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GRA
!!los befoio
d'~tre
encouragés que d' erre humiliés;
ils
font a!Ju¡enis fooverainemcnt
a
la pui!Jance royale
&
aux lois; s'ils ont quelque bien, ils n'en fonr que plus
dépendans, que plus fu fcepribles de crainre
&
de puo i·
tion . L'arrogance rollique qu'on leor reproche ell une
forme de leur érat, qui ell fort indifférente au gouver–
nemeot; elle fe borne
a
réliller
a
ceux qui font a· peu–
pri:s de leur efpece, qui foot encare plos arrogans ,
&
qui veuleot dominer. Cette perite
imperfe8ion ne dé–
range point l'ordre ; au cootraire elle repouffo le m é–
pris que le petit bourgeois affe8e pqur l'état le plus
recommandab le
&
le plus effenriel . Que! avantage done
prétondroit· on retirer de l'impotition arbitraire de la taii–
Je, pour réprimer des hommes que le m inillcre a inté·
rét de protéger? feroit-ce pour les expofer
a
l'in¡ulli–
ce de quelques particuliers qui ne pourroient que leur
nuire au préjudice du bien de l'état?
Obfervations fur /'exportatio11
des
grains
.
L'expor–
tation des
grains,
qui ell une autre conditioo elfentiel–
Je au rétablilfement de l'agriculture, oe contribueroit pas
a
augmentcr le prix des
grains.
On peut en juger par
le prix modique qu'en retirent nos voitins qui en ven·
dent aux étrangers; mais elle cmpc!cheroit les noo-u–
leurs du blé . Ce feul effet, comme nous
1'
avons re–
marqué
p.
713.
éviteroit
a
l'agriculture plus de
l j"O
m illions de perte . Ce n'ell pas l'objer de la vente en
lui-mcme qui nous enrichiroit; car il feroit fort borné ,
faute d'acheteurs.
Voyez
FE
R M 1 E R ,
p.
44f·
Vi. vol.
En effet, norre ex portation pourroit
a
peine s' étendre
i
deur millioos de feptiers .
Je ne répondrai pas
a
ceux qui craigoenr que l'ex–
portation n'occaíionne des difettes
(a);
puifque fon effet
ell an conrraire d'afsOrer
1'
abandance ,
&
que l'on a
démontr~
que les moilfons des mauvaifes années
fur·
patreroient celles que nous recueillons aauellement dans
les années ord inaires: aioíi Je nc parlerai pas non plus
des projets chimériques de ceux qui propofenr des é–
rabli lJemens de grcniers publics pour préveoir les fa–
m ines, ni des inconvéoiens, ni des abus inféparables de
pareilles précautions. Qu' oo réfléchiffe feulement un
peu fur ce que dit
a
cet égard un auteur anglois
(b).
, Laiffons au>< autres nations l'inquiérudc fur les mo-
" ycns d'éviter la fa mine; voyons-les éprouver la faim
au m ilieu des pro¡ets qu'el les formenr pour s'eo ga·
rantir: nous avons trou•é par un moyen bien lim–
pie, le fecret de joü tr tranquillement
&
avec aban–
dance du premier bien oécelfaire
a
la vie ; plus hou–
reux que oos peres, ooos n' éprouvons point ces ei-
" ceffives
&
fubites
diff~rences
daos le pr!x des blés,
,
roO¡ours caufées plilt6 1 par craiote que par la réaliré
,
de la difeue . . . . En place de valles
&
nom breux
greniers de relfource
&
de prévoyance, oous avons
,
de valles plaines enfemencées .
, T ant que
1'
Angleterre o' a foogé
a
cultiver que
pour fa propre fu bíi llance , elle s'ell lrouvée fouv enr
,
au-delfous de fes befoins , obligée d'acheter des blés
., étrangers : mais depuis qo'elle s' en ell fair un objet
~
a)
Voyex. le traitl de la poliu des graint, par M.
Herbert.
b)
.Á
'Vant.
(7
tkfa'Vant. de la Grande-Breragne.
e)
Si , malgré des raifons fi décifi,•es , on avoit encare de
l'inquiéntde fur les difettes dans le cas d'exportation ,
il
eft facile de fe raffúrer; Clr on peut. en pennettant r cx-
portation, permettre auffi l"imponation des blés érrangers
fans exiger de droits: par-la le prix du blé ne pourra
pas etre plus haut cbc7. nous que cbez les autres nations
qui en exportent. Or on fait par une longuc expérien–
ce qu'elles font dans l'abondance,
&
qu"elles éprouvent
rarement de cbené; amli la concurrence de leurs blés
dans notre p.tys , cmpecheroit nos marchands de fenner
leurs greniers dans l'efpérance d'une cherté,
&
l'inquié–
tude du p_euple ne
f~roi_r
pomt aug
menter" le prix du blé
par la cramre de la t:untne; ce qm e.ft prefque roújours
l'unique caufe des chertés exccílives. Mais quand on le
''oudra, de teUes ccufes dJfparottront
a
la vúe des bareaux
de blés étrangers qui arriveroient
a
PJris. Les cherrés n'ar–
rivent toujours que par le défaut de liberte dans le com–
mercc du blé. Les grandes difettes rcelles font rres-rares
en France,
&
elles le font encare plus dans les pays ou
la liberté du commerce du blé fotltient I'Agricuhure. En
1709 ,
la
gelee fit par-tout manquer la récolre;
le
feptier
de blé valoit en France roo ltvres de narre monn01c a–
élueUe,
&
on ne le vendoit en Angleterre que 43 liv.
ou enviran le double du prix ordinairc dans ces tems-h;
amfi ce n:étoit pas pour la n>Uon une grande chené.
Da1_1s la d1fme de 1693
&
t69+. le blé couroit moitié
mom.s e!' A_ngleterre qu'en France, quoique l"exporration
ne
f11t
erabli~
en Angleterre que depuis trois ou qua-
GRA
, de commerce, fa cu Iráre a tellement augmeoté, qo'
, une bonne récolte peut
1~
nourrir cinq an5;
&
elle
, ell en état maintenant de poner les blés au s na·
,
tion~
qoi en rnanquent .
, Si l'on parcourr quelques-ones des pro vinces de la
, Fraoce, on trouve que non-feulcmen t pluheurs de fes
,
terres rellent en fricho, qui pourroient produire des
,
blés ou nourrir de; belliaux, mai> que les terres cul–
"
tivées ne reu dent pa
á
bcaUCt>Up prCS
a
proportion
, de Icor bontc! ; paree que le labvureur manque de m o–
" yen pour les m eure en valeur .
, Ce n'ell pas fans uno Joie {oníible que j'ai remar–
qué dans
le gouvernemenr de France un vice done
,
les con(équencos font
(i
éteodues,
&
¡'en ai félicité ma
patrie; mais je n'ai pO m'empecher de fentir en
m~me
,
tems ca mbien form idable feroit devenue cetre poif–
" Canee ,
li
elle
et11
protiré des avantages que fes pof–
"
feffi ons
&
fe> hommes loi olfroient ,
.
O fu
a
ji
bo·
na norint!
(e )
JI
n'y a done que les nations ou la culture ell bar•
née
a
leur propre lubtillance, qui doivent redouter les
fam ines .
11
femble ao comraire que daos le cas d'un
commerce libre des
grains,
oo pourroir craindre un
effet
tour oppofé . L' abondance des produ8ions q ue
procureroit en France l'agriculture portée
a
un haut de–
gré, nc pourroit-elle pas les
faire romber en non-\'3·
leur? On peut s' épargner ceue
inquiétude; la poíition
de ce royaume, fes ports, fes riv ieres qui le traverfenr
de roores parrs, réun ilfent rous les avaotages pour le
commerce; rout favorife
le
tranfport
&
le débil de
fes denrées . Les Cocees de l'agrrcolrure y rétabliroicnc
la popu latioo
&
l'aifance;
la
~onfommarion
de
toote
efpece de produétions premieres ou fabriqoées, qui aug–
menteroit avec le nombre de fes habirans, oe laifferoir
que le petit fuperflu qu'oo pourroit vendre
a
l'étranger.
Il ell vrai qu'on poorroit redouter la ferrilité des colo–
nies de
1'
Amérique
&
1'
accroiiTemenr de
1'
agriculture
dans ce nouveau monde, mais la qualité des
graim
en
F rance ell íi fupérieure
a
celle des
grains
qui naiffent
dans ces pays-13,
&
meme daos les autres, que no_us
ne devons pas craindre
1'
égalité de concurrence ; tls
donnent moins de farine,
&
elle ell moios boone; cel –
le des colooies qui pa!Je les m ers, fe déprave facile–
mem,
&
ne peot fe conferver que fort peo de tems;
celle qu'on exporte de Fraoce efl préférée , paree qu'
elle ell plus profirable, qu'elle fait de meilleur pain,
&
'qu'on peur
la garder long-rems. Ainíi nos blés
&
nos
farines feront IOOjOUrS m ieux vendos
a
1'
érranger. Mais
une aurre raifon qui doir tranquillifer, c'ell que l'ag ri–
cul ture oe peur pas augmenrer dans
les colonies, fans
q ue
la population
&
la confommation des
grai>n
n'y
aug rnonre
a
proportion; ainú
leor
fuperBu n'
y
aog·
m enlera pas en raifon de l'accroilfemenr de
1'
agricul–
ture .
Le défaut de débir
&
la non-•aleur de nos denré"es
qui ruinetH nos provioces, ne font que
1'
effet de
la
m ifere du peuple
&
des empechemens qu'oo oppofe au
com-
rre ans: avant cene exportation, les Anglois effuyoient
foU\•ent de grandes cbenés , dont nous profitioos par
13
liberté du commerce de nos
graim
fous les regnes d'Hen–
ri
VI. de Louis XIII.
&
dans les premiers rems du rc–
gne de Louis XIV. L 'abondance
&
le bon prix entrete–
noient les richeffes de la
nari~>n :
ccr le prix commun du
blé en France étoit fouvent 1.5 liv.
&
plus de notre mon–
noie, ce qui formoit annuellement une ricbeffe d•ns le
royaume de plas de trois milliarts , qui réduits
á
la
monnoie de ces tems-lü, étoient enviran
1100
mJJlions
~
Cette richeffe ell diminuéc aujourd"hui de cinq lixie–
mes . L' exporration ne doit pas cependant etre ilhmt–
tée; il faut qu' elle foit comme en Anglererre , mterdt–
te, lorfque le blé pa!le un prix marqué par
la
lot. L'An–
gleterre vient d ' elluyer une cherté, paree que le mar–
chand eft conrre,•enu 3 cene regle par des abus
&
des
monopoles que le gouvemement a tolérés,
&
qui ont
toújours de foneftes effets dans un éttt qui a recour; l
des reffources
fL
od culo>; ainti la nation a éprou'
é
une
chené dont rexporration m€me l'avoit préfervée depuJS
plus de fotxante ans. En France, les famines font fré–
quenres , paree que l'exporranon du blé y éroit fouvcnt
défcndue;
&
que l'abondance eft autant defavanrngeufe
aux fermiers, que les. dJfenes fonr funelles aux peuples .
Le prétexte de remedter aux fammes dans un royaume ,
en
intercept:mt le commercc des
grailu
entre les provin–
ces, donne encare lieu a _des abus qui augmenrent la mi–
fere, qui dérruifent
1'
Agnculture ,
&
qw anéannlfent les
revenus du royaume.