FOR
avcc le corps. D'un autre c6ré, chaque évenement étant
préva par l'inrelligence divine,
&
exiflant
d~
roure éter–
oiré daos fes decrers, tour ce qui arrive doir infaii–
liblemenr arriver; la liberté de l'homme pnroir inconcilia–
ble avec ces vérirés. Nous fenroos néanmoins que nous
fommes libres; l'expérience
&
une opérnrion facile de
norre efprit fuffifenr pour nous en convaincre. Accott–
tumés
a
faire
a
plufieurs reprifes, fouvcot mi: me dans
des occafions femblables en apparencc, des aél:ions di–
reéhment oppofées, nous féparons par abflraél:ion le pou–
voir d'agir d' avec l'aél:ion m eme; nous regardons ce
pouvoir comme fubfiflaot, méme apres que l'aél:ion en
faite, ou pendant que nous faifons l'aél:ion contraire;
&
ce pouvoir oilif' quoique réel' en ce que nous ap–
pellons
libertl.
En vain la roure-puiifance du Créareur,
en vain la fageOe de fes vue< érernelles, qui affujerrir
&
qui regle tour, nous paroiffenr incompatibles avec
cetre liberté de l'homme; le fentimenr iorérieur,
& ,
ti
on peur parler ainfi, l'inninél: conrrairc doit
1'
empor–
•cr.
JI
en en ici comme de
1'
exinence des corps,
a
lnquelle nous fommes forcés de revenir, par quelque
f()phifme qu'on l'auaque. Nous fommes libres, paree
que dans la fuppolition que nous le fuflions r<'ellemenr,
nous ne pourrions pas en avoir une confcience plus
vive que cene que nous en avons. D'ailleurs cette con–
fcicnce efl la feule preuve que nous puiflions avoir de
notre liberté; car la liberté n'efl amre chofe q.u'un pou–
voir qui ne s'excrce pas aél:uellemcnt,
&
ce pouvoir
ne peur etre connu que par confcience,
&
non par l'e–
xercice aél:uel, puifqu'il en impoffible d'
ex
écurcr en
me
me rems deux aél:ions oppofées.
Suppo"fons mille mondes cxillans a-la-fois, rous fem–
hlables
3
celoi-ci,
&
gouvernés par couféquenr par les
m emes !oís; rout s' y palli:roit abfolument de méme .
Les hommes en vertu de ces lois feroienr aux m cmes
inf!ans les m emes aél:ions daos chacun de ces mondes;
&
une inrelligence
dilf~rente
do Créareur qui verroit
<1-la-fois rous ces mondes
li
femblables, en prendroit
les habirans pour des automares quoiqu' ils n'en fulfenr
pas ,
&
que chacun
d'~ux
au dedans de lui-méme fO.t
af<ílré du conrraire. Le fentiment inrérieur en done la
foule preuve que nous ayons
&
qoe nous puiffions a–
voir d'étre libres.
Cette preuve oous fuffit,
&
parolr bien fi1périeure
ii
toutc aurre; car de dire avee quelques philofophes que
les lois font fondées fur la liberté, qu'il feroir injufle
de punir les crimes s'ils éroienr nécelfaires , c'efl érablir
une vérité bien claire par une preuvc bien foiblc. Les
hnmmes fuffent-il< de pures machines, il fuffiroir que
la cra111tc fat un des mobiles principaux de ces machi–
""' , pnur que ceue crainte fat un moycn efficacc d'em–
p·ccher un grand nombre de crimcs.
11
ne feroit alors
ni ¡uf!e ni in¡u!le de le< punir, paree que fans liberté il
n"y a ni juflice ni in¡unice; mais il feroir roO¡ours né–
cdTaire d'arrerer la méchanceré des hommes par des
chatimeo<' comme on oppofc
a
un torrent funelle des
digues puiffaores qui le forcenr
ii
changer fon cours ,
L'cffc r néceffaire de
In
crainte efl d'arr.Oter la main de
l'auromate réel ou foppo(é ; fupprimer ou arrérer
ce
rclforr , ce feroir en empccher l'effer ; les fupplices fe–
ro;ent done daos une fociété mcme d'auromares ( qui
Tome f/11.
{a)
O
altit,.do!
&c.
fi2!!am incomprehenfibilia funt judicia e–
jus,
t9"
qunm inenarrabiles vi«. ejtts!
Ces J?aroles prouvent
a!lh
que, fuivant l'Ecriturc meme, l'accord de la libcr-
(
1) Le fcntiment intéricnr
en
une prcU\.·e de la liberté
hum~ine,
mai'
il
n'e!t p:u '"
{tul~
prtutre
que nous ayons,
8c
que nou-; pnir–
fions
:~.voir
d'étre libres.
l!t
cela
en
fi
vrai, que les
Lcibniniens
crorem que cette preuvc ne foir pas de grande conféquence . C'cfi'
:linli qu'écrivent \Volfiu.!, Caozius, BUlfioger,
&.
Kocthen. dont jc
poncr:u
fculement
le
témoignage.
~;
líbcrtattm t:l(ptrimtitÍ
im~
r.1ttiiArt unjlart,
J,.
e.
homhJtm immtdiatt
in
{t
{tntirt
(7 u·penr:·
,,,
ertd,.nt,
no11
{lftis crmfidcrttnt, quod
tJccHrlltt'ori Atttnti.,ne
ttd
fltJ–
tum mt,ltit intunum to temport 9111 libere agimus
•
j~t.(lá,
proprit lo–
~''t'fdo
nil11'l
{tflti•mus,
'"'MI
cxptriamHr.
(
Princ.
mctarh.
\Vol
f.
l'rmc:'. 31.
§.
1..
pag. 56. ) Et poor
cet
eff~t
ils difent.
qu~
cette
prC~IVC
OC
COnduit
pa"
immédiatement
3.
l'•:tffurance
de
la
hbert~
o
m:m
3.
un raifonnement jufte par le moyen duquel nous connolf–
fon•
la hbené.
T.mc¡~,nim-e
1
ibtrttU
,
nrm tX {mfu, fe
d.
ex boM
ra–
tiocin··~ c•nft~~.rtt,
u:
quo
inte//,gtrttur volHntAttm noftram tjft lilu–
~4"'
.
1b1d p:tg.
f7.)
Gt enfuitc il s':tvance
3.
pronver , que l'on
p~ut
1magmer.
dlfférem étau
de
l'ame,
dnns lefquels
le
fentiment
JO–
terne !'Dcme uni avec l'cxpc'riencl!, ne prouve
p:u
que nou.s fo–
~on~ hb_r~s .
V4rii fttuu1 , ttnim• IJumAnte
fi.,!.¡
poffunt,
"'''
{tn["_l
v-
txpntt/Jllt& pro
J lbtrttJic
t.)lll
nihil probant
(1bul ) Je me fu¡s
arrtté dans lc.s Le1bnirzicns, p:arcc qu'its dcvroient phu qn'aucune
;I!Utte
feél-c f:urc u(agc de \'argumcnt tiré de l:t confcience
o
pour
FOR
I7I
n'exille pas) OQe roue nécelTaire pour regler la machi–
oc . (
1)
La notion du bien
&
du mal en done une fuite de
la norion de la liberté,
&
non pas la norion de la
li–
berté une fuite de la norion du bien
&
du mal mo–
ral.
A l'egard de la maniere dont norre liberté fub!Ífle a–
vec la providence érernelle, avec la jullice par laquelle
Dieu punit le erime , avec les lois immuables auxquel–
les tous les étres fonr fot1mis, e'en un fecrer incom–
préhenfible pour nous , donr
il
n'a pas pla au Créareur
de nous rév éler la connoiffaoce; mais ce qui n'en peut–
crre pas moins incompréhenfible, c'en la rémérité avec
laquelle cerraios hommes qui fe croyenr on qui fe difent
fages, ont eurrepris d'expliquer
&
de concilier de
rel~
my–
nercs. En vain la révé lation nous afs8re que cer abyfme
en impénérrable
(a) ;
la philofophie orgueilleufe a entrepris
de le fonder,
&
n'a fair que s'y perdre . L es ons cro–
ycnr avoir reufli par une dillinél:ion entre l'infaillible
&
le néceffaire; diflinél:ion qui pour étre réelle, ne nous
laiffera pas des idées plus nerres , des que nous vou–
drons l'approfondir de bonne foi: les autres, pour ex-
. pliquer comment D ieu en l'aureur de rout lans l'etre
du péché, difent que D ie u en produit tour le phyfiq ue
fans en produirc le moral, qui ell une privation; com–
me fi en leur accordant méme cerre dinintlion futile
&
chimérique, il ne rcnoit pas roiijours
á
expliquer com–
menr la fageffe de D ieu peur concourir
a
un phylique
auquel le moral efl néceffairemeor arraché,
&
commenr
fa Juil ice punit enfuite ce meme moral, fuire néceffai–
rc du phylique qu'il a produir; ceux-ci, en faifant
a–
gir l'bomme d'une maniere tres- fubordonnée
i\
Dieu,
&
dépendanre de decrers prédérermioans, fauvenr
r~el
lement la puitrancc de D ieu aus dépeos de norre liber–
té; ceux-1:1 au conrraire plus amis de l'homme en ap–
parencc, croyen r fauver la perfeél:ion
&
l'inrelligence di–
vine, en admeuanr en Dieu une kicnce indépcndanre
de fes decrers,
&
antérieure
a
oos aél:ions. ll< ne s"ap–
per~oivenr
pas non-feu.lemcn t qu' ils dérruifent par ce
fyf!eme la prov idenc e
&
la toure-puiff.1nce de Dieu ,
en faifanr
la
volonré de l'homme
indépendante
,
mais
qu'ils rerombenr fans y penfer, ou dans le fylleme de
la fatal iré, ou daos l'arhéifme; car la fcience de D ieu
ne peur er re fondée que fur la connoiffaoce qu'il a des
lois immuab.les par lefquelles l'univers ell gouverné,
&
de l'etfet infaillible de ces lois,
&
D ieu
oe
peur de–
voir cene connoiffaoce qu'a la dépendance ou
ces
lois
&
leurs effers font de lui.
e·
en ainfi qu' en voulan t
concilier ( malgré
1'
oraclc de Dieu mi' me) les deux
vérités dont il s'agi r , nn ne fait qu'anéantir )'une des
deux, ou pcut-etre aff<>iblir !'une
&
l'aurre : aufli n'y
a-r-il aucune feél:e de fcholafliqucs, qui apres s'erre e–
puifée en raifonnemens, en diflinélions , en fubrilirés ,
&
en fyflcmes fur ce r important arricle, ne revicnne
en fin ' prdléc par les ob¡eélions'
a
la
profondeur des
décrets éternels. Tous ces fophifles en avoüan t leur igno–
rance un peu plílr6t,
n'
auroient pas
e
u la peine de
faire raor de détours pour revenir au point d'ou ils é–
roient partís. Le vrai philofophe n'ell ni rhomine, ni
molinine, ni congruifle; il reconoolr
&
voir par-tour
13
puiaimce fouveraine de Dieu ; il avoue que
1'
homme
Y
1.
efl
té
avec la fcience
&
la puiff.,nce de Dieu , en u¡1 my–
li.erc.
f~uver
la lihercé. qui ne fe trouve
r~·
effc:él.ivcmencúans l'bat'–
monic prél!tablie daos tes mouvemens
dli
corps.
&.
daos
.tes fe-n–
timcns
de
l'ame.
Et
commcnc
done prouverons
nous
_l:t
!tb~rcé
d:
nos atlions1
je
répondrai
avcc
le méme
~criv.ain .le•bmnte~
q111
nc
~'éloignc
p:ts
de la (3
int: ll)lilofophie ..
nos
alhons font
!1bre.s
., (
dit
i1
Princ.
3
z..
§.
1•
p
3
g.
H.)
p;ttce qu·en
les
c~mprl!_nant
,,
nous connoiffons. qu'c\les ne font pas
abfo~ument
ncc:lfatres .
~·
puifque nous pouvons quand
il
no•a plait, fa1re
~e,s a~t~ns
op...
..
rof~e.s;
puifqu':tucun cas ou condilion
ne
non"
obhge d agtr con–
"
rre
narre propre volonté
¡
paree _que
fuppo~.!
le1 r;ufom
.qui
fuf...
..
fifent p.our
::tgir. nous
fomm~s
.hbres
de
~trc
ceue alhon, d.e
,,
l;¡ 'b.ifler
ou
d'en f:lirc une
d1ffcrcnte; pu1fque ce que nous
fal–
•·
fon!f n'el1:
p;
15
l'nniquc
d.:
ce qu'on
p~ut
faire
~ans
ce
ge~rc
"
d'aél:ions;
fin:tlement
noU<~
nous détermmons
a
:.g¡r
par un pnn..
••
cipe interne
&
cxempc
de
toutc.
nl=cdlité ,
coaé\ioo,
&
dépen–
"
d::mce, ce
qui
eft le
l·~re
arbme. pou_r caufe
du9uet. 1'
:ame
..
en choil'iff.1nt. en dctermm:mt.
&
en agtlfant
en
tres- hbre
...
Le ledeur uouvcra Jans cettc coune expofition l'elfcntiel des ré–
ponfes que donnent totH
:au
long les Scholailiquea aux Fataliftes pour
expliqtler
la
libeJté huruaine 3
laquulte hu Divin' Duc:rcu ce
por–
tent
point de préJUdice.