des hommes,
)/ celle-la efi donnée auJe animaux créés pour l'ufa–
'~ge
du genre humain ".
n
conduoit de cela feul, que
Dieu efi l'auteur de toures cl1üfes.
,
POUí'
répondre al'objeéfioh qu'on auroit pÚ frire ;
que la nature étoit la caufe
de
ces'produ8:ions, il re–
prenoif fon gniin de blé,
&
remontoit de caufe en
caufe
a
la premiere , taifonnant de cette maniere.
Si la natme a produit ce grain, qui efi-ce qui a
produif fautre grain, qui l'a précédé immédiatement?
Si ce grain en auffi procluit par la nature , qll'ofí re–
monte jufqu'a un alltre, jufqu'a ce qu'on foit arrivé
au premier, qui néceífairement aura été créé, puif–
qu'on he fatlroit trouver d'autre caufe de fa produc–
tion. Il prouva enfuite fort au (ong que la nature étoií
incapable de créer quelgue chofe; d'ol! il concha
que Dieu étoít l'auteur
&
le créateur de tons les
~tres,
Vánini, continue
M.
dramond , difoit tout
cela par cralnte plutót que par une pérfuafion inté·
rieure ;
&
(omme les preuves étoient convai ncantes
contre lui , il fut condamrié
a
la mort.
Voye{
Gabr.
~arfhol.
G
rammundi hiPoría
,
Liy. IIl. flag.
:J.
o
8.
:41 0 .
Quel qu!ait été Vanini , les procédnres du parle–
:inent de TOllloufe ,
&
fa
rig~ieur ~nvers
ce malhen–
l"eux , ne peuvent guere
s'ex~l1fer.
Pour en jllgér fans
prévention ,
i1
faut cónfiaérer ce miférable tel qu'il
parut dans le cours du proces, pefer les preuves fu);'
lefquclles il fut condamné,
&
l'affrel1fe févéritéd'une
{entence par laquelle il fut brulé vif,
&
au préalable
{a langue
an'ac~ée
ávec des' tenailles par la main dll
bourreau.
11 y a tontes les
appar~It,es
dt! monde que Vanini
¡(jm~
X
té.
'. '-
.. .
TAtJ
s\~toit
depuis long tems é happé en diCconrs libre ;
injurieux a la religion , fous
&
impies ; mais la r -
tral1ation qu'il en lit d(\voit fuffire él. des juges , qllel–
les
que
fuírent fes penfées fécrettes
ql.1e
Di u feulcon–
noiIoit. La dépofition d'un uniql1e témoin ne fuffi.–
foil pas,euífe été celle d'un dauphin meme. Le
pr
'íi–
dent dl! pétrlement ne cite que
M.
Francon , homme
de nailfance
&
de probité tant qu'on voudra; la
10Í
!equéroit au-moins outre des preuves par écrit, deux.
hommes de cet ordre ,
&
la loi ne doit jamais etre
violée, fur.:.tout qlland
il
s'agit de la peine api-,
tale
Ce qui prouve qu;on njoppofoit rien de déniol1tré
&
de concluant pour
la
condamnation a un {upplice
horrible,c'ell: que
qllelques-u~s
des
juge~
déclarerent
qu'ils
ne penJoient point avoir de preuveJ fuffifames
,
&
queVanini ne fut condámné qÜ'a la
pLuraLid
d~s
'JIoix.
Ceft encore une chofe remarquab1e , qu'il ne p'lrolt
point qu'on ait allégué fes ollvrages en preuve contre
lui, ni le crime qu'on alfure qu'il avoit commis dans
un couvent en Italie.
Apres tout, le parlement de Toulollfe
pOtivo~t
&
dévoit reprimer l'impiété de <le malheureltx par des
voies plus adaptées a la fobleífe humaine ,
&
plus
<lonformes
a
la jufiice ;
a
l'humanité
&
a la religion.
En déteíl:ant l'impiété qui excite l'indignation , on
doit avoir corripaffion de la perfonne de l'il11pie.
Je
n'aime point voir M¡ Gramoncl , préíident d'un
par~
lement, raconter dans {on hifioire le fllpplice de Va–
nini avec lln air de contentement
&
de joie. Il avoit
connu Vanini avant qu'il fllt'arrcté; ille vit conduire
dans le tombereau ;ille vit au fupplice,& ne détouma
pas
les yeux, ni del;aétion dubourreau quilllicollpa
la langlle, ni des flammes du tlll(¡her qui confumerenll
fon corpsi
-
, Cependant tdus les bons efprits qüi Joignent
tes
1umieres a la modération, ont regarné Vanini, apres
un mur examen, comme un miférable fou digne d'etre
ienfermé pour le rell:e de fes jours. Il joignoit
a
une
imaginarían ardente peu ou point de jugement. La
leéture de Cardan; de Pomponace
i
&
d'autres au"
tenrs de cette efpece, 1ui avoient de foisa autretrou'"
blé le fens cemmun. Il rafolo;t de l'aftrologie, metant
dans fes ollvrages le fauJ/:
&
le '\'rai, le mauvais
&
le
bon, difputant a-tort
&
a-travers; de (orte qu'on
voit moins 'dans fes écrits un fyfieme d'athé'jfme, que
la produtl:ion d'ulle tete fans cervelle
&
d'un efpri1i
dé~églé!
, .
.
Ybil~rl'~dée
qtíe s;é'n f"brtt aújoürd'hu'i
des
ltortime!i
~e
lettres tres.refpeétables ,
&
c'~ft
en particulier lé
Jugement qu'ert porte le favant Btlicker dans fon
lzijl..
érle.
pldlo! tomo IV, p.flrt. IV. pago
,580-68::l.
dont
j
e
me conterrterai de citer quelque's lignes qlli m'ont
perra tres-jadicieufes; les voici
i
Superjlitioni itaque , entlzttflafmo
&
¿nani de re6us
nihiLi morológice
,
flu Lti.f!imum Vanini
fe
addixi/fe ín–
genium
,
eo minus dubitandum
ifl
,
quo minus
pauc~
ilLce lucís cLdrioris fcintiLLre, qUte lúnc inde e'micant ,fu–
perare
ifiá~
tenebras pOluerum. Afl his
fe
junxerat inepta
ambitio
,
quá
fe
Pe'teris
f..
recetttioris revi /zeroi'bus cantd
trttditionisjaClantiá prcefetebat,
ltt
rifum tonere Legentes
neqiteatt.t .. •
Slltftcere 'htec páuca pOffitTit,
tU
intelfigamus
Atzty..
c.rris opus
lzabl~iJIe
cmbrum .Ya,,:i,!i,
&>
ext:emdfluLeí..
tue notrlm fu{lmere. Quce mfiLtcltas exorbuamis fine
regentejudicio imagínationis, non
pO~iLit
non yald¿aUJ
geri
,
cám ineptiflimi í/ti pr(J!ceplores comígiflent, qur.
oLeul7l camino addere , quam áqua ignem dolose Latemem
extinguere maLllemnt, qudLis Pomponaúi
&
Cardant
Libri, atque difcipLinaflterunt. His tOluS cormptus
Va~
llillftS,
quidflatuerit
,
de
ql~O
cerlam¡e,ttentiarn figerel
ipfe ignorayit;
&
fine mantephiloJophá blalerr..m, bOlla
:1
mala, reCla
1
¡¡¡iqua) Yera) faifa, ambigua, diJPulan/¡
DDDddd