l.
O
MAN
q oe les
Jaaliftn,
oinfi que ks appelle
M.
HyJe, auroien!
été mis en t"uite par des raifons
a
priori,
prifes de la
patur.e de D ieu; mais il s'imagine qu'ils
u iompheot
i
leur tour, quand on vieot
aux
raifons
a
pofluiori,
pri–
fes de l'exitlence du mal .
11
fam l'avouer , M. B•yle,
en écartaot du
Manichlifm•
les erreurs groffieres de fes
premiers défeofeurs, en
a
fabriqué un fyll c me, kquel,
cm
re
fes
mains,
p:~rolt
armé d'une force nouvelle qu'il
n'avoit pas autrcfois. Les obje&io ns qu'il a femées dans
di
vers
endroirs de fes o u vrages, lui o
m
paru fi forres
& .
fi
rriomphtntes, qu'il ne crairu pas de dire, que la rai–
fon fuc<:o mbera fons leur poids, toutes
les fois qu'elle
emreprendra d'y répoodre. La raifon, feIo n luí, efl un
príncipe de ddlruétiott,
&
non pas d'édification: elle
n'efl propre qu'a former des domes,
a
éremifer les difpu–
tes,
&
il
faire connol tre
a
l'homme fes
ténéores, Co n
impuilfance,
&
la nécclfité d'une révélarion,
&
cette ré–
Yélation efl celle de I'Ecriture . C'efl-la que nous trou–
vons de quoi réfuter in,•iuciblement l'hypothefe des deux
príncipes,
&
toutes les objeélions des Manichéens ; nons
y
rrouvons !'uniré ·de D ieu
&
fes perfeélions inñnies, la
.:hute du premier homme,
&
fes fui res fnuefles .
Comme M. Rtyle n'ell pas un anragonille du com–
mun, les plus favanres phi=s de l'Europe fe font ef–
fayées a le réfuter . Parmi ce grand nombre d'aurenrs,
on pem compter
M.
Jaquelor, M . le Clerc,
&
M .
Leibnitz:
cornmen~oos
par M. Jaquelot,
&
voyons li
daos cctte difpute il a eu de l'avamage.
M.
Jaquelot fuppo(e pour príncipe que
la liberté de
l'homme peut réfoudre toures les difficuhés de M. Hay–
le. Dieu ayant formé cet
univer~
pour fa glo;re, c'ell-
3-dire pour recevoir des créarures J'adoration
&
J'obéif–
fance qui luí efl due:
l'~rre
libre étoir feul capable de
conrribuer
a
ce delfein du cré3teur. Les adorarions d'une
créarure qui ne feroit pas libre, ne conrribueroient pas
da vantage
ii
la gloire du créateur que ne feroit une ma–
chine de fi gure humaine, qui [e
pro~rneroit
par la
ver–
tu
de
fes retfc>rts . Dieu aime la fainteté; mais quelle ver–
tu
y
auroit-il,
C.
l'homme é roit dérerminé néceffoiremem
par
(a
narure a fu ivre le bien, comme le feu efl d.!rer–
miné a brOier?
11
ne pourroit done y avoir qu'une créa–
t ure libre qui püt exécurer le delfein de Dieu. Ainli,
quoiqu'une crbtnre libre put abulcr de
Con
franc arbi–
tre, néanmoins un étre libre éroir quelque chofe de
fi
relevé
&
de
(j
angufl e, que
Con
eicellence
&
fon prix
l'empo rroienr de beouc:lup íitr roures les fn ites
les plu s
Hchcufes que pourroit produire l'abus qu' il en feroit.
Un monde rernpli de vertm, tnais fans liberté, efl beau–
coup plus irnparf•it que celuí ou regne cette lrberré,
quoiqu'clle entralne
ií
fa fuite bien des dé[ordres M.
Bay le
rcnverf~
tour cet argurnenr par certe feule coofi–
Mrarion , que
C.
l'une des plus íublimes perfeélions de
Dieu, ell
d'~tre
ri dérerminé
a
l'amour du bien, qu'il
implique contradiélion, qu'il pniiTe ne pas
l'aimer: une
créarure dérerminée au bien (eroir plus conforme a la
nature de D ieu,
&
par conféquenr plus parfaite qu'une
créarure qui a un po uvoir égal d'aim cr le crimc
&
de
le húr. Jamais on n'ell plus libre que lorfqu'on efl
tixé
dans le bien. Ce n'efl pas erre libre que pouvoir pécher.
Certe malheureufe puilfance en cfl l'abus
&
non la per–
feél ion . Plus la liberté ell un don eicellenr de Dieu,
plus die doir poner les caraéleres de fa bonté. C'ell
done mal -a-propos, conclur
M.
Bayle, qu'on cite ici la
liberté pour expliquer !'origine du mal. On pouvoit lqi
r épu ndrc que D ieu n'ell pas obligé de nons douer d'une
lieerté qui ne fe porte jamais vers le mal; qu'il
ne
pent
la rerenir conflamrnenr daos le devoir, q o'en luí accor–
dant de ces graces congrues, dortt le foutle falmairc nous
conduit ao port du falur. J'avoue, difoi r M. Bayle, qu'il
ne nous devoit pas une liberté
fi
parfaire; mais il fe de–
voir
ií
lui-me rne d'empecher tous les délordres qu'etl–
fame l'abus de la liberté ;
r~
bonté, fa
fage!Te'
&
plus
enca re fa fainreré, luí en farfoient uue loi. Qr, cela po–
fé, comment done concilier a vec tous ces attributs la
chute 9u
pre~nier ~01mne ?
Par quelle étrange farali¡é
cerre lrberté
Ir
précreu fe ,
ga,~e
de l'arl)our divin , a-t-elle
produir, des
!(m
prcrnier cou p d'elfai,
&
le e rime
&
la
m ifere qui les fttir ,
&
cela fous les yeux d'un D ieu io–
liniment bon ,
infinimeor C.1int
~
intjnimeor pniífant?
Certe Jil¡erté qui pouvoit erre dirigée co nllam rn cnr
&
invariab:crnent an bien, fans perdre de fa uature, avoit–
elle done éré donnée po ur cela?
M . . Jaquelot ne s'arrere pls
a
la feule liberté , pour
expliquer !'o rigine du mal; il er¡ cher.che 3ljffi le dénoue–
m enr dans les
intér~ts
&
de
la lagclfe
&
de la gloire
de D ieu . Sa fagelfe
&
fa gloire l'ayant dé terminé
:l
for–
m er des créatures libres, cerre puiiTanre raifon a dú l'em–
porter fur
les
ficheu[es
fuire~
que pouvoit · avoir certe
MAN
liOert~
qu'il .donnoit au1 horn!nes . Tous les
inconvé–
niens de la Jib<rté q u'il cfh nnou aui hornmes . Tous les
iuconvé uiens de la liberté n'éroicnt
pa~
capables de c;>n–
tre-balancer les raifons trrées de ra fagea e. de fa puif–
fau ce
&
de fa
g lui~e.
D ieu a
cr~é
des
2t~es
libres pour
f• g loirc . C o mme done les <lelfems de Dreu ne tenderu
qo'a fa proore gloire,
&
qu'il y
~
d'ail leurs une
pi~&
ample moiffim de ¡;loirc daos la drredrou des.
a~r:n<
lr–
bres qui abnfenr de lcur liberté que dans .la d1reélton du
~en
re humain tou¡mtrs vertueux , la permrffion du péché
&
les luir
e<
du péché
lo or
une chofe
tr~
·-conforme
i
la faaelfe di vine. Certe rJifon de la gloire paroir
ií
J\t.
J
aqu~lot
un bouclier impénérrable pour parer rous le&
coups du
Manicblif nu.
11
la trouve plus forte que ro
u–
res les difficultés qu'on oppofc , paree qu'elle cfl rirée
immédiatement de la gloire du créatenr. M . 13ayle nr:
peur digr!rer cerre e<preffion , que
Dieu ne er,zvaille
9ue pour fa gloir..
11
ne peut comprendre que l'érrc
intini, qui trouve dons fes proprcs perfeélions une gloi–
re
&
une béatitude auffi
incapables de diminution que
d'augrnentarion, puiffe avotr pour but, en produifant de&
créarures, quelqu'acqui(Jtion de gloire. En ellct, D ieu
ell au-deiTtiS de wur ce qu'on nomme
¿,¡¡r
de fortan–
gn,
dejir ¿, rl{'lltaeion.
11
paroir do ne qu'il ne peut
y
avoir en lui d'autre mn1if de créer le monde que
fa
bonré. Maís enfin, dir
M.
Bayle, ti des motifs de gloi–
re l'y dérerminoienr, il femble qu'il choiliroir plurór la
p,loire de mainrenir parmi les hommes la vertu
&
le br>n–
heur, que !a gl oire de montrer que par une adrelfe
&
une habileré infinie il vienr a bour de conferver
la fo–
c-iéré humaine, en dépit des confulions
&
des défor–
dres, des erimes
&
des mileres dont elle efl
remplie ;
qu'a la vér'té un grand monarque fe peut eflimer hen–
reux, lorfqne co nrre Ion iutemion
&
mal-a-propos, la
rebellion de fes fujers
&
le caprice de fes voifins lui ont
arriré des guerres civiles
&
des guerres étrangeres, qu(
luí oot fourni des occafions
de faire briller fa valeur
&
ra prudence; qu'en diffipanr tout.es fes templ:res, il s'ac·
qniert un plus grand nom,
& fefait plus admirer daos
le monde que par un regne pacifique. Mais, li de erain–
te que ron courage
&
les grandes ralens de fa politique
ne demeuralfent ioconnus , faute d'occafions,
il ména–
geoit adroitement un concours de
cir~onllances,
daos
lefquelles
il
feroit porfuadr! que fes
fujets
fe révolre–
roient,
&
que Ces voilins dévorés de ¡aloufie fe
ligue–
roienr contre lui , il afpireroir
it
une gloire indigne d'un
honnete ho mrue,
&
il
n'auroit pas de goüt po ur la
vé–
rir1ble gloire
;í
car elle confiile beaucoup plus
a
faire re–
gner la paiY, l'abondance
&
les bonnes mreurs, qu'i
faire connoirre au public qu'on a l'adrelfe de réfrener le$
féduions, ou qu'á repoulfer
&
diffiper de puilf1t11e;
&
de
formidables ligues que l'on aur' fomenrées (o us main,
En un
mor ,
il fem ble que
(j
Dieu gn uvernoit le mnn–
de par un príncipe d'amour pour la créarure 4u'il a.fai–
te
a
Con image' il ne manqueroit point d't>CCJtions auffi
favorables que celles que
1
1
un
al legua,
pe
manife!ler fes
perfeélions inñ nies; víl que
13
fcience
&
ra puiflancc
n'ayant point de bornes , les moyens égalemcnr bons de
parvenir a fes
tins ne peuvent érre. limité<
a
un pctit
nombre . M ais il femble
a
d• certaínes gen , obf"n ·e
M.
Bay le , que le genre hurnaio innocenr n'e ur pa;
~ r é
olfez mal-aiíé
ii
co nduire, poer mérirer que D icu
,•cu
ml'l ilt .
La
!cene eür éré fi nnie,
(1
firnple,
fi
peu intri–
guée, q ue ce n'cílr pas éré la peine d'y faire intervenir
la providence . U o prinren¡s éfcrncl, une rerre fert:lc
fans culture, la paix
&
la concorde des anima·a
&
des
élémens,
&
rour le
refl~
de la defcriptiou
de
l'age d'or ,
n'éroienr pas des c)10fes ou l'atr div in pílr
trouver
Ull
alfe·¿ noble ex.rcice : ce n'efl que dans les
tempchcs
&
au mil ieu des écueils que paroit l'habi teré du pilote .
M.
Leibnitz e!l alié cherchcr le dénouernent de tnu–
tes
ces diffi cultés daos le fyili:me du munde le plu;
bcau, le pi u
ré~l é,
le meilleur en fin ,
&
le plus digne
de la g randeur
&
de
13
fa;~elfe
de
l'~tre
fuprérne. MaiS'
pour le bien comprendre, il faat obferver que
le rntil–
leur confi fle non dans la perfeélion d'une partí
e
dn tunt ,
mais daos le rneilleur tour
pri~
dans
Ca
généraliré . U
11
taoleau, par excmple, eil rnerveilleux pour le natnrc!
de<
carnarions : Ce mérire particuiier fair honneur
a
la mnin
donr il
fo rt; mais le rableau dans rour le
r~fle
n'a point
d''!rdonnance, point d'attitudes régulieres, point de feu,
potnt de dq uceur .
11
o'a ríen
de
vivanr ni de pa!f1o n–
n.c! ;
o n le voir fans émorion , fan> intérét ; J'()uvrage ne
Cera to ur
au
plus que médiocre. Un autre rableau a de
lég<res imperfeélions . On y voir dans le loinrain quel–
que perfo nnsge épifodique dont la main ne fe trouve pa
réguJieremenr pronoocée; mais le refle y efl ti ni ,
t<JOt
y
parle, tour
y
efl animé, tout y reípire, le delfcin y eQ
cor-