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SS

2

GEO

l'efprit

glom¡triqru,

c'efl-a·dire 1' efprit de méthode

&

de ¡uildfc . Car l'efprit

glomtere

n'ef! proprrmenr que

J'clprit

giom!tri'l'",

applíqué a la frule Géométrie,

&

il e!l bien difficile quaod on fait fairc ufage de cet e–

fprit daos les mntieres gtom¿triques , qu' on n< puiíT'e

de méme le tourner nvec un fucci:s égal vers d'aurres

ob¡m.

11

efl vrai que l'efprit géometrique pour f< d¿"–

velopper avec toure fa force

&

fon

aétivit~,

demande

quelqu'exercice;

&

c'efl pour cela qu'un homme

con~

cemré dans l'érude de

la

Géométrie , paro¡trn n' a1•oir

que l'elprit

giom<tr<'

paree qu'il n'aura pas appliqu¿ a

d'autres matieres le talent que la narure lui a donné de

raifonner ¡une. De plus li

les

Giom<trct

fe

trompent

lorlqu'ils appliquent leur logique a d'aurres fciences que

la

Géomérrie, leur erreur efl pl(\rót daos les príncipes

qu'ils adoptem, que daos les conféquences qu'ils en ri–

rent . Cette erreur daos les principes peut venir ou de

ce que le

g_lomrtre

n' a pas

les connoiiTances prélimi–

naires fuffilantes pour le conduire aux principes vérita–

bles , ou de ce que les príncipes de

In fcience dont il

traite ne forteot poinr de la fphere des probabilités.

A–

Jors il peor arriver qu'un efprit accotnumé nux démon–

llrations rigoureufes ' n' ait pas

a

un degré fuffifant

le

taét néccflaire pour dillinguer ce qui cfl plus probable

d'avec

ce

qui

l'ef! moins. Cependant ¡'ole penfer en–

core qu'un

glom<tre

exercé a l'évidence mathématique'

dininguera plus aifémcnt daos les autres fciences ce qui

en vraiment évidcot d'avcc cequi n'en que vraiffemblable

&

con;eétur

.

&

que de plus ce meme

¡¡fo>n<tr<

avec

quelque exer ce

&

quelque habimde , dillinguera auffi

plus aifément ce qui en plus probable d' avec ce qui

l'ell moins; car la Géomérrie a auffi

fon calcul des

probabilités.

A

l'occaflon de ce calcul , je erais devoir faire one

réflexion qui contredira un peu l'opinion commune fu r

l'efprit du jcu. On imagine pour l'ordinaire qu'un

gr!o–

mttr<,

un favant exercé aux calculs, doit avoir l'eljnir

du

J<U

dans un degré fupérieur; il me femble que ces

deux cfprirs font

fort diflerens,

fl méme ils ne font

pas conrraires . L'efprit

glom<trt

efl fans doute un e–

fprit de calcul

&

de combinaifon , mais de combioai–

fon fcrupuleufe

&

lente , qui examine !'une apre1 l'ou–

tre routes les parties de l'ob¡ct,

&

qui les compare luc–

cdli

,~ement

entr'elles , prenant

garde de

n, en omeure

aucune,

&

de les rappruchcr par tnures leurs faces; en

un mm ne faifant a-la·fois qu'un pas'

&

ayant foin de

le bien a!\Orer avant que de palfer au fuivant. L'elj>rit

du ¡eu

e!l

un efprit de combinaifon rapide, qui embraf–

fe d'un coup-d'ceil

&

comme d'une maniere vague- un

graod nombre de cas, dont qutlques · uns peuvcnt lui

échapper, paree qu'il en moios aíT'ujetti

a

des regles,

qu'il n·en une efpece d'inflinét perfeétioooé par

l'habi–

tude . D'ailleurs le

giometre

peut fe donner toot le tems

néceíT'aire pour réfoudre fes problemes; il fa ir un effort,

fe repofe,

&

repart de la avec de nouvelles forces.

Le ;oüeur efl obligé de réfoudre fes probli:mes fur le

champ ,

&

de faire daos un tems donné

&

tr~s-

court

tout l'ufage poffible de fon efprit .

11

n' efl done pas

furprenant qu'un grand

gfometr<

foit un ¡oüeur tri:s–

médiocre;

&

rien n'en en eft<t plus commnn.

La Géométrie a parmi nous des cenfeurs de tous les

genres.

11

en efl qui luí conreflent ¡ufqu'a fon utilité ;

nous les renvoyons

3

In

prlf,tc<

fi

connue de l'hilloire

de l'académie des

S

ciences,

o

u

les marhémariques foot

fuffi lamment vengées de ce reproche . Mais indépen–

dammem des ufages phyliques

&

palpahles de la Géo–

métrie, nous envifagerons ici fes

avanrages fous une

autre face ,

a

laquelle on n'a peut-étre pas

fait encare

aflez d'attention: c·en l'uriliré donr ceue érude peut erre

pour préparer comme infenfiblemenr les voies

a

l'efprit

philofophique,

&

poor difpofer toute une nation

a

re-

(1)

Je n'approuve pas les abm auxqueb

petu

étre fujet

le tribunal de

hl. Sainte l.nqui6tioo, comrne le font

:~uffi

les autrc! chofes plus fain–

tes de la

l~cligion

Chrétienne . Mais l'é:quité c.l'un

tribnnal c!tabli

poor con(crvcr la purcté de la

foi

on nc: ctoit pas la

mel~r :~.vcc

la mauvaifc: cofitumc:

que

de lut peut

f;ure

la mallce des homme.s,

comme

3 la ft\lntété

des

myfil!rc•

ufiu~~

par

l'Eglifc ne

porte point

de

pt~JUdice

1'

impieté des miniftres qoi en

font

le.t

dif)lcnf~teuu.

ou ele

¡)luiicuu

frJele$ qui

en

plrtici~nt

On veut que l'lnquifidon

e~erce

f.1

tyranme dan' ces

region', o!) 1\>n

fait enrore pretcr fer–

ment de ne point enfeigncr d'autrc

philofophic

que cellc d'Arifto.

te · Mais cene opimltreté de

pour (utvre les dol\:rines d'Arifiote

nc

d~pcnd

pas de l'lnquili.uon, puifque

le fiecle

pa!Té clans

la

Francc,

&.

dans. la

meme

univerfité

de

t,aris

on enfcignoit

&

juroit

auffi

la

~

oao.ne.

d' Ari(\otc, quoique

fút

p:u

en Fr.lnl'c:

le

tribunal

de

.l lnqu•fit~on.

<?n n'a qn' 3

Jire

le uaité de

Monfil!Ut

de

Lau.

AOI

¿,

't!An• ..Arifttt,

f•nun•.

&

priacip:~;Jemenr

lea

ch;~pitres

XV.

GEO

cevoir la lumiere que cet efprit peut )' répandre. C'efl

peut-étre le feul mayeo de fairc fecoüer peu-

a-

peu a

cerraioes contrées de l'Europc, le ¡oug de l'opprel!ion

&

de l'ignornnce profonde fous laquelle elles gémillent.

Le petit nombre d'hnmmes éclairés qui habiten! cer–

tains pays d'inquifition , fe plaint amerement quoiqu'en

fecret, du peu de progri:s que les

Science~

ont fair

¡ufqu'ici daos ces trine>

clim~ts.

Les précauuons qu'on

a prifes pour empecher la lumiere d'y pénérrcr, ont

Íl

bien réuffi, que la Philofophie y en

~-peu-pres

daos

1!=

meme état otl elle éroit parmi nous du rems de Lours

le

J

cune .

JI

en cerrain que les abus les plus intoléra–

bles d'un tribunal qui nous a roO¡ours

fi

¡uf!~ment

ré–

voltés, ne fe lont produits

&

ne s'euuetienuent que par

l'ignorance

&

la fupernirion . Eclaire'l. la nauon,

&

les

minillres de ces rribunaux renonceront d'cux-memes

a

des

e~ces

doot

ils auront les premiers reconnu 1' in¡u–

flice

&

les inconvéniens . C'en ce que nous avons va

arriver dans les pays ou le gofit des

Am

&

des Scien–

ces

&

les lumieres de la Philofophie fe font confervés.

On érudic

&

on raifonne en

ltalie ;

&

1'

inquiririon y

a beaucoup rabattu de la ryrannie qu' elle exerce daos

ces régions , otl

1'

on fait encare preter ferment de ne

point enfeigner d'aotre philofophie que celle d' Arif!ote.

Faites na¡tre, s'il en poffiblc, des géomerres parmi ces

peuples; c'efl une fe menee qui produira des philororhes

avec le rems,

&

prefque fans qu'on s'appcrc;oive. L'or–

thodoxie la plus délicate

&

la plus fcrupuleufe o'a rien

a

démeler avec la Géométrie . Ceux gui croiroient

a–

voir intérét de tenir les efprits daos le'r ténebres,

fuf–

fcnt-ils aíT'ez prévoyaos pour prerTentir la fuite des pro–

gres de cene fcience, manqueroiem roü¡ours de prérex–

-te pour l'empecher de fe répandre. Bten-t6r l'étude de

la G éométrie conduira a eelle de la méchanique; cel-

le- ci menera comme d' elle-meme

&

fans obrlacle,

a

l'étude de la faine Phyliquc;

&

en fin la faioe Phyfique

a

la vraie Philofophie, qui par

la lumiere générale

&

prompte qu'elle répaodra , fera bien- t6t plus puilfante

que tous les efforrs de la fupernirion ; car

ces

efforrs,

quelque grands qu' ils

foienr, deviennelll inurile.s

d~s

qu'une fois la oation en éclairée. (t)

Croira·t-on que nous parlons

lérieufement ,

fi

nous

employoos les dernieres lignes de cet arricle

:l

¡uf!i6er

les

Glom<tru

du reproche qu'on leur fa ir d'ordinaire,

de n'étre pas forr porrés

a

la foOmiffion en matiere de

foi?

N

ous aurions honre de répondre

a

cette imputa–

tion, li elle n'éroit malheureufement auffi commune qll'

elle efl in¡ufle . Bayle qui douroit

&

le

moquoit de

tour, n'a pas peu contribué

a

la répandre par

les ré–

flexions malignes qu'il a hafardées dans l'anicle

PaJea/,

contre l'orthodoxie des Mathématiciens,

&

par fes la–

menrations fur

le malheur que

les

Giom<tru

ont eu

;ufqu'ici de ne voir aucun de leurs noms daos le ca–

lendrier ; lamentations trop peu férieufes pour erre rap–

ponées dans un ouvrage auffi

~rave

qae cclui-ci. Saus

répondre

a

cene mauvaife plailanterie par quelqu'aurre,

il elt facile de fe convaincre

P"

la leélure des éloges

académiques de M. de Fonrenelle, par les vies de De–

fcarres, de Pafcal ,

&

de plufieurs marhématiciens cé–

lebres ' qu' on peut erre

giometrt

fans erre pour

fes

freres un fu¡et de fcandale. La Géométrie ;\

la

vérité

ne nous difpofe pas

a

a1oOrer beaucoup de foi aux rai–

fonnemens de la Medccine fyflém>tique, aux hypothe–

fes des phyliciens ignorans, aux fuperflitions

&

aui pré–

¡ugés populaires ; elle acco(\tume

:i

ne pas fe canten–

ter aifément en matiere de preuves : mais les

vérités

que la révélation nous découvre, ,font

fi

différentes

de

cellei que

la

raifon nous apprend, elles y onr

a

pe11

de rapport, que l'évidence des unes ne doit ríen pren.

dre fur le refpeét qu'on doit aux autres. En fin la foi

efl une grace que Dieu donne

:l

qui

il

luí plait ;

&

puif-

8c

XVU.

o~

on rappone

les

arre

u

do P:ulement,

&:

de la

Sorbon ..

m:

tl1ns

h.'1 annécs t6ot .

8c

1614. en faveur

de

l'ancienne, phi–

lofophie d'

Ariftotc .

Le motif

pour lequel

domine encare l'étude

da

dollrines

d'Arifiote

dans quelqoes

nations

d~!

l'Eurore ce n'etl: pu

l'lnquifition.

mnis la

cot'aume

invét:!rée,

&

le$

pr~jug~s

doot

une

n:uion avc.c

grande

peine

fe dt!pouille :apres

le

cours

de

plufieun

fiech.!l

>

&.

pour

cela on peur dire avec

Horace:

!JJ..JI.o

[tmtl tfl imhMt• rutnl {tr11úir .d,.tm

TtjlA diu.

Et

l:1 raifnn

de cette ma.uvai(e

opinillret~

tire

(.\

fource

des

vicuE

des nations, qai comme difoit le méme Poete onr de la hoore.

!:!._11•

jurmtll didietrl,

{tntl

ptrdmd4

[t~ttr~'.

Je

puis

2prorrer

pour

eremple

la

Fraoce

m~me

laquelle remplie par

pi•-