/
LIB
Le
fneum
des Turc.s
:vient de l'opinion cii ils font
que tout ell abreuvé
d~
intluences célefies,
&
qu'elles
~eglerit
la difpo!itiun fu.ture des événemens.
Les Elféniens a:voient une idée fi haute
&
Ct
déc!6ve
de la
providence, gu'ils croyoienJ: _qúe tout arriv;e ,11ar
~ñe
'fatalité iné:vitable,
& ·
suivant l'ordrc que cette pro–
v·idence a établi,
&
qui ne change jamais . Point de
e~oir
daos lcur fylleme, point de
/ibertl.
To,os 1es évé–
nemens 'forment une ehalne étroire
&
iQaltérable: 6tcn
un
feul de ces événen)ens' la c:ha1ue efi rompue,
.&
tome
l'éco~omie
de l'!mivers cfJ troublée . Une chGfe
qo-'·il
f.~ut
ici remorquer, c'efi que la doarine qui détrutt
-)a
/ibertl,
port~
oatureHemem ·
a
lll vohtpté;
&
qui ne
eoofttl,te que Can goOt, fon atnoQr-propre
&
fes _peiJ–
,ch;ms, trouve aífn. de raifons peur la Cuivre
&
potlr
i·'approuver: cependant les mceurs des Eíféniens
&
d~s
5toYciens !)e fe relfentoie"' point
dt1
d<!fordre de leQr
.erprit ,
. Spinofa, Hol;lbes
~
plur:ieu.rs,autres oat admis de nos
¡ours ane Ceml;>lal;lle fatalité.
~pinofa
a r-tpandu cette erreur dans plulieurs endroits
de
fes ouvrages; l'exemple qu'il
al1e.~ue
pour
tclaircir
la matiere de la
libertt!,
fuffira p(;mr oous en convaincre.,
,
~onceve7:, ~it·H,.
qu'une pierre
l.
pendant qu'elle
c~n"
ttnue
il
fe mou:vo1r, penfe
&
rache qu'elle s'efforce
,
~e
c,bntinuer amant qu'elle
p~tu
fon mo.uvemem; cet–
~.
te pierre par cela mémc qu'elle a le fentiment de !'ef–
" for't qu·'elle fait pour re mouvoir,
&
qu'elte n'elt nul–
',
lement i11différet\te entre J.e mollvément
&
le repos,
croira
qu-'~lle
ell tres-libre'
&
qulelle perfévere
a
fe
,
lljlOUvoir úniquement paree
qu~'elle
le veur. Er voila
•• quelle efi cette
libertl
tant vanté
e,
&
qui eon/Hle
Ceulem•m dahs 'le fentiment que les homme• ont de
"
leurs appétits,
&
dans
l'i~nor:tnce
des caures de leurs
, dé'terminatint}s , .
Spinoí.~
ne dépe>uille pas feulement
les créatures de la
libertl,
il aífujettít encore fon Dieu
a
utie bnue
&
fatale néceffité:
e
ell le grand fondement
de fo11 fyfleme. De ce prlnclpe
il
s'cnfuit qtt'il en lmi
poffible qu'aueune chofe qui n'eJtille pas
aél:uellement,
air pO cxifier,
&
que rout ce qul exille,
c~ifle
li nécef–
fairement qu'il ne fauroít
n'~tre
pas;
&
enfin qu'il n'y
a
pas jufqu'au¡¡ manieres
d'~rre,
&
mtx
drconllances de
1'exillence des 'Chofes, qui n'ayem díi Etrc
a
tous égards
précifément ce qu'clles font aujourd'hui. Spi11ofa admet
en terme< expres ces eonféquen<Zes,
&
il ne fuir pas dif–
ficulré d'avouer qu'elles font des fu{tes naturelles <le Ces
principes.
On peur rédnire tous les argumens dont Spinofa
&
fes feél:ateurs fe· Cont Cervis pour foutenir cette abfurde
hypothéfe,
a
ces deux. lls dífent
t
0 ••
que puifque tout
effet préfuppofe une
c~ure,
&
qoe, de la mt'!me manie–
~c
qne tout mouvemem qui arrh·e dans un corps tui e!l
caufé par l'impullion d'un autre corps,
&
le mouvemeot
oc
ce fecond par J'impulfion d'une troilieme;
&
ainfi ch:t·
que volirion,
&
chaque ilétermination
de
la volonté de
i'homme, d" it
nécel[~irement
l!tre produite par quelque
,c:aufe ext6rieure,
&
ccllc·ci par une troilieme; d'ou ils
I=Oncluent que la
libertl
de la volonté n'e!l qu'unc chi–
inere.
11~
difem en (econd lieu .que la penl'ée avcc
ron~
!<:s
modes, ne font que des qual11és de la mat!ere;
&
par
e onféquent qu'il n'y a point do
libertt!
de volomé pnil:.
qo'il
cft
évident que la matiere n'a pas en
elle-•;,~me
Je
pnuvoir de commencer le mouvemcnr, ou de fe doll–
.JlCr
a
elle-mc!tnc la tnOÍildre détertnination.
· En tróilieme lieu, ils ajoíitent que <!c que nous fom–
mes dan< !'infiam qui va !'uivre, do!p nd li néceífa1re–
ment de ce 'que nous
Comm~s
dans 1' lnUam prét'ent ,
qu'll efi
métaphy~queme_r¡t
impoffible que nous Coyons
autres. Car, conunuent-Jis, fuppofons une fe
m
me qui
ÍOI[ entraínée par fa paffion
~
fe JCtler tOUt-i\-l'henre en–
t re les br3s de fo1i amanc;
Ci
noos ima<*inons cent
1nille
fem'lles enticremer¡t femó)ables
a
la pr.;'lt)iere, d'!ge, de
tcm~éram¿nt,
cj'éducarion,
dlorg~nifation,
d!ldées, tel–
ks
el!
un mor, qu'il q!y · a;r
attc~ne
'<lifférence :tffigna'–
ble Cf!tr'elles
&
la premlere; on les ·yolt roures
é~:ilemem
foumtfi:s
:l
la paffi o n dominante,
&
précipirées entre
l~s
bras de leurs amans, fans qu'on •puiífe concevqir aucu–
ne ratfon pqur laqqelle J'une 'le feroit pas ce que ton–
tes les
:¡ut~es
feront . Nous ne
f.~ifom
rion qu'ón puilfc
appc:ller .b•en ou mal, fans moríf. Or il n'y a auclin
m ottf qut. dépcnde de nous, foit eu égard
a
(a prodo–
'ébon, fmt eu égard
a
Con
énergie. ' Prc!tendre qu'il y a
dans
l'_at:n~
U?C:
a4 ivité qui lui ell 'prcipFe; c'ell dire une
chofe tmntelltgJble,
&
qui ne rC::Cout rien. Car
il
faudra
~oojours uti~
cauCe indépendame de l'ame qui détermine
é:ette aétivitc!
:1
UJ1e chofe plutÓt qu'a une autre;
&
pour
reprcndre
la premiere partie du raifonnement, ce que
pou~
fqmmes dans
l~i'!llaot
qui va ruine, dépcnd done
LIB
abfolument de ce que oous foq¡mcs dans t'inflanr prc!–
fent;
ce
que nous Commes dans l'inllant préfcnt, d.c!'pe11-J
done de ce que )lOUS éticos d:tos 1'in!hnt précédent;
c5t
ainli dé fui te, en rem9ntam julqu'au ptemier in•lam
de
notre exi!lence, s'il y en a un.
No~re
vic n'cfi dol)e
qu•u'n enchainement d'intlans
d'exil~enees
&
d'aétions
néce!faires; 1\0tre volomt,
Ull
l!Cqoiefcement
a
~tre
ce
que nous Commes néceífairement dans clueun de ce,
ioilans,
&
norre
_libertl
une chimere; o u il n'y a rien
de démomré
cm
aucun
~enre
ou cela l'ell. Mats _ce qui
confirme Cur-rout ce fyllcme, c'(;fl le morr¡ent de la dt–
libération
1
le cas de l'irréfolutlon. Qu'ell-cc que nous
faifons daos l'irr.t!folutíon? nous ofcillons entte deux ou
plulieurs morifs. qui nous tirent alternativen:)ent en fens
contrair.c. Notre cntendement ell aiors comme erútellr
&
fpeél:areur de la néceffitt de 1\0S balancemens. Sup–
primez rous le& motifs qui nous agit¡!nt, alor; incrtie
&
repos nécdfaires. Suppofez un Ceul
&
unique moti.f; alon
une aétion nécelf•ire. Suppofez deux G\1 plulieurs
motif~
C<>nfpirans ,
me!
me néceffité,
&
plus de v?te!ft dans l'a–
étion. Suppofez deux ou plulieurs motifs oppofés
&
a–
pcu-prh de forces égales, alors ofci!lations, ofciUation¡
Cemblables
~
celles des bras d'une balance
mlle
en mou–
vemenl,
&
dnrables jufqu'il ce que le motit' le plus puif–
fant
tixe
la fituation de la balance
&
de l'ame. Et com–
ment re pourroit-il faíre que le ¡notif le plus foil>le
ftl't
·te motif détermlnam
~
Ce Ceroit d!re qu'il cfl en m.l:in¡:
tems le plus foible
&
le plus fort.
JI
n'y a de ditféren–
ce entre t•homme amo¡nate qúi :¡git dans le Comme11,
&
l'homme intelligent qui agit
&
qui veilla, finon qae
l'entendement efi plus préfenr
a
la <!hoCe; qol}nt
:i
la né–
ceffitc!, elle efi la
m~
me. Mais, leur dit-Gn, qu'cll-10e
que ce Centimem intérieur de norre
libertl?
l''tiufion
d'un enfant qui ne réñéchít fur den. L'homr e u'ett
done pas différenr d'un automate? Nullcmem ditfércnt
d'un automate qui fent; c'efi une
m
achine plus cmnpo·
(ée?
11
n'y a done plus de vicieux
&
de vcrtueux? non,
ti
vous le voule-z. ; mais
il
y a des C'!tres heureux ou mal,
heureux, bienfaifans
&
malfaifans . Er les recompen(es
&
les chil.timens?
11
faut bannir
d!$
mors de la Moral e¡
en ne récompenfe poínt, mais on enconrage
a
bien fai–
.oe; on ne ch1tie point, mais on étGuffe, on elfraye?
E
les
lois,
&
les bons exemples'
&
les exhortations'
a
quoi Cervent-elles? Elles font d'autant p1us utiles, qu'el–
les ont nécelfairernent leurs effcts. Mais, pourquoi di–
il
iuguez-vous par votr> indigna¡lon
&
par votrc: colere,
l'homme qui vous offenfe, de la tuile qui
vous·
blelfe?
c'ell que Je l'uis
d~raifoonable,-
&
qu'alors jc rc{fcmbie
au chien qui mord
la
pierre qui l'a fraJ>pé. Mais cene
idée de
libcrtt!
que nous avons, d'od vient·dle? De la
mcme fource qu'une inlinité q':íutre> idées fauífcs que
nous avons? En un mot, concluent-ils, ne vous effa–
rouche7. pas
a
contre-rems. Ce Cyfieme qui VOltS paroh
fi
dangereu~,
ne 'l'ell point; il ne change ríen
au
l)on
ordre de
la
Cociété. Les d¡o[es qul corrompent les hom·
mes feront toujours
A
Cupprimer; les chafes qui les amé–
liorent, feront toujours
ii
muldpliar
&
ií
fortiñer. C'e!t
une dií)>ure de gens oilifs , qui ne médte point la moin•
dre animadvedion de la part du législateur. Seulement
notre !)>fleme de la néceffité allure
á
toute caufi: bonne,
o u conforme
a
l'ordre établi, fon bon effet;
~
tol\le
canfc mauvaife ou conrraire
a
)'ordre établi. ron mau–
vais effet;
&
en nous pr<!chant l'indulgcnce
&
la cqm–
mJfération pour ceux qui
font malhcurcufemcnt nés,
nous empeche d'¡;cre li vains de
lle
pas
lcttr reífem–
bler; c'clt un booheur qui n'a dépendu de
¡lQUS
en
au–
cune fat;on.
En quatrleme lieu, lis demsndent
lf
l'homme e!l un
étre limpie tout fpirituel, ou tour cotporel, 011 un c'!tre
compofé. Dans les deux premiers ca•, lis n'ont
pas
de
peine
a
prouver la néceffité de Ces aél:lons;
&
1i
ou.leor
répond que c'eft un l!tre compof6 de deux príncipes,
l'un tn3tériel
&
l'autre immatédel, voici comment ils
raifonnent. O u le príncipe fpirituel elt toujoors dépen–
dant du príncipe maréricl, ou toujours
indépcndant.
S'il en "elt tOUJours dépendant, néceffité auffi ablUJue
qu!!
li
l'~tre
étoit nn, limpie
&
tout matériel, ce qul
erl vraL 1\.his fi on leur fomient qu'il en efi quclguc–
fois
d~pendam,
&
quelquefois lndépcndant; ·¡¡ on leur
dit que los penfées de; ,ceux q!Ji ont la lievre chaudc
&
des fous ne íonr pas libres, au lieu qu'elles le
Com
dans
ceux qui
Cont
fains! ils répondent qu'il n'y a l)i UIJifOr–
mité ni Haifon dans notre fy!leme,
&
que nous
re~duns
les dem: prmcipes in<lépend:ms; Celan le befoin que nous
avons de certe fuppolition pour nous défendre, & nnn
fclon la Vérité de la chofe.
$}
110
fou n
1
ell p3S
l<brc ,
un fage
ne
l'efi pas davamage;
&
foutenir le
contr~tre,
c'ell
pr~tendre
qu'un poids
de
cinq livccs peur
nl~tre
paa
cmpor-