LIB
!'ame étoit néceiTairement entrainée' ee
r~roit
(ans dou–
te par cellcs .de fes
i~ées
obfcures .& confufes 9ui le fe–
roient le moms;
&
Je demanderots, pourquot le plus
de nétteté
&
de dillinél:ion daAs les penfées la détermi•
neroit nécelfairement pcndant que 1
1
on dorr,
&
non pas
pendant que l'on .ve!lle
¡
IX
je
fer~is r~':'enir
tous .les
yaifonnemens que J'at fans fur les dtfpoltuons maténel–
tes.
Reprenons maintenant l'objeél:ion par parties . J,'ac–
corde d'abord le> trois prindpes qlle pofe l'objeaion.
Cela pofé, vo¡ron< que! argument
~n
peut faire can–
tee
la
libcrll.
O u l'amt", nous dit-on,
le
peut abfolu–
ment déterminer daos l'éqnilibre des difpafitions du cer–
veau
a
choifir entre les penfées vertueufe¡¡
&
les penfées
vicieufes, ou elle ne peut abfolument fe déterminer daos
cct équilibre. Si elle peal fe déterminer; elle
a
en el–
le·méme le pouvoir de fe déterminer. Jufqu'ici
il
n'y a
point de ' difficulté; mais d'en conclure que le pouvoir
qu'a !'ame de fe do!terminer en indépendam des difpo–
ñtions du cer-vcau, c'ett ce qui n'etl pas exaél:ement
vrai. Si vous ne voulez. dire par-ti que ce qu'on en<
tend ordinairemcnt, (a,'oir que la
libcrtl
ne rélide pas
dans le aorps, thais fculemem qu¡: l'ame en ell le
tic·
gc, la [ourcc
&
l'origíne, je n'aurai fur cola
~ucun9
<tifpU!e avec vous ; mais fi vous voulez en inférer que
1
quellas que foient
les difpofitions matérielles du cer–
vcn , l'ame aura toujours le pouvoir de fe dé(erminor
:ta
cholx qui luÍ· piaira; c
1
en ae que je vous
nier~i.
!.,:¡
raifon en en' que l'.ime pour fe dérerminer libremenr
1
doit nécetTaircment exercer toutes fes fonél:ions, & que
pour les exercer, elle a befoin d'un corps
pr-~t
a
obéir
:i
tous f•s commandemens, de méme qu'un joueur de
luth
doit aToir un luth dom tomes les cardes
foien~
tend~es
& accordée< , pour joucr les ajrs aveq junerre
¡
or iJ peut fort bien fe faire que
les difpofirions maré–
rielles du. cerveau foient telles que l'ame ne puiífe cxcr•
cer-
toutes fer fonélions, ni par conféquent fa
libertéJ
cu la
libertl
confille dans le pouvoir qu'on a de ñxcr
fes idées, d'en rappeller d'autres pour les comparer
en–
femble, de diriger le mouvcmcnt de fes efprits, de les
:uréter dans 1'6tat oii ils doivent ctre pour empl!cher
qu'une id<!e ne s'échappe, de s'oppofer nu torrem des
autrcs cfprits qui viendroienr
a
la travcrfe imprimcr
tl.
!'ame malgré elle d'autres idées. Or le cerveau efl queJ.
quefois tell
cmcnr -difpofé, que ce pouvoír mañque abfo–
lumcnf
a
l
'a.me,comme
cela fo
voit
dan~
les enf:ms '
dans ccux
qui r~vent,
&c.
Pofons un vaifreau mol fa–
briqué, un gouvernail mal-fair, le pilote avec tour foo
art,
1\C
pourra poim le conduire
~omme
il fouhaite: de
m!me auffi un cor¡>s mal formé. un tempérament dé–
ptavé produira des aél:ions déréglées . L'efprit humain
nc pourra pas plus apporter de remede
a
ce dérég le·
mem pour-
le corriger , qu'un pilote au d6fordre du
mouvement de fon vaifreau .
Mais enñn, direz,vous, le pouvoir que !'ame
<1.
de
fe déterminer, c'ctt-il abfolumont dépendanr des dirpo–
fttions du cerveau, o u ne J'efi-il pas? Si vous dites quo
ce pouvo!r de )'ame en abfolument dépendant des di–
fpolitions du cerveau
1
vous dire1. allffi que l'ame ne fe
détermin~ra jam~is,
h
!'une des difpofitions dü cervcau
ne vient
a
l'emporter fur l'autre'
&
qu'elle fe détermi–
nera nécelfaircmenr pour celle qui l'emportera. Si au
contraire vous fuppofe7. que ce pon
voir
en indépendant
des difpofitiom du cervean, voug dovcz. reconno!rrc pour
libres
l~s
penfées des enfans, de ceux qui
r~vent,
&c.
Je
réponds que le pouvoir que J'ame a de fe déter:ni–
ner e!l quelquéfois dépendant des dif¡>Dfitions du cer–
VQU,
&
d'autres fois indépendant.
11
en dépendanr tou–
te~
les fois que le ccrvcau qui fert
~
J'ame d'organe &
d:mnrument pour exercer fes fonél:ions, n'ett pas bien
dtfpofé; alors les reflorrs. de la machine étant détra–
qués , l:ame en entra?née fans pouvoir exercer fa
líber–
ti.
Jl1ats
)~
pouvoir de fe déterminer en indépondant
des d.tfpolltlons rnatérielles du cerveau, lorfque ces di–
fpo_fittom (out modérées' que le cervean en plein d'c–
fpnts,
&
que les ne•fs font tendus. La
liberté
Cera d'au–
tant plus parfaite que !'organe du ccrveau fera
mieu~
con!litué, & que fes dlfpolitions feront plus modért!es .
Je ne faurois vous marquer quelles font les bornes au–
de.ladefquelles s'évanouit la
libere!.
Tout ce que je
fats,c'elt que le pouvolr de fe détcrminer (era abfo–
lumef!t indépendam des difpolitions du cerveau, routcs
les fots que le cerveau Cera plein d'efprits
que
fes
tibres Ceront fermes, qu'ellcs feront tendnes '
&
que les
rellorts. de la machine ne feront point
démo~tés,
ni par
les acctdeas, ni par
les maladics. Le principe , dices–
vous, n'en pas uniforme dans l'ame.
IJ
ett bien plus
conforme
a
la PbiloCopnie do fuppofor l'ame ou toujours
T ome IX,
LIB
377
libre
<!>U
toujour~
.cíelave. Et moi , ie dis que
l'~xpé
riencc e(l la reulc vraie Phyuque . Or que
DOUS
dit-clle
cette expérience?
EliJO
rtons dir qne aous fommes quel–
quefois emportés
m•l~ré
nou-s; d'Gu je conclus, done
nous fommes quelqucfois
ml~rrcs
de nous; la maladie
prouve la
Canté,~
la
lihertl
e(l
la Canté de l'arne.
Voyez:.
dans le ckuxieme difcours fur la
lihertl
ce raifonnement
paré & embelli par
M .
de Voltairc de toute¡¡ les grac<u
~e
la ?oélie.
La
Hberté
1
dis·tu, t''4} t¡uelr.ucfois ravi< :
Diu1
t~
la
á~voit-il
immuab e, infinie,
·-1
Eg4/c en tottt état, en tout temJ, en tout liert
?
Tes de{liws fowt d'rm bomme,
&
tes
'DotttK
font d 'tm
Di•u.
QMoi!
daJIJ
cet
Dclan,
cet a
t,me r¡ui nttgc
Dirar
L'immcn./it.t! doit
étrc
rA.onpartag~ .
N
un, tot<t
~¡¡
fui6/e en tui,
chawgcawt,
&
limitl;
r.
forcs' ton e.fprit '
t.eimnnóres'
ta luaut/ .
La nature, en tortt f
ons,
~
d.u horneJ prefcrite.s ;
Et
le
put<voi~
humain feroit fcul fAns limites?
Mais, dis,-.moi: tfttand ton efi!ttr forml de f1af1ions
Se re_nd, malgrl
Jrei-méme,
a
leurs
impreffionJ,
12_u'il, fent dam fes comhats
fa
liberté
11ainc'f',
fi'tt
J'
IJ'l.IQÍ.I áD11C
~n
tOÍ
t
puift¡Ut
/JI
r
4/
pcrtfrte
•
Unt1 filvr6 hrA14nte atta'{uanj tes re/Torts
•
l''ient
a
p41
inlgaux miner ton faihfí. corps.
Mais
t¡uoi! par
<e
danfer rlpandu [ur ta
1JÚ,
f:(l'
fantl
pour jamair
n
efl point anéantíc,
On te voit revenir des portes Je la mort,
Pl11s ftrme, plus content, plus t•mplrant , plus f•rt.
Con11J)ÍJ mieux
l'hesreMK
áon,
t¡tlt! to11
chagrín re•
elanu,
/.,a
liberté,
áa,s l'ho>nnu,
efl
la faJtté áe /'ame .
On
la pcrá '{llclr¡uefois. La foif áe la granáeur
•
La col6rt!, l'orgrtcil, un amor1.r fuborneur,
D'un áefir eurimx les trompeuf"' faillies;
Hll4s
.'
eombien le <<Mur 4•t-il de malaáio!
Si un polds de
cin~
livres, dites·vous, pouvoir n'étre
1
pas emporté par un poids de lix, il ne le feroit pas non
. plus par un poids de mille. A infi, fi )'ame réfine :\ une
ll
difpofition . marérielle du cerveau qui la porte
a
un choix
vicieux ' .
&
qui. quoique pourtant n'lodéré<:. en plus
forre que • la difpolition matérielle
a '"'
vertn; iJ
faut
que J'ame réfine
a
cette
m~me
difpolition matériellc du
vice, quand elle (era infiniment au-delfus de l'autrc. J c
réponds qu'il ne s'cnfnit nnllement que l'ame puifre té–
filler
il
une difpofition matérielle du vice, quand elle
(era inñniment au -de!fus de la difpofition mlltérielle
i
la vertu. préciíéiñent paree qu'clle aura rélillé
a
cette
mt!me difpofirion matérielle du vice, quand elle étoit
un peu plus forre q·ae J'autre. Quand de deux difpofi–
tions contraires. qui font dans le cervean' )'une en in–
linim~nt
plus forre que J'autre, il peut fe faire que dan¡
cet état, le mouvement narureJ·des efprits foil trop vio–
lent,
&
que par conféquent la force de l'ame n'ait nulle
prooorrion avec celle de ces efprits qui l'emportcnt né –
cell'airement. Quolque le príncipe par lequel JC me dé–
termine foit indépendant des difpo!itions du cerveau,
puifqu'il réfide daos mo11 ame, on pcut dire néanmoins
qu'il les fuppofe comme une condition, fans laquelle
il
deviendroir inutile. Le pouvoir de fe déterminer n'elt
pas plus dépendant des difpofirions du cervean, que le
pouvoir do pcindre, de
gr~ver
& d'écrire; l'art dn pin–
ceau, du burin & de
la
plumo;
&
de mt!me qu'on no
peut bien éorire, bien graver
&
bien peindre,
fi
l'on n'a
une boone plume, un bon burin
&
un pinceau ; ainti,
l'on ne pcut agir avec
lib"tl,
a
moins que le cerveau
ne foit bien conttirué. Mais auffi de meme que le pou–
voir d'écrire' de graver.& de peindre en abfolument in–
dépendant de la plume, du burin
&
du pmceau; le pou–
voir de fe détermincr
r¡e
!'en pas moins des difpofitions
du cervcau .
On convient , dira·t-on , que l'ame dépend abfolu–
ment des difpofitions du cerveau fur ce qui regardc le
plus oa
le
moins d'efprit : cependant,
li
fur
la
vertu
&
fur le vice , les difpofitions du ccrveall ne déterminent
J'ame, que Jorfqu'elles font extremes ,
&
qu'clle•
lui
Jaifrem la liúerJ/Iorfqu'elles fonr modérées: enforre qu'
on peut avoir beaucoup de vertu, malgré une difpofi·
tion médiocre au vice, il devroit t!tre auffi qu'on peut
•1Voir beancoup· d'crprlt malgré une difpofirion médiocre
a
la nupidité. J'avoue queje ne fcns pas arrez le nn de
ce raironneJnent. je ne faurois concevoir , pourquoi,
pouvant avoir bcaucoup de verru malgré une difpofition
mediocre au vice,je pourrois auffi avoir bcaucoup d'efp rit
malgr6 une difpolition m6diocre
a
la
llupidité . Le plur.
Bbb
oo